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RELIQUES

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pour le culte de saint Thomas un zèle empressé. Le corps avait été inhumé devant l’autel de l’église. En 1281, lors d’un transfert qui l’amena dans un lieu plus honorable, et de nouveau en 1288, pour satisfaire la dévotion de Théodora, comtesse de Sanseverino et sœur de Thomas, la sépulture fut ouverte etles restes précieux trouvés sans corruption. La main droite, détachée pour être remise à la comtesse, fut déposée dans la chapelle de son château, d’où elle aboutit plus tard au couvenl des Dominicains de Salerne. On détacha aussi le chef, et on eut l’audace, un peu étrange à nos yeux, de faire bouillir le corps afin de décharner le squelette et de pouvoir manier les ossements. Il paraît que ce traitement n’était pas alors sans exemple et fut appliqué aux restes du roi saint Louis. En 1368, les restes de saint Thomas d’Aquin devaient prendre le chemin de Toulouse.

Saint François Xavier, mort dans l’île de Sancian, le a^novembre 155-2, futinhuméà Goa en mars 1554-Durant la navigation de Chine à l’Inde et une escale d’un mois à Malacca, Dieu glorifia 6es restes par une conservation merveilleuse et une série de prodiges. On les retrouva encore intacts le 3 novembre 1 6 1 4, qu-ind, par ordre dn P. Claude Aquaviva, Général de la Compagnie de Jésus, le bras droit de l’apôtre, instrument de tant d’oeuvres divines, fut détaché pour être porté à Rome. Lors du troisième centenaire de la canonisation (mars 1912), cette relique insigne quitta le sanctuaire romain du Gesù pour bénir l’Espagne et la France. Des témoignages respectables permettent d’avancer qu’à plusieurs étapes de cette marche triomphale, la vertu du thaumaturge s’aflirma comme au xvie siècle.

Voir A. Brou, Saint François Xavier, t. II, p. 368 ; 383-386 ; 4°o-4’3 ; Paris, 1912 ; Pierre Lhande, Le retour du Thaumaturge, Etudes, 5 nov. 1922, p. ib-j26g.

Les pérégrinations du corps de sainte Térèse sont célèbres. Morte le 2 octobre 1882 à Albe de Tormès, elle y fut inhumée. Deux ans après, ses restes furent trouvé* sans corruption, malgré l’effondrement du cercueil et d’autres accidents. Les Carmélites de saint Joseph d’Avila croyaient avoir certains droits sur le corps de leur mère : il leur fut accordé à la fin de 1 585, et leur resta un peu moins d’un an. En août 1586, par l’autorité de Sixte V, il rentrait à Albe, pour n’en plus sortir. Ces deux translations, et les diverses reconnaissances qui eurent lieu ultérieurement, s’accompagnèrent de gracieux miracles : multiples apparitions, exhalaison de parfums célestes. Elles furent aussi l’occasion deprélèvementsréit’irés, qui pourvurent abondamment de reliques les monastères d’Espagne, de Portugal, de Rome, de France, des Pays-Bas, d’autres sanctuaires. Le miracle de conservation semble n’avoir pas pris lin. —Voir Œ wret complètes de Sainte Tei èse de Jésus, Traduction nouvelle par les Carmélites de Paris, t. II, p. 353-378 ; 3g8-400. Paris, 1907.

Le cœur de Sainte Térèse, conservé dans un reliquaire spécial au monastère d’Albe, porte de part en paît une blessure où l’on a cru reconnaître la trace laissée par le dard du séraphin (Vie, chap. xxix ; mémeédilion, t. I, p. 378-9). Sur certaines apparences miraculeusesobservéesdans cette relique, voir ibid., t. II, p, 368-0,. Les merveilles anciennes et nouvelles du cœur de Sainte Térèse de Jétus ; ouvrage traduit de l’italien, Paris- Venise, 1882. Il n’y a pas lieu de s’nrréler à l’œuvre répugnante de M. E. Cazal sur Sainte Térèse. Ce défi au sens chrétien a été relevé parles Etudes Carmélitainex, 1922.’i) Problèmes divers. — Certaines reliques ont paru présenter des particularités extraordinaires, plus ou moins dûment constatées. Nous avons con sacré un article distinct à la célèbre relique de Saint Janviek. Parfois on écarte en bloc ce genre de miracles. Mieux vaudrait discuter les témoignages. On a vu ci-dessus l’Eglise du ive siècle s’opposer au culte de certaines reliques supposées, ainsi qu’au commerce des reliques. Beaucoup d’autres interventions, au cours des siècles, montrent que l’Eglise ne se désintéressa pas de la direction prise par la dévotion populaire, capable de s’égarer sur de fausses pistes. — Sur certaines initiatives privées, voir Mabillon, De probatione Reliquiarum perignem. Vetera Analecta, p. 568. Paris, 1723.

L’incrédulité s’est égayée parfois de découvertes archéologiques, par où fut démontré le caractère très profane de reliques prétendues. Le fait ne doit pas surprendre : les conservateurs de reliques sont hommes, tcut comme en général les conservateurs d’archives ou de musées ; il leur arrive d’accueillir, de très bonne foi, des pièces fausses. Fussent-ils certains de l’inauthenticité, ils ne peuvent prendre sur eux de les supprimer, ce droit n’appartenant qu’à l’Eglise. Les règles tracées par Benoit XIV, De servorum Dei béatifications et beaturum canonizatione, montrent les principes dont s’inspire, en cette matière, l’autorité ecclésiastique. En même temps qu’à l’authenticité matérielle des objets proposés à la vénération, elle a égard à l’édification des fidèles. L’édification des fidèles a souvent peu à gagner aux entreprises des « dénicheurs de saints « ou des dénonciateurs de reliques. Les considérations de prudence interviennent ici pour modérer l’empressement de la critique négative ; d’autant que ni le mérite de la prière ni la vertu d’en haut n’est liée à l’authenticité matérielle de la relique. Voir l’Encyclique Pascendi de Pib X, 7 sept. 1907 déjà citée ci-dessus, t. III, col. 22.

Une épitaphe insignifiante : Pax tecum, Filumena, a pu suffire pour engendrer l’ingénieuse légende de sainte Philomène. Voir Analecta Bollandiana, t. XV11, p. 469. Une découverte de M. H. Marucchi, Osservazioni archeologiche sulla iscrizione di S. Filoména, Roma, 1904, oblige d’y renoncer, et de conclure que la célèbre épitaphe n’était pas celle de la personne dont elle fermait la tombe lors de la translation. Analecta Bollandiana, t. XXIV, p. 119. 120. H. Delehayb, Légendes hagiographiques, j>. 97.

— Au sujet des reliques des catacombes romaines, décret de Sa Sainteté Léon XIII, du 21 décembre 1878.

Pour apprécier les difficultés inhérentes à ces questions, on peut lire avec fruit Hipp. Dblehaïe, Le témoignage des Martyrologes, dans Analecta Bollandiana., t. XXVI, p. 79-99 (1907). Beaucoup de problèmes archéologiques restent obscurs et même insolubles. Quant à l’attitude de l’Eglise, elle est toute de prudence et de réserve.

L’Eglise s’enquiert diligemment des faits qui intéressent le culte des saints, quand ces faits sont réellement à sa portée. Par ailleurs, elle ne se croit pas mission pour trancher tous les litiges d’ordre historique. En présence de traditions locales dont le fondement premier se dérobe à toute vérification, mais qui demeurent génératrices de prière et de vie chrétienne, elle a coutume de garder uneattitude expectante, laissant les archéologues discuter et les fidèles suivre les chemins battus, dès lors que ces chemins aboutissent à Dieu. Si un conflit éclate entre deux traditions locales — le cas n’est point très rare, — elle n’assume point ordinairement la tâche de les départager.

A cet égard, le casdes « S lints deProvence » est typique. Nous le poserons, d’après Mgr L. Duciiesnr, Fastes épiscopaux de l’ancienne Gaule, t. II, c. x,