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RELATIVITE

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I.e temps T vécu par l’observateur 13 est compté double. 2 I", par l’observateur A et par tous les habitants du domaine de A ; ce compte étant fait par la lecture des horloges du domaine A.

Il y a réciprocité, car rien ne distingue les deux observateurs. Le temps vécu par l’observateur A sera compté double par l’observateur B, et par tous les habitants du domaine de B.

Il n’y a pas là de contradiction. Il y en aurait si l’observateur Adonnait deux valeurs différentes à la même durée. Il n’en est pas ainsi : c’est le temps vécu par B qui est compté d’une manière difféi ente par lui-même et par l’observateur A.

Il n’y a pas contradiction, mais relativité.

On peut expliquer ce résultat de la manière suivante :

Il n’y a pas de distinction réelle entre un être qui dure et sa durée propre. Les deux observateurs étant distincts, leurs durées propres sont des réalités distinctes ; mais elles ne sont pas réglées par un Temps absolu, existant en dehors d’elles. Donc quand l’observateur A, au moyen de ses horloges et de sa durée propre, mesure la durée propre de l’observateur B, il peut se faire, dans certaines circonstances, que le résultat de cette mesure ne soit pas égal à la durée propre de B. Ces circonstances se trouvent réalisées, quand les deux observateurs sont en mouvement l’un par rapport à l’autre. La raison de ce fait nous est cachée ; mais il n’y a pas là contradiction.

Le voyageur qui vieillit moins vite.

12. — Pour mettre à l’épreuve les résultats précédents, on peut avoir l’idée de ramener les deux observateurs côteà côte et de comparer directement leurs âges. Mais il n’est pas possible d’appliquer à ce cas les formules de la Relativité restreinte sans de grandes précautions. Car nous ne restons plus dans l’hypothèse des mouvements rectilignes uniformes. Pour que les deux observateurs, après s*être quittés, se retrouvent ensemble, il est nécessaire que l’un d’entre eux au moins subisse une accélération : sa vitesse doit changer de sens. Il n’est pas indifférent de dire que c’est l’observateur A ou l’observateur B qui subit l’accélération ; car un changement de vitesse n’est pas un simple phénomène relatif. Le voyageur qui est dans un train express sentira désagréablement son changement de vitesse, si on serre trop brusquement les freins. Donc si nous voulons ramener l’observateur B près de l’observateur A, nous devrons supposer qu’il traverse uu champ de force qui modifie sa vitesse et la fasse changer de sens.

Ceci posé, prenons un exemple numérique.

Deux observateurs A et B ont une vitesse de 260.000 kil. à la seconde l’un par rapport à l’autre. B quitte A, s’écarte de lui de plus en plus, et voyage ainsi pendant un an de sa vie propre. Puis il revient sur ses pas, avec la même vitesse, changée de sens.

On pourrait ici objecter que ce changement brusque d’une vitesse aussi grande e->t impossible, et qu’aucun voyageur ne résisterait à pareil choc. — C’est vrai. Mais nous ne prenons cet exemple que pour simplifier les calculs. On pourrait tout aussi bien supposer que l’observateur B n’a acquis que progressivement sa vitesse de 260.000 km., puis que cette vitesse se ralentit, s’annule, et reprend en sens inverse des valeurs grandissantes ; redevient égale à 260.000 km., diminue de nouveau, et enfin s’annule au moment où B rejoint A. Les formules appliquées à ce cas sont un peu plus compliquées, mais elles donnent des résultats de même nature que ceux que nous allons exposer.

Supposons que les horloges des deux observateurs soient réglées ensemble, de façon qu’elles marquent toutes deux o h. au moment où B quitte A. Supposons encore que la piste rectiligne indéfinie que suit B soit le domaine de A, et soit jalonnée par des horloges installées à demeure dans ce domaine. Ces horloges étant synchronisées marqueront toutes, pour l’observateur A, le temps propre de son domaine, et son temps personnellement vécu.

L’observateur B emporte avec lui son horloge un chronomètre, réglé de façon à marquer son temps propre, son temps vécu. Dans sa course vertigineuse, il rencontre successivement les horloges de A et il peut comparer par deux lectures directes le temps T que marque son chronomètre avec le temps marqué par l’horloge qu’il rencontre : Ce dernier temps est le temps t, valeur que l’observateur A donne au temps vécu par B.

Or nous avons vu précédemment que pour une vitesse de 260.000 km., le temps vécu par B est compté double par A. Donc, si au bout de i heures de son voyage, de sa vie propre, l’observateur B consulte l’horloge qu’il croise, il lira sur cette horloge’|8 heures. Il peut à ce moment en avertir l’observateur A par un signal de T. S. F, et celui-ci, pour qui toutes les horloges de son domaine marquent .’|8 heures en même temps, lui qui par conséquent a vieilli de 4^ heures, se dira que la vie du voyageur est ralentie de moitié sur la sienne.

Mais B n’a pas le droit de conclure que A a vieilli de 48 heures. Car si les horloges de A sont synchrones pour A, elles ne le sont pas pour B : la simultanéité des indications des horloges de A existe pour A et n’existe pas pour B.

En réalité, puisqu’il y a réciprocité entre les deux observateurs, B devra se dire que la vie de A est ralentie de moitié sur la bienne. Donc, ayant vécu 24 heures, il se dira que la vie de A n’a augmenté que de 12 heures.

Si donc le voyage de B dure un an de sa vie propre, pour l’observateur A ce temps aura duré a ans. Inversement, si A vieillit de G mois, pour B ce temps aura duré 1 an.

Au bout d’un an, le voyageur B fait demi-tour. Pour faciliter les calculs, nous supposons que ce demi-tour s’accomplit en très peu de temps, de façon. que le chronomètre de B, et l’horloge du domaine de A qui se trouve à cet endroit de la piste, n’aient avancé que d’une quantité négligeable.

Dans son voyage de retour, B rencontre de nouveau successivement les horloges de A, et il constate qu’elles avancent régulièrement du double sur son chronomètre, comme pendant le voyage d’aller. Car la formule dont nous sommes partis (u° 1 1)

t’1 — -|

donne le même résultat, si la vitesse v ne fait que changer de signe.

Donc 24 heures après sa volte-face, c’est-à-dire après un an et a4 heures de voyage, B lira « deux ans plus 48 heures » sur l’horloge qu’il croise. Au bout de un an et six mois, il lira trois ans ; au bout de deux ans, il lira quatre ans. Et alors il sera revenu aux côtés de A.

On pourra donc faire la constatation suivante : Pendant son voyage, B n’a vieilli que de deux ans ; et cependant A en a vécu quutre, puisque son horloge, qui marque son temps vécu, indique quatre ans.

Le voyageur B a donc vieilli deux fois moins vile que l’observateur A.