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RELATIVITÉ

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des conditions particulières des différents observateurs.

Rien de paradoxal dans ce principe. Il est conforme au véritable concept de la Science. Le Créateur amis de l’ordre dans son ouvrage ; c’est le reflet de ses perfections inlinies. Le réel existe en dehors de nous, et est réglé par des lois constantes. Ces lois existent, indépendamment de notre connaissance. La Science travaille à les connaître et à les traduire en langage humain ; sa tâche est d’atteindre le réel, sans pouvoir cependant en épuiser la totalité.

Considérons par exemple la loi de Gravitation, formulée par Newton :

a Deux corps s’attirent en raison directe du produit de leurs masses et en raison inverse du carré de leur dislance. »

' D*

La loi ne dit pas ce qu’est cette attraction ; sa nature reste inexpliquée. On supposait du moins que, dans cette formule, les masses, M, iii, et la distance D avaient des valeurs absolues, les mêmes pour tous les astronomes. A cette condition, la formule avait un sens précis, et pouvait exprimer une loi de la nature.

Mais si des expériences inattendues viennent à prouver que les mesures des masses et des distances ont des valeurs variables selon les différents mouvements que prennent les observateurs, on ne sait plus quelles valeurs choisir pour M, iii, et D. La formule devient essentiellement ambiguë ; elle ne remplit plus la condition qu’elle doit remplir pour traduire une loi de la nature : sa signification n’est plus indépendante des conditions particulières des observateurs. Dans ce cas, il faudra trouver une autre expression de la loi de la Gravitation.

Voyons donc quelles sont ces expériences nouvelles, d’où a surgi la Théorie delà Relativité.

L’Ether et la vitesse de la lumière. — 2. — La lumière ne se propage pas instantanément. D’après la théorie de Fresnel, elle était constituée par des ondes successives, analogues aux vagues de la mer, mais extrêmement rapprochées les unes des autres. Il fallait un « substratum » à ces ondulations : on imagina l’Ether.

Les travaux de Maxwell et de Lorentz modifièrent cette conception. L’onde lumineuse est assimilée à une suite de courants électriques alternatifs, changeant de sens un nombre immense de fois par seconde. Entre les ondes lumineuses et les ondes de T. S. F., la seule différence réside dans la durée de la période ; elle est beaucoup plus courte pour les premières que pour les secondes. De même, un corps sonore peut émettre des sons aigus ou des sons graves, selon que la période de ses vibrations est brève ou longue.

Mais, dans cette théorie de l’Electromagnétisme, l’Ether est considéré comme immobile ; seuls lts électrons se déplacent. Aussi, quand on parle d’ondes lumineuses, ou plus généralement d’ondes électromagnétiques, on ne veut pas dire qu’il y a des vibrations de l’Ether. L’onde est une modification périodique, de nature inconnue, se propageant dans un milieu, qu’on appelle encore Ether.

L’Electromagnétisme s’appuie sur une loi physique, à laquelle lca Physiciens ne prêtèrent pas tout d’abord l’attention qu’elle méritait : c'était t’Isotropie de la vitesse de la lumière. Voici le fait expérimental :

Si un observateur en mouvement mesure la vitesse de la lumière par rapport à lui, il la trouve

égale dans toutes les directions. Ainsi une onde émise par un foyer lumineux, ou un poste de T. S. F., s'éloigne de ce centre dans tous les sens, et forme une surface sphérique dont le rayon croit indéfiniment. Dans le vide, ce rayon s’augmente de 300.ooo kil. par seconde. C’est la vitesse de toutes les ondes électromagnétiques, et en particulier de la lumière. Répétons, en insistant, que cette vitesse est comptée par rapport à l’observateur qui la mesure. Elle n’est aucunement modiûée parle mouvement de l’observateur dans l’espace. Ainsi le poste de la Tour Eiffel est entraîné par le mouvement de la Terre ; il reste cependant le centre de toutes les ondes sphériques qu’il émet, celles-ci se propagent dans l’espace, absolument comme si le poste était immobile dans l’Ether. Cette loi de l’isotropie est indispensable à la théorie actuelle de l’Electromagnétisme ; elle a été du reste vérifiée par des expériences précises.

En conséquence, on peut faire cette supposition :

Deux observateurs, mobiles l’un par rapport à l’autre, se croisent en un certain point de l’espace ; de ce point, à ce moment, part uneonde lumineuse ; chaque observateur verra cette onde se propager autour de lui comme une sphère de rayon croissant, dont lui-même reste le centre.

Une même sphère ayant deux centres distincts I C’est étrange. Comment expliquer cette anomalie ? C’est inexplicable, à moins de supposer que les deux observateurs n’ont pas compté de la même façon la distance et le temps. De là va naître la Théorie de la Relativité.

Avant d’en commencer l’exposé, faisons trois remarques.

i re Remarque. — 3. — Nous ne parlerons pas de la célèbre expérience de Michblson et de Morlry ; on en trouvera la description, aisée à comprendre, dans les ouvrages relativistes. C’est elle qui a attiré l’attention sur les propriétés étranges de la lumière, dont nous venons de parler ; et elle a provoqué la Théorie d’Einstein. Mais ce serait une erreur de croire qu’elle en est la véritable base ; ce n’est qu’une vérification, venue avant l’heure. La base solide de la théorie de la Relativité, c’est le désaccord entre les notions d’espace et de temps qu’admettent, d’une part la mécanique classique, d’autre part les lois de l’Electromagnétisme. L’expérience condamne la première, en faveur des secondes.

Les lois de la mécanique classique ne sont plus que des approximations, d’ailleurs excellentes dans la plupart des cas. Du reste, si la vitesse de la lumière était infinie, ces lois coïncideraient exactement avec celles de l’Electromagnétisme.

Deuxième Remarque

4 — Le point de départ de la Théorie de la Relativité, c’est 1' « Isolropie » de la vitesse de la lumière, c’est-à-dire l'égalité de sa valeur dans toutes les directions, quel que soit le mouvement de l’observateur qui la mesure.

Devons-nous considérer cette propriété de la lumière comme une réalité, existant en dehors de nous, et indépendante de notre esprit ?

Pour beaucoup de Physiciens, « une théorie physique ne doit pas avoir la prétention de donner des apparences une explication conforme à la réalité ; sa partie essentielle, c’est le moule analytique dans lequel elle cherche à enfermer les choses ». Dans ce cas, la Théorie de la Relativité n’est qu’une construction mathématique, n’ayant qu’un lien mystérieux, caché pour nous, avec la nature qui existe hors de nous. Alors elle n’offre plus de dillicultc au philosophe, ni au bon sens.