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PROPAGATION DE L’EVANGILE

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dirait-on, que de conversions, vont droit aux musulmans les plus voisins. François en personne prêche devant le sultan d’Egypte. En 1220, l’ordre nouveau ouvre au Maroc la longue liste de ses martyrs par la mort de cinq frères Mineurs. Il fonde une mission en Palestine, où les Frères Prêcheurs ne tardent pas à arriver. Missions encore chez les musulmans d’Espagne, et c’est en vue de controverses avec les docteurs de l’Islam que saint Thomas écrit la Siimma contra Gentes. Car les missions en ce pays ne vont pas sans polémique. Aussi, saint Raymond dr Phnnafoht O. P. et Raymond Lull, tertiaire franciscain, projettent de fonder dans les universités quelque chose comme des « instituts orientaux » en vue de l’apostolat chez les sectateurs du Coran. Lull sera de plus un grand missionnaire itinérant chez les Tartares, en Arménie, en Egypte, en Ethiopie. Il mourra martyr à Bougie en 1315.

Franciscains et Dominicains, au xin’siècle, vont partout où il y a des infidèles à convertir, enCilicie, en Arménie, sur tout le littoral de la mer Noire, à Tauris, en Serbie. Il y avait longtemps qu’une telle activité apostolique n’avait remué les âmes en Occident. Mais cela n’était rien au prix du champ d’apostolat qui s’ouvrit tout à coup. — Voir J. Thaddée Fbrrb, Hist. de l’ordre de S. François, 1920 ; — M. André, Le B. H. Lulle{Les Saints), 1900 ; — Flavigny, Saint Hyacinthe et ses compagnons, 1899 ; — Mortier, Hist. des maîtres généraux de l’ordre de S. Dominique.

2. — Au delà des Slaves désormais chrétiens, au delà même des Turcs, il y avait, débordant à l’est, à l’ouest et au sud de la mystérieuse Asie, les Tarlares ou Mongols, ceux-là qui déjà s’étaient montrés à l’Europe sous le nom de Huns, d’Avares, de Hongrois. Les Huns avaientdisparu, les Avares s’étaient fondus dans les peuples voisins, les Hongrois, devenus Européens, étaient chrétiens. Mais, au début du xm « siècle, les Tartares fondaient, entre la mer Noire et les mers de Chine, un formidable empire. Ils conquéraient la Russie, envahissaient la Pologne et la Hongrie, paraissaient devant Vienne, poussaient leurs raids jusqu’à l’Adriatique. Puis la menace s’évanouit comme par enchantement. Les généraux envahisseurs avaient été ramenés en arrière par la mort du grand Khan. Il importait de prévenir leur retour. Ne pourrait-on même les utiliser contre l’ennemi commun, les Turcs, et les forcer pour ainsi dire à collaborer à la croisade ? Ils n’étaient pas musulmans : assez peu religieux, leurs princes favorisaient également les musulmans, les bouddhistes et les nestoriens. Pourquoi ne pas essayer de les convertir ? L’idée était d’autant plus naturelle qu’on avait, de l’Asie centrale, des notions fantastiques. On savait qu’il y avait là d’importantes chrétientés nestoriennes, mais on les imaginait groupées autour d’un roi mystérieux, sorte de Melchisédec, le Prêtre Jean.

C’est donc vers les héritiers du terrible Gengis-Khan et d’Ogodaï que les papes et Louis IX dépêchaient en ambassadeurs des Franciscains et des Frères Prêcheurs : Jban db Plan-Carpin, O. S. F. (iq/|5-47), Nicolas Ascbmn, O. P. (1247). André db

LoNOJUMEAU, O. P. (l248), GciLLAUMB ^>E RUBIIUQUIS,

O. S. F. (1253). Les résultats politiques furent assez décevants. Mais, pendant un bon demi siècle, on put espérer quelque chose pour les progrès de la foi.

3. — Ces apôtres allèrent jusqu’en Chine. Les Tartares, qui régnaient à Pékin, officiellement bouddhistes, toléraient, protégeaientmême les Nestoriens du pnys. Ils protégèrent de même les catholiques, quand ils se présentèrent. En I2g3, le Franciscain Jban db Montf.corvino était à Pékin et Timour Khan lui accordait pleine liberté. Si des obstacles surgirent, ils venaientdes Nestoriens. En 130^, Clément V le nomma archevêque de tout l’Extrême-Orient, avec pouvoir d’organiser sa province au mieux des intérêts de la foi. Pour le consacrer, il lui envoyait sept Frères mineurs, tous évoques. En 13 1 a, l’Eglise de Chine avait ses cadres prêts : onze évêques et d’assez nombreuses chrétientés, groupées autour des couvents de Franciscains. Jean XXII fit tout ce qu’il put pour organiser solidement l’Eglise nouvelle. On lui assurait une base d’opérations à moitié chemin, en Per6e et en Arménie. Si les Franciscains avaient la Chine, les frères Prêcheurs gouvernaient les Eglises de Perse et de l’Inde. L’Inde chrétienne était fort peu de chose. Mais en Perse, la métropole de Sultanyeh groupait six diocèses. De là, les missionnaires se répandaient jusqu’en Dzoungarie, en Géorgie et dans le Dekkan.

Malheureusement cette prospérité ne dura pas. En 1368, la dynastie mongole fut renversée par la dynastie purement chinoise des Ming, et, avec ses protecteurs, l’Eglise franciscaine disparut. Puis les Tartares de Perse et pays voisins passaient à l’Islam. C’est l’Islam qui triomphait avec Tamerlan. (1365-1404). La guerre sainte menée par lui causa la ruine à peu près complète des missions d’Asie centrale.

Ici se place une assez longue interruption dans l’histoire de l’apostolat. Plus que jamais, les mu< nlmans barrent la route du côté de l’est. L’Extrême Orient est inabordable par terre. Le nord-est.le l’Europe est aux Moscovites schismatiques, et Von ne voit pas trop ce qu’ils ont pu faire pour g.i à la foi les tribus tartares, ordinairement musulmanes, de Saraï, de Kazan, de Crimée. — Voir Marcellino de Ctvezza, Storià universale délie missione Franciscane, 1857-1895. — L.Brbhibr, T.’Eilise et l’Orient au M. A., 1907 ; — R. Grodsset, Histoire de l’Asie, t. II, 1922 ; — H. Cordier, Histoire de la Chine, 1922 ; — A. Bnon, Evangélisation de l’Inde au M. A. Études, 1901.

§ 4. — L’ère des découvertes

1. — Avec l’ère des découvertes, s’ouvrit une période nouvelle. Les gouvernements pour lesquels travaillaient les navigateurs entendaient bien ne pas séparer leur gloire de la gloire de Dieu. Conquérir pour les rois chrétiens les terres des infidèles, c’était les conquérir pour le Christ. Une idée île croisade n’était pas étrangère à ces expéditions, surtout du côté de l’Inde, où partout l’on rencontrait l’Islam. La pensée d’un devoir apostolique incombant aux princes était présente aux esprits. En « 492, Ferdinand et Isabelle, authentiquant la mission de Colomb, disaient : « (Il se rend) en certaines parties de la merocéane pour des affaires très utiles au service de Dieu et au nôtre. » Partout où les Portugais fondaient une forteresse, ils plantaient la croix.

Ce devoir, les papes savaient le rappeler. En 14g3, quand, pour prévenir des conflits possibles, Alrxandrr VI traça la fameuse ligne de marcat’on, assignant, à partir d’un certain méridien, l’est aux Portugais, l’ouest aux Espagnols, il leur disait :

« Nous vous ordonnons, au nom de l’obéissance, 

d’envoyer dans les terres fermes et les îles mentionnées, des hommes probes, craignant Dieu, habiles, capables d’instruire les habitants des dits lieux dans la foi catholique et tes bonnes mœurs. » Et, pour encourager les bonnes volontés, Rome octroyait aux souverains le droit de patronage.

2. — Tout de suite, les missionnaires affluèrent. Franciscains et Dominicains sont auxcôtésde Vasco