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PROVIDENCE

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bien. L : i Toute-puissance bienfaisante, qui verse l'être et la vie, n’est limitée que par les résistances coupables du libre arbitre créé. Sans nous attarder davantage à l’aspect métaphysique de la question, nous rappellerons les enseignements incontestés de l’Ecriture et de la Tradition catholique.

Tout d’abord ces pécheurs, dont Dieu tolère les excès, se répartissent en deux catégories : ceux qui persévèrent dans le péché et sedamneront ; ceux qui se convertiront et parviendront au salut éternel. Nous sommes ramenés au mystère de la Prédhstination, trop longuement étudié ci-dessus.

Les pécheurs qui se convertiront et parviendront au salut éternel procurent une gloire très pure à Dieu, auteur de leur conversion et de leur salut.

Les pécheurs qui sedamneront, se damneront par leur faute, et ne sont point fondés à incriminer la Providence pour l’abusqu’ils auront faitde sesdons. Si Dieu les tolère en ce monde, c’est d’une partpour justifier sa bonté qui les appelle à pénitence (lîom., 11, /|), d’autre part pour réaliser le dessein de miséricorde qui, à travers tout, fait des élus. Propter electos.

La parabole évangélique de l’ivraie, interprétée par le Seigneur lui-même (Mat., xni, 2'|-30 ; 36-43), marque bien ce dessein providentiel. Le maitre dit aux serviteurs, 2cj-30 : j. Gardez-vous de cueillir l’ivraie, de peur d’arracher avec elle le froment même. Laissez l’une et l’autre croître jusqu'à la moisson ; et au temps de la moisson je dirai aux moissonneurs : Cueillez d’abord l’ivraie et liez-la en gerbes pour la brûler ; puis amassez le froment dans mon grenier. »

Il appartient à Dieu de faire concourir au bien le mal même. S. lint Augustin, Enehir, , xi, P. /.., XL, a36. La conduite miséricordieuse quiprésidaau dessein de la Rédemption et, à l’occasion du péché, fit surabonder la grâce (Rom., v, 15. ao) — O felix culpa ! — n’est pas un moment isolé dans l'œuvre divine, mais une voie normale de Providence. Ainsi Dieu fait-il concourir les persécutions à l’héroïsme des martyrs ; il instruit les élus par les fautes d’aveugles tyrans. Saint Augustin, In Ps. lxxiii, Enarr., 8, P. t., XXVI, 935 '.Wacit enimhoc Deus quod plerumque facit et Itomo. Aliquando iratus liomo apprehendit virgam iacentem in medio, fartasse qualecumque sarmentum, cædit inde filium suum ; ne deinde proicit sarmenlum in ignem et filio seront hereditatem : sic aliquando Drus per mnlos erudit bonos, et per tempovalem putentiam damnandorum exercet disciplinant liberandoriim. Et encore, iSe/-m., ccxiv, S, P. /-., XXXVIII, lulj ;  : Quod non vult Omnipolens, hoc solum non pvtcst. Utitur ergo malis, non secundum eorum pravam, sed secundum suam rectam voluntntem. mtmsicut mali natura sua, h.e. bono eius opère, maie utunlur. sic ipse bonus etiam eorum malis operibus bene utitur, ne Omnipotenlis voluntas aliqua ex parte vincatur. Si enim non haberet quod bonus de malis iuste ac bene faceret, nullo modo eos vel nasci vel vivere sinerel ; quos malos ipse non fecit, quia homine.s fecit : quia non peccata quæ sunt contra naturani, sed naturas ipsas creavit. Malus tamen eos futuros præscius ignorare non potuii ; sed sicut noverat quæ ipsi essenl malu facturi, sic etiam noverat quæ bonade illis esset ipse faclurus. L’homme qui suit sa passion ne soupçonne pas qu’il sert le dessein de Dieu. Le persécuteur opprime l’innocent et ne voit pas plus loin. Mais, au dernier jour, les rôles seront renversé* : la persécuté triomphera, le persécuteur découvrira avec stupeur son aveuglement coupable et le triomphe de l’innocence, dont luimême, fut l’artisan inconscient Telle est la leçon de la S-.igesse, Sap., v, 1 sqq ; vi, > sqq.

Alors le juste se tiendra en grande aasurance

devant la face de ceux qui l’auront opprimé

et qui auront frustré ses ell’orts.

A cette vuo, ils seront agités d’une crainte terrible

et déconcertés par la révélation soudaine de son salut.

Ils diront entre eux, pleins de regret

et gémissant dans l’angoisse de leur âme :

Voilà donc cet homme qui fut pour nous objet de risée

et en butte à nos outrages.

Insensés, nous tenions sa vie pour folie

et sa lin pour déshonneur.

Comment a-t-il été compté au nombre des fils de Dieu

et associé aux saints !

Donc nous avons erré hors de la voie de la vérité,

la lumière de la justice n’a point brillé pour nous, '

le soleil ne s’est point levé sur nous, [et de perdition,

Nous nous sommes rassasiés dans lessentiers d’iniquité

nous avons cheminé en dos lieux non frayés

nous avons méconnu la voix du Seigneur.

Que nous a servi 1 orgueil

et que nous a procuré la richesse avec le faste ?

Tout cela a passé comme une ombre,

comme une rumeur qui s’enfuit ;

comme un vaisseau qui fend l’onde agitée,

après qu’il a passé on n’en retrouve plus la trace

ni le sillage de sa quille à travers les flots ;

ou comme l’oiseau qui vole dans l’air,

on ne retrouve pas la marque de son passage :

à coups d’aile il frappe l’air léger,

il le fend d un élan sonore.

battant des ailes il a passé,

après cela on n y relève pas trace de sa venuo ;

ou comme la lleche lancée au but :

l’air fendu se referme aussitôt sur lui-même,

impossible do reconnaître son passage.

Ainsi nous mêmes, après être nés, avons disparu

sans avoir pu montrer aucune trace de vertu,

nous nous sommes consumés dans notre malice, [vent,

Car l’espoir de limpie, comme la laine qu’emporte le

comme l'écume légère chassée par la tempête,

comme la fumée dissipée par le vent,

comme la mémoire de 1 hôte d’un jour, a passé.

Mais les justes vivent éternellement

leur récompense est dans le Seigneur,

leur sort occupe le Très Haut.

Aussi recevront-ils le royaume d’honneur

et le diadème de beauté, de la main du Seigneur ;

car de sa droite il les protégera

et de son bras il les cachera sous un bouclier.

Ecoutez donc, rois, et comprenez… Instruisez-vous, juges des extrémités de la terre.

Rappellerons-nousencorelesallusions perpétuelles des Psaumes aux interventions souveraines de Dieu, à ses jugements équitables ? Par exemple, ces mots de Ps., lxxv, 5-9 :

Je dis aux orgueilleux : « Mettez fin à votre orgueil.' »

Et aux impies : « N’exaltez point votre corne ;

N’exaltez point votre corne vers le ciel,

Ne parlez pas en raidissant le cou ! »

Non, ce n’est ni du levant ni du couchant

Ni du désert ni des montagnes, …

M ; ii* c’est Dieu qui gouverne :

Il abaisse l’un et exalte 1 autre.

Car une coupe est dans la main de labvé,

Avec du vin fumeux mêlé d’aromates ;

Il en verse à l’un comme à l’autre ;

On l'épuisora jusqu'à la lie ;

Tous les impies de la terre en boiront.

C’est dans la perspective du dernier jugement qu’il faut apprécier l'œuvre totale de la Providence. Et qu’importent les passe-droits d’un jour, si en fin de compte les usurpateurs devront rendre gorge, si les déshérités de ce monde recevront avec usure tous les biens dont ils auront été injustement frustrés ? Dieu,

« patient parce que éternel », in vile ceux qui le servent

à patienter comme lui, a ne pas désespérer de leur récompense ;  : > s’acquérir dans le ciel des trésors que ne ronge ni la teigne ni la rouille, que n’emportent ni les