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PIERRE (SAINT) A ROME

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Cet empereur, désigné le premier pnr la tradition comme insigne ennemi de Dieu, mil à mort les apôtres, ti’est durant son règne que, à Rome même. Paul fut décapité ot l’ierre mis eu croix, selon le témoignage de l’histoire, garanti par la tradition des cimetières locaux touchant l’ierre et i aul. En outre, un homme d Eglise nommé Ca us. contemporain de Zépliyrin évoque de Rome, dans un écrit où il discute avec Proclus chef de la secte phrygienne, s’exprime ainsi touchant les tombeaux des deux apôtres : Je puis montrer les trophées dei Apôtres. Si vous voulez aller au Vatican ou sur la voie d’Ostie, vous trouverez les trophées de ceux qui fonderait cette Eglise. Quant au fait qu’ils subirent le martyre en même temps, Denys évéque de Corinthe, dans un écrit adressé aux Romains, l'établit en ces termes : Vous-mêmes ave : associé dans cet avis la plantation faite par Pierre et Paul des Eglises de Rome et de Corinthe. Car tous deux, venus dans notre Corinthe, prirent part à notre plantation ; tous deux, partis pour l’Italie, y enseignèrent ensemble et subirent le martyre en même temps.

La tradition relative à l’apostolat romain de Pierre et de Paul se réclame aussi de saint Ikbnbr, qui l’avait recueillie à Rome avant la lin du n' siècle, et l’a consignée dans une page célèbre de ses livres contre les Hérésies. Il montre d’abord l'évangéliste saint Mathieu rédigeant son évangile à l’usage des Hébreux, dans le temps même où Pierre et Paul évangélisaient Rome et y fondaient l’Eglise, Hær., 111, 1, 1, P. G., VII, 8^5 A : wù i-poi> xai toj Txû)o>j h Peux/ ; sùay/eliÇo/Kivwv xai Ss/uvioûvrav « ri » "Exx>ï ; T<a7 ; puis, après le départ de ces apôtres (/ « rà xh » toi/twv "i^cSov), saint Marc écrivant à son tour un évangile. La même donnée reparaît un peu plus bas, avec allusion à l’autorité éminente de l’Eglise de Rome, III, m, a. 3, P. G., VII, 848. 84g. Voir ci-dessus, t. I, col. 1263 et t. III, iZ-j%. Eusèbb a reproduit ce témoignage, H. E., V, vi, P. G., XX, 845 A. Notons en passant que, d’après le même saint Irénée, H., I, xxviii, i, P. G., VII, 687 R, Hygin est le neuvième évéque de Rome, 'tyïvou "weerov xïf.poj rf, i 'tr. monts âiyooyfiS ô.Ttb tûv 'A7rs7Tovwv "-.yvjzo ;. C’est bien le rang qu’il occupe ibid., III, ni, 3, à condition que le premier rang appartienne à saint Pierre.

La prédication de saint Pierre à Rome est encore attestée, au n* siècle, par l’apocryphe Pauli prædicatto (Voir Psbudo-Cypribn, De Rebaptismate, xva, ed.Hartel.p. 90, 1. 37>et par PAPiAS, ap. Eusèbb, H.E., II, xv, coll. III, xxxix.

Au témoignage de saint Irénée, qui avait recueilli la tradition romaine à Rome, on a opposé quelquefois le silence de saint Justin et celui d’HnuMAS. Nous emprunterons la réponse à un judicieux article de M. Paul Monceaux, sur L' Apostolat de saint Pierre à Home. Revue d’Histoire et de Littérature religieuses, 1910, p. 220.

L’argument n’est pas sérieux. En tout temps, les choses dont on parle le moins dans les livres sont celles que tout le inonde sait ; et c’est pour cela qu’il est si difficile de restituer la physionomie vraiodes sociétés disparues. D’ailleurs, on oublie que 1 ouvrage de Justin est une Apologie, adressée aux empereurs. Pourquoi 1 apologiste aurait-il parlé des deux apôtres ? Eut-il même été habile de rappeler aux empereurs que les fondateurs de l’Egliso locale étaient des condamnes, des ^ens mis à mort par un de leurs prédécesseurs ? Notons en outre que, si Justin ne pari » pas de Pierre, il ne parle pas non plus de Paul. On ne nie pas pour cela que ce dernier soit venu à Rome. Donc le silence de Justin sur l’ierre ne prouve rien.

La réponse vaut également pour Hermas. Hermas, qui ne nomme ni saint Pierre ni saint Paul ni saint Jean ni aucun apôlre, nomme une seule fois Rome, à la première ligne de son livre, dans son autobiographie. Les origines de l’Eglise romaine sont complètement en dehors de son horizon, encore qu’il ail écrit à Rome, qu’il paraisse avoir connu

le pape Clément (88-97?) et, d’après une autre tradition, soit le propre frère du pape Pie (1 40-155).

Mai » voici un document romain du 11e siècle, le fragment de Muratori. A propos des Actes des Apôtres, il mentionne la passion de Pierre et le départ de Pierre pour l’Espagne, en notant le silence de Luc sur ces deux faits dont il n’est pas témoin oculaire :

Acta aulem omnium apostolorum | sub uno libro scripta surit, Lucas optimo Theophi lo compreheudit, quæ sub præsentia eius singula | gerebantur sicuti et semota passione Pétri | evidenter déclarât, et profectione Pauli ab ur | be ad Spaniam proficiscentis.

On notera ici la trace du dessein que saint Paul avait formé de se rendre en Espagne et qu’il énonce à deux reprises, Rom., xv, 24-28. Nous la retrouverons, semble-t-il, chez Clément de Rome, séparé de saint Paul par une seule génération.

Vers 110, saint Ionaciî d’Antiochb s’adresse aux fidèles de Rome, Rom., iv :

J'écris à toutes les Eglises ; à tous je mande que je meurs volontiers pour Dieu, si vous ne m’en empêchez. Je vous en conjure, n’usez pas envers moi d’une bienveillance intempestive. Laissez-moi être la proie des betes, par lesquelles je puis parvenir à Dieu. Je suis le froment do Dieu, je suis moulu par la dent des bêtes, pour devenir le pur pain du Christ. Caressez plutôt les bêtes, afin quelles me soient un tombeau et ne laissent rien de mon corps, en sorte qu’après ma mort je ne sois à charge a personne. Alors je serai vraiment disciple de Jésus-Christ, quand mon corps même sera invisible au monde. Priez le Christ pour moi, afin que par ces instruments je devienne un sacrifice a Dieu. Je ne vous donne point d’ordres, comme l’ierre et Paul : ils étaient apôtres, je suis un condamné ; ils étaient libres, je suis encore esclave. Mais si je souffre, je deviendrai affranchi de Jésus Christ et ressusciterai en lui, libre. Présentement, j’apprends dans les fers à ne rien désirer. Depuis la Syrie jusqu'à Rome, je lutte contre les betes, sur terre et sur mer, nuit et jour lié à dix léopardsje veux dire à ce groupe de soldats, qui répondent au bien par un redoublement de cruauté.

Les paroles du martyr syrien témoignent qu’il reconnaît Pierre et Paul pour les propres apôtres de l’Eglise romaine : aussi se défend-il de commandera leur place : Oùy eu ; ïlérpOi xv.i notCO.o ; SiKTàuno/xci i/Mv. Réserve d’autant plus significative qu’elle est le fait du patriarche de cette Eglise d’Antioche, que la tradition mettait en relations particulières avec les deux apôtres et désignait comme le premier siège de Pierre en personne. Ignace tient à s’effacer expressément devant le souvenir romain des princes des apôtres.

Dans la personne de saint Irénée, disciple de saint Polycarpe, lui-même disciple de l’apôtre saint Jean, nous en tendions, avec la traditiondeï'Eglise romaine, la tradition d’une Eglise apostolique d’Asie, celle de Smyrne. Dans la personne de saint Ignace, nous entendons une autre grande Eglise apostolique, Antioche, la métropole de Syrie, unie par un lien très spécial au souvenir de Pierre.

Vers 96, saint Clkmbnt db Romb écrit à l’Eglisede Corinthe, I Cor. t v-vi :

Laissons les exemples anciens, pour venir aux athlètes proches de nous ; prenons les généreux exemples de notre génération Par i’effet de la jalousie et de l’envie, ceux qui furent les plus grandes et les plus justes colonnes se virent persécutés et combattirent jusqu'à la mort. Considérons nos vaillants apôtres : Pierre, qui, victime d’une jalousie criminelle, souffrit non pas une ou deux épreuves, mais un grand nombre, et ainsi martyr s’en alla au séjour de gloire qui lui était du Victime de la jalousie et de la discorde, Paul montra [comment on remporte] le prix de la patience, sept fois charge de chaines. fugitil, lapide, héraut [du Christ] en Orient et en Occident, après avoir conquis par sa foi une