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REVOLUTION

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La névrose révolutionnaire était à son apogée. Cependant aux armées, des généraux, des administrateurs se révélaient. Jourdan, Hoche, Picliegru, Moreau, remportaient des succès et repoussaient les Allemands de l’autre côté du Rhin et les Autrichiens en Belgique. Au milieu des turpitudes de l’intérieur pénétraient quelques rayons de gloire militaire, mais les Anglais, maîtres de la mer, nous enlevaient les Antilles, Pondichéry, la Corse.

Au sein de la Convention, les Montagnards, débarrassés des Girondins, se divisaient et se dévoraient entre eux. Aux luttes des journaux le Père Duchéne et le Vieux Cordelier, correspondirent des batailles de tribune qui envoyèrent successivement à l'échafaud Hébert, Danton et ses partisans.

Robespierre semblait tout-puissant. Le meurtre de Marat, tué par Charlotte Corday, l’avait délivré d’un rival en popularité. Hautain, sûr de lui, il déclarait qu’on allait parvenir au « règne de la vertu » et, tout en faisant condamner Madame Elisabeth, Malesherbes, André Chénier, il incitait la Convention à reconnaître en ces termes l’existence de Dieu : « Le peuple français reconnaît l’existence de l’Etre suprême et l’immortalité de l'àme. »

Mais Robespierre s'était aliéné pas mal de Conventionnels, même parmi les Terroristes. Une réaction, timide toutefois, contre ce régime de la Terreur, commençait à se manifester dans l’opinion. Les assassinats juridiques de la Convention finissaient par écœurer la population. En quinze mois, à Paris seulement, la guillotine avait fait plus de 2.600 victimes et, comme les patientes investigations de Taink l’ont établi, « c’est l'élite du peuple, qui, dans le peuple, fournit la principale jonchée. » {Origines de la France contemporaine, tome III, Qv. IV, ch.i).

Les tribunaux ctaieut devenus des « boucheries » et, au début de 1794, il "'y avait pas moins de 6.000 personnes des deux sexes emprisonnées et en instance de guillotine.

Quand, le 8 thermidor, Robespierre prononce à la Convention son apologie et menace ses ennemis, il est l’objet de violentes attaques. Décrété d’accusation le lendemain, il s’appuie sur la Commune, laquelle proclame l’insurrection. Mais des défaillances se produisent dans ses troupes. Barras, à la tête de quelques sections, s’empare de l’Hôtel de Ville. Robespierre, Couthon, Saint-Just, gravissent à leur tour les marches de l'échafaud, où ils ont envoyé tant d’innocentes victimes… et la foule applaudit leur exécution.

c) La Réaction thermidorienne. Le 13 Vendémiaire. Les Conventionnels furent très surpris des ovations qu’ils recueillirent le 10 thermidor, à leur sortie des Tuileries. Ils n’avaient voulu faire qu’une révolution de palais sans changer autrement l’orientation de l’Assemblée, et ils apprirent que, dans l’opinion populaire, la chute de Robespierre signifiait la fin de la Terreur. Les prisons s’ouvrirent presque spontanément et les milliers de suspects qui les emplissaient firent place à quelques douzaines de terroristes, pour lesquels fonctionna encore la guillotine.

La Convention, subissant l’action de l’opinion, supprima la Commune de Paris, abolit la plupart des lois révolutionnaires, rétablit la liberté des cultes. Les Jacobins furent livrés à la risée publique et nmlestés par des jeunes gens, qui, tous le nom de Muscadins, armés de fortes triques, devinrent les maîtres de la rue. Le fameux club des Jacobins fut fermé et les restes de Marat, exhumés du Panthéon, furent jetés dans un égout.

Sur nos frontières, la guerre se poursuivait avec

des alternatives de succès et de revers. L’idée que le régime de la Terreur avait déterminé nos victoires et que la Convention en assumait tout le mérite, est contraire à la réalité et n’est plus soutenue que par des sectaires endurcis. La vérité est que la réorganisation des armées, la formation des cadres, l’amalgame des volontaires avec les vieux soldats des anciens régiments s’effectuèrent non pas grâce au gouvernement mais malgré lui, et ce n’est pas la guillotine, mais l’esprit militaire reçu par atavisme qui nous donna de bons généraux. Au début de 179, 5, Pichegru s’emparait de la Hollande, Jourdan conquérait la rive gauche du Rhin. Les deux traités de Bàle terminaient la guerre avec la Prusse et l’Espagne, rendant à la France ses frontières naturelles. A l’intérieur, la Vendée était momentanément pacifiée ; mais les ferments de discorde n’avaient pas disparu.

La multiplication des assignats, la guerre avec l’Angleterre, en amenant un renchérissement considérable des denrées, avaient entraîné une misère générale qui, dans les faubourgs, équivalait à une famine. Les Jacobins en profitèrent pour susciter les insurrections du 12 germinal et du I er prairial, que les sections thermidoriennes parvinrent à réprimer. De leur côté les royalistes ne restaient pas inactifs ; ils comptaient sur le débarquement de Quiberon, sur l’appui de Pichegru et sur un mouvement populaire à Paris. L'échec de Puisaye, la destitution de Pichegru, la journée du 13 vendémiaire, où, sous les ordres de Barras, un jeune otlicier d’artillerie, Bonaparte, mitrailla les sections royalistes, arrêtèrent un mouvement qui provoquait de grandes espérances dans toutes les provinces.

Avant de se séparer, la Convention avait voté la

« Constitution de l’an III », confiant à deux conseils, 

celui des Cinq-Cents et celui des Anciens, le pouvoir législatif et attribuant à cinq directeurs, élus par les conseils et renouvelables annuellement par cinquième, le pouvoir exécutif.

La Convention s’imaginait finir en beauté, en élaborant cette Constitution et en tâchant de l’aire oublier, grâce à ses armées, les turpitudes et les infamies sanguinaires delà Terreur. Elle livrait en réalité la France à l’anarchie, à la corruption, à la ruine financière intégrale.

Le Directoire (27 octobre 1795-9 novembre 1799). — Les premiers Directeurs étaient tous régicides. C'étaient Larevellière-Lépeaux, Letourneur, Reubel, Barras et Sieyès ; ce dernier, ne voulant pas « essuyer les plâtres », n’accepta pas et fut remplacé par Carnot. Il était ainsi acquis que le nouveau régime ne répudiait rien de l'œuvre révolutionnaire. Son autorité n'était pas grande : royalistes et jacobins extrémistes n’abdiquaient rien de leurs espérances.

La situation financière était désespérée. On crut habile de remplacer les assignats, dont personne ne voulait plus, par des « bons territoriaux » gagés sur une valeur fixe des biens nationaux ; on décréta un impôt forcé de 600 millions sur les personnes riches, impôt qui produisit à peine la moitié de la somme demandée, et finalement le Directoire, en consolidant sur le Grand Livre le tiers des créances de l’Etat, Ut une banqueroute qu’on peut évaluer à plus de trente milliards de francs. Cette débâcle financière donna prétexte à un agiotage scandaleux et à des actes de corruption auxquels les membres du gouvernement ne restèrent pas étrangers. L’incrédulité, le matérialisme, la débauche eurent libre cours. Les lois de proscription contre les catholiques furent remises en vigueur. A l’instar de Robespierre, Larevellière-Lépeaux voulut créer un culte et devint