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SACERDOCE CATHOLIQUE

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l’antiquité égyptienne, ou assjrochaldéenne, ou grecque ou romaine ; qu’il suffise de renvoyer au livre classique de Fustel i>b Coulangbs, La Cité antique. On sait que les empereurs chrétiens ne renoncèrent que sur le déclin du ive siècle au titre, hérité des Césars païens, de Pontifex Maximus.

Mais souvent les fonctions sacerdotales devinrent le partage d’hommes spécialement consacrés au service de l’autel. Le sacerdoce lévitique se transmettait par hérédité dans la lignée d’Aaron, en vertu du choix fait primitivement par Dieu (Ex., xxvni, 1 sqq.). Non moins que le sacerdoce lévitique, le sacerdoce chrétien requiert une vocation divine. Ueb., -, i-4 : « Tout grand-prètre, pris d’entre les hommes, est établi pour les hommes, en vue de leurs relations avec Dieu, aiin d’offrir des dons et des sacrifices pour les péchés ; il doit savoir compatir à l’ignorance et à l’erreur, d’autant que lui-même est environné de faiblesse. Aussi doit-il non seulement pour le peuple, mais encore pour lui-même, oirrir des sacrifices en vue des péchés. Nul ne s’attribue à lui-même l’honneur (du sacerdoce), s’il n’est appelé de Dieu, r irume Aaron. » Dans le recrutement du sacerdoce chrétien, l’hérédité n’agit plus : chaque élu doit être l’objet d’un choix individuel. Et l’originalité transcendante de ce nouveau sacer.loce lui vient d’une relation essentielle à Jésus-Christ, Grand-Prèlre de la Loi nouvelle. Ueb., v, 5-io : « Ainsi le Christ ne s’est-il point arrogé la gloire du grandprêtre, mais (la tient de) Celui qui a dit : « Tu es mon Fils, je t’ai engendré aujourd’hui » ; et de même, ailleurs :

« Tu es prêtre pour l’éternité, selon l’ordre de

Melchisédech. » Aux jours de sa chair, ayant présenté ses prières et supplications à Celui qui pouvait le sauver de la mort, avec un grand cri et des larmes, exaucé en vue de sa piété, tout Fils qu’il est, il apprit, à ses dépens, l’obéissance ; consommé (dans l’obéissance), il est devenu pour tous les obéissants l’Auteur du salut éternel, déclaré par Dieu Grand-Prêtre selon l’ordre de Melchisédech. »

Saint Paul s’appuie sur l’Ancien Testament (Ps., cix, 4 ; cf. Alt., xxir, 44) pour montrer dans le Christ le chef d’un sacerdoce infiniment supérieur au sacerdoce d’Aaron. Sacré par l’élection divine au jour de l’Incarnation (Ueb., x, ô-’j), il a consommé son sacrifice (ib., ix, 11-28 ; x, 10 1 4), parle sang qu’il a versé au Calvaire, et il est entré triomphant dans le sanctuaire du ciel. Mais il avait préludé à cette immolation sanglante par l’oblation de la Cène ; et cette ohlation, les prêtres du Nouveau Testament la rééditent à l’autel. De la Cène procède tout le sacerdoce chrétien, comme le sacrifice chrétien.

Après avoir offert son corps et son sang sous les espèces du pain et du viii, Jésus Christ dit aux siens :

« Faites ceci en mémoire de moi. » (/-c, xxii, 19 ; I

Cor., xi, 24-2")). Toutes les fois que vous mangerez ce pain et boirez ce calice, vous annoncerez la mort du Seigneur, jusqu’à ce qu’il vienne. » (I Cor., xi, 26).

Ces paroles sont un commandement exprès ; et le commandement opère, en instituant à jamais le sacrifice du corps et du sang du Seigneur, et les Apôtres, ou ceux qui prendront leur place, comme ministres du sacrifice. Le texte sacré, qui concerne l’investiture reçue par les Apôtres à la Cène, est la charte du sacerdoce chrétien. Par sa rédaction, cette charte remonte aux origines même de la prédication évangélique. L’expression la plus parfaite se lit en saint Paul ; or saint Paul écrivait sa première épltre aux Corinthiens en l’année 55 ou 56, à une date où peut-être aucun de nos évangiles n’existait encore sous la forme qui nous est parvenue ; il n’y a peut-être pas dans le Nouveau Testament une parole du Seigneur plus anciennement attestée.

Le pouvoir donné par le Christ sur son propre corps constitue la première prérogative du sacerdoce chrétien.

Et voici la seconde. Le Christ avait ébauché un autre don, qu’il se réservait de parfaire après sa résurrection. Il avait dire à Pierre, Mt., xvi, 19 : « Je le donnerai les clefs du royaume des cieux ; et tout ce que tu lieras sur terre, sera lié dans les cieux ; tout ce que tu délieras sur terre, sera délié dans les cieux. » Et à tous les Apôtres, Alt., xviii, 18 : « En vérité je vous le dis, tout ce que vous lierez sur terre, sera lié dans le ciel, et tout ce que vous délierez sur terre, sera délié dans le ciel. » Le soir de la résurrection apporte la réalisation de la promesse, quand le Seigneur dit aux Apôtres réunis, lo., xx, 22, 23 : « Recevez le Saint Esprit ; tous ceux dont vous remettrez les péchés, ils leur seront remis ; tous ceux dont vous retiendrez les péchés, ils leur seront retenus. »

Pouvoir sur les fidèles, qui sont les membres du corps mystique du Christ, s’ajoutant au pouvoir de consacrer l’Eucharistie.

Toute la tradition chrétienne, depuis les origines, a vu dans ce double pouvoir un don qui descend de Dieu, un charisme, au sens le plus strict.

Et très tôt elle eut le sentiment que la transmission de ce charisme était liée à un rite extérieur. La première apparition historique du rite se rattache à l’institution des sept premiers diacres, placés sur un degré inférieur du sacerdoce. Ait., vi, 6 : « Ils les amenèrent devant les Apôtres, qui prièrent et leur imposèrent les mains. » Le geste de l’imposition des mains ne devait pas servir seulement à liniliation diaconale. Quand l’Esprit Saint désigne Paul et Barnabe pour une mission spéciale parmi les Gentils, on réédite sur eux le geste d’initiation, Ad., xiii, 2-3 : « Tandis qu’ils s’adonnaient au service du Seigneur et au jeûne, l’Esprit Saint dit : Séparez-moi Paul et Barnabe, pour l’œuvre à laquelle je les destine. Alors, ayant jeûné et prié, ils leur imposèrent les mains et les laissèrent aller ». Saint Paul avait établi Timothée pour régir l’Eglise d’Ephèse. Il lui écrit de Rome pour lui remettre en mémoire le don divin qu’il a reçu et l’inviter à en faire bon usage.

I Itm., iv, 1 4 : « Ne néglige pas la grâce qui est en toi, qui te fut donnée par une parole inspirée, avec l’imposition des mains du collège sacerdotal. » M/ ; àfii/si roj h soi yapiafiv.roç, ô iiôOr, ea otx Ttpofrrrtlnz’lira, tr.tféjcui rfi> yupùv toj T.p^Zjtcpiou. De nouveau,

II 77m., 1, 6 : « Je t’avertis de ranimer la grâce de Dieu qui est en toi, de par l’imposition de mes mains. »’Avap.twsiiï/.u at ôaiodÇwnvptïv ib yâ.pvspv. reO ©îoO, i izzu b -.i Stà rfii titiOimtt *& » %tipG », « ; v. L’Apôtre présente le don du sacerdoce comme une grâce d’en haut, qui ne dispense pas de l’effort, mais qui, une fois reçue par l’imposition des mains, demeure acquise, en dépit même des infidélités.

Telle est bien la conception traditionnelle du sacerdoce chrétien. Travaillant sur cette donnée, la théologie catholique a élaboréla notion du caractère sacramentel indélébile et la distinction d’un double pouvoir : pouvoir d’ordre qui constitue le prêtre, et pouvoir de juridiction, qui l’habilite pour le ministère des âmes. Nous ne croyons pas devoir reprendre ici l’exposition d’idées développées ailleurs dans ce dictionnaire, soit à l’article Sacrements, soit à l’article Ordination, soit à l’article Evkquks, soit à l’article Église. Mais il faut dire un mot des attaques dirigées cou lie la conception traditionnelle du sacerdoce chrétien et de la hiérarchie ecclésiastique, par l’individualisme protestant, au nom de la conception large du sacerdoce.