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RÉFORME

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litige, nous ferions tomber des préventions, des méfiances, dissiperions des équivoques, aplanirions les voies au bout desquelles une àme loyale, aidée do la grâce, découvrirait, s’il pouvait plaire à Dieu, ou retrouverait la vérité.

Le fait est que, a l’heure de clôtura de chacune de nos trois réunions, les membres se sentaient plus étroitement liés, plus confiants les uns dans les autres, qu’a leur prise de contact. Nos hôtes nous l’ont dit, nous l’ont écrit : nous leur avons tenu le même langage : je suis heureux de le répéter ici.

Cependant l’on pense bien que, lorsque surgirent des questions essentielles — la primauté du lape définie par le Concile du Vatican, et qui fut la première à l’ordre du jour,

— ni mes amis ni moi n’eûmes, un instant, la pensée de sacrifier à un désir insensé d’union a tout prix un seul article du credo catholique, apostolique et romain.

Nos rencontres furent donc des conversations privées ; elles n’engageaient que notro responsabilité personnelle ; elles eurent un caractère amical ; j’ajoute qu’elles furent édifiantes.

… Nos compas x ns, à leur départ, avaient l’âme dilatée.

C’est peut être 1-. lemière fois, depuis quatre cents an », disait l’un d’eux, que es hommes d’études, protestants et catholiques, aient pu s’entretenir, avec une franchise entière, pendant des heures et dos heures, sur les sujets les plus graves qui, intellectuellement, les divisent, sans qu’un instant la cordialité de leurs nippons en ait été troublée, ni leur confiance dans 1 avenir déconcertée…

La corporale réunion n’est pas entrée dans la voie des réalisations pratiques. Mais la division n’est plus un obstacle à la charité chrétienne ni à la courtoisie. Et de cela il faut bénir Dieu.

Au moment où s’impriment ces pages, a commencé de paraître, dans la Documentation Catholique, une étude très fouillée sur l’Eglise anglicane et sa crise actuelle, par l’abbé J. Wadoux. (t. XII, col. 6~’i sqq., 19 oct. i(j ?4). Nous sommes heureux d’y renvoyer pour une foule de données bibliographiques et autres, qui ne sauraient trouver place ici.

A. d’Alès.

X. — LA RÉFORME EN SUISSE

La Suisse qui, depuis plus de deux siècles, travaillait à s’émanciper de l’empire d’Allemagne, avait réussi, au début du xvi* siècle, à s’organiser en une Confédération de treize cantons libres avec pays alliés et pays sujets, et à grouper politiquement la plupart des petits peuples qui composent aujourd’hui la Confédération des vingt-deux cantons. On comprend ainsi que, tout encouragée qu’elle ait été par la Réforme allemande, la Réforme suisse se soit développée d’un mouvement propre, autonome, quasispontané. Et si, de nos jours, le protestantisme suisse est profondément imprégné des influences venues d’Allemagne soit immédiatement, soit parla France, il porte néanmoins, dans son ensemble, des inarques qui le distinguent du luthéranisme allemand ou Scandinave, par exemple, et qui le conforment au génie de Zwingli.

I. Zwingli et les origines du protestantisme Suisse. — Le grand Suisse, en effet, fut Zwingli qui. grâce à son énergie, à sa décision, à ses initiatives à la fois prudentes et hardies, grâce aussi aux avantages que lui offrit sa situation de curé de Zurich, la première et la plus impérieuse des villes confédérées, réussit à séduire une grande portion de la Suisse et à lui imposer son protestantisme.

Zwingli naquit le i’r janvier 1 484 à YVildliaus, village montagnard du Toggen bourg Ses parente étaient des paysans aisés. Il avait un oncle paterne ! et on oncle maternel dans les ordres On pensa le préparer à un avenir ecclésiastique. Son oncle paternel Barthélémy, doyen deWesen.lui expliqua les rudiments, puis l’envoya à Bàle. Zwingli s’en fut ensuite à

Berne, puis jusqu’en iSoa à Vienne (Autriche) où il étudia la philosophie. On a retrouvé la mention exclusus apposée à son nom dans les registres du semestre d’hiver 14y8-14g<j. U esta Bàle entre ilioæt [506| occupé à lire les écrits de Pic de la Mirandole qui s’éditaient à Strasbourg. En 1506 il est ordonné prêtre et nommé curé de Glaris par l’évoque de Constance. Sa paroisse couvrait le tiers du carton actuel deGlaris. Cependant il trouve le temps d’apprendre par cœur les Histoires de Valère Maxime, de ne pas négliger la lecture de la Bible, de se faire des disciples. Il vit si non caste, sultan caute, expliquera son ami Myconius. Déjà il est mêlé à la politique. Il identifie la cause de Jules II et celle de Dieu, il se déclare ardent ennemi des Français. Il paraît à Marignan comme aumônier des Glaronnais et reçoit, grâce au cardinal Schinner sans doute, une pension papale de cinquante guinées « pour ses livres ». Le 1 4 avril 1516, Zwingli est curé d’Einsiedeln. II correspond avec Erasme lixé à Bàle, et avec les principaux humanistes du temps, continue ses études bibliques et sa vie, sinon plus « chaste », pourtant moins « prudente ». Néanmoins il réussit le I er janvier iokj à entrer en charge, comme curéduGrossmiinsler, à Zurich. C’est de là qu’il va entreprendre de dominer la Suisse.

Vers cette époque, se place un événement dont la signification a été beaucoup exagérée. Il s’agit d’une intervention de Zwingli contre la prédication des indulgences. On a fortement réduit, aujourd’hui, l’importance de la dispute des indulgences dans la révolte de Luther. Son importance est moindre encore dans la révolte de Zwingli. Voici les faits. Pendant l’été de 1Ô18, le Franciscain Bernardin Sanson, gardien du couvent de l’Observance à Milan, passa le Gotliard pour prêcher en Suisse l’indulgence papale accordée par Léon X. L’évêque de Constance, Hugues de Landenberg, se déclara hostile à Sanson, qui n’avait pas pris la peine de lui produire ses titres, et qui était l’objet de plaintes multiples. Il commanda à son clergé de le tenir en échec. A Bremgarten, le doyen Henri Bullinger interdit à Sanson l’entrée de l’église ; à Zurich, Zwingli prévint les esprits contre lui, et le Conseil résolut de lui fermer les portes delà ville. Sanson, qui en appela à Rome, reçut de Jules II la confirmation de ses pleins pouvoirs. Mais l’évêque de Constance obtint son rappel. Il repassa les Alpes avec plus de 120.000 écus, et Zwingli fut félicité de son attitude.

Quel fut Sanson ? On trouve dans les archives plusieurs lettres d’indulgence marquées de son sceau et de sa signature. Elles ne contiennent rien qu’ait à désavouer une exacte théologie. Elles précisent quatre conditions de l’indulgence : confession et communion, prières déterminées et visites d’églises, les péchés ne doivent pas avoir été commis ou décrétés dans l’espoir et sous couverture de la présente indulgence, la satisfaction revient à qui de droit. Sans doute Sanson, qui était un prédicateur populaire, a-t-il donné dans ces procédés de théâtre et dans ces fautes de goût auxquels n’échappent pas ceux qui savent galvaniser les masses. Mais il est difficile de préciser beaucoup sur ce point, et il reste souverainement injuste déjuger Sanson, comme Telzel, sur les contes et les satires qu’on fit à leur propos.

On voit que Zwingli n’avait point encore rompu avec l’Eglise. En septembre i">i<j, lorsqu’il faillit mourir de la peste, le légat lui manda son propre médecin. Il recevait toujours la pension que lui servait le pape ; il ne la refusa que le 29 avril 15ai, jour où il vit s’accroître ses bénéfices. Dès lors il alla ; t être à l’aise pour s’élever contre le service mercenaire, fût-ce sous les drapeaux du pape, cl pour protester contre les pensions de Rome. Les cardinaux ont