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théories d’Einstein. <E. CMron, 128 pages). — M. l.ecal a publié ona Btbl ogrephie de la Relativité (Bruxelles, îçja’i), contenant l’indication de 3.-70 travaux, écrits en ai langues par 1.176 auteurs différents, et qui appelle chaque jour des compléments nouveaux.

LoUifl PoUQUIST.


RELIGION.— THÉORIE SOCIOLOGIQUE.

— Oui s’efforce d’étudier le fait religieux, d’en déterminer l’origine, les caractères, la nature et la valeur, peut le rattacher à trois réalités : Dieu, l’individu, la société. Mais c’est un axiome pour la science des religions, qui se dit positive, et vraiment scientifique, c’est-à-dire athée, d’exclure Dieu ; il est, dit-on, du domaine supra expérimental ; il ne relève ni de la méthode scientifique, nous assure-t-on, ni du contrôle de l’expérience. Et Dieu ainsi exclu par définition, il ne reste en présence que l’individu et la société. Expliquer la religion par l’individu, c’est apporter une solution de psychologie religieuse ; la rattacher à la société, c’est donner une solution sociologique.

L’interprétation sociologique de la religion est de date relativement récente « la dernière venue », nous dit-on. E le n’apparaît, au cours du xixe siècle, qu’avec Auguste Comte, dans son essai de constitution d’une religion de l’Humanité, Système de politique positiviste (1851-1854) ; elle demeure, après sa mort, l’apanage du groupe réduit de fidèles qui, avec Pierre Lafitte, adoptent le mysticisme humanitaire de Comte ; elle s’élargit avec le groupe des néo-positivistes, et leur chef Durkheim, dans le manifeste religieux de leur doctrine, Année sociologique, 1899, Durkheim, * De la définition des phénomènes religieux ». Elle devient alors l’explication non d’un philosophe, mais de toute une école, l'Ecole sociologique. A la suite de Durkheim, ses disciples Lévy Bruhl, Maus, Fauconnet, etc. adoptent ses vues générales, et les appliquent tour à tour à la sociologie, à la morale, au droit, à l’esthétique, à la psychologie, et à la généralité des sciences sociales. Partout et pour tous les faits sociaux, la même méthode et la même solution. La cohérence de ces solutions et de ces applications est Lien d’oeuvre d’une école, et l’on peut la qualifier justement d’école sociologique ; et l’explication de la religion n’est qu’un aspect et une portion de cette sociologie générale.

Si elle est la plus tardive, la solution sociologique de la religion est peut-être la plus radicale. Elle abandonne l’idée d’une nature religieuse de l’homme, d’un instinct religieux, d’une donnée constitutionnelle. Ce n’est pas en lui, mais hors de lui, qu’il faut chercher l’origine de la religion. Par naissance il est areligieux, aussi bien que amoral et asocial. La société a précisément pour mission, non de développer, mais de créer en lui l’être moral, l’être social, l’être religieux. En sorte que la religion est déposée en lui par l’action sociale. L’individu n’est donc pas par lui-même l’animal religieux, pas plus qu’il n’est l’animal métaphysicien. Il le devient seulement par la grâce et la toute-puissance créatrice de la société. La nature religieuse de l’homme n’est donc qu’un pur résultat, un apport extérieur, une création.

Sms doutai l’Ecole sociologique multiplie les déclarations de respect envers le fait religieux. Elle se défend de faire figure d’iconoclaste ; elle affirme 30n impartialité bienveillante envers la religion et envers toutes les religions : il n’y a pas même de religions qui soient fausses, dit-elle ; car elles expriment toutes, à leur façon, la même réalité sociale, connue tous les vivants participent à la vie. Il n’est donc question, ni de professer « une irréligiosité systématique » ni de « rabaisser les religions inférieures ». Toutes expriment la même nécessité, sont suspendues à la même cause, jouent le même rôle. Bien plus, on entend donner à la religion une valeur définitive et universelle, en lui apportant une interprétation scientifique. Et i’expcrie/ice religieuse reprendra sa valeur, à côté de l’expérience scientifique, une valeur reconnue par tous. On maintiendra la religion — en supprimant Dieu.

Ie Partie. — Exposition

La méthode sociologique. — Pour essurer au fait religieux cette valeur universelle, il importe de l’étudier en se servant de la méthode scientifique, applicable aux faits sociaux. Fait éminemment social, le phénomène religieux sera donc soumis à cette méthode, préalablement définie, aussi bien que les autres faits sociaux, juridiques, économiques ; son étude ne sera qu’une application de cette méthodologie générale.

Or, quelques règles communes s’imposent, dit-on, à qui veut étudier les faits sociaux. Leur ensemble constitue le Discours de la méthode de la nouvelle école, promulgué par Diirkheim, dans son livre-programme : Règles de la méthode sociologique (189^). Voici les principales :

1. Se dégager des prénotions ou notions vulgaires, ou données du sens commun. Sur la famille, la patrie, la société, la morale, etc., nous avons des idées toutes faites, empruntées à l’éducation, ensemble de préjuges. L’attitude scientilique commande impérieusement de les écarter d’abord etsans pitié ; à l’égard des faits sociaux, il convient de se mettre dans la mentalité de l’enfant ou du primitif, se faire une âme nouvelle. C’est, appliquée à la sociologie, le procédé bien connu du doute méthodique et de la table rase.

a. Regarder les faits sociaux du dehors, et les traiter comme des choses : les exigences scientifiques commandent cette impersonnalité et cette objectivité. En sociologie, il faut imiter le physicien, le chimiste ; même indifférence aux hypothèses, même respect du donné, même neutralité sentimentale, même respect absolu du fait. Cette notion de choses, appliquée aux faits sociaux, indique au plus haut point cette pure objectivité de la recherche.

Dès lors, pour se soumettre à cette règle d’impersonnalité, il faut renoncer à toute recherche de psychologie. Une psychologie scientifique n’est pas possible ; Comte l’a dit. A plus forte raison une psychologie sociale n’est pas réalisable. Quelque interprétation qu’elle apporte avec Tarde, avec Sighele, avec Le Bon, etc., elle est toujours soumise à la même fantaisie. C’est en dehors de soi, dans leur réalité vivante, extérieure, objective, mouvante, qu’il convient d’observer les manifestations de la vie sociale.

3. Les définir par leurs caractères extérieurs. Conséquence de cette recherche d’objectivité. Les caractères les plus extérieurs, ceux qui frappent d’abord, expriment le maximum d’objectivité ; parmi eux, on retiendra par la suite ceux qui s’affirment comme permanents et universels dans la même institution. On ira ainrà du dehors au dedans, des caractères communs à ceux qui sont essentiels et spécifiques ; la définition demeurera un extrait de l’expérience.

4. Enfin, l’explication d’un fait social doit toujours être exclusivement sociologique. Si les faits sociaux sont des réalités distinctes, spécifiques, ils