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PROPAGATION DE L’EVANGILE

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gent. Cest l’hérésie qui se répand cher les barbares ; puis les grandes controverses aboutissent à séparer de l’unité plusieurs nations. Le monophysisine s’empare de l’Arménie et de l’Ethiopie, le nestorianisme do la Perse, de l’Arabie, de l’Inde. Plus tard le schiëine grec achèvera l’éraieltement des Eglises d’Orient. La rupture avec l’unité ne leur enlèvera pas toute force de propagande : on le voit par le succès de l’arianisræ cher les peuples germains. Les Nestoriens auront d*s colonies religieuses en Khorassan, enTransoxiane, en Chine. On connaît la fameuse stèle sino-syriaque de Si-ngan-fou (781) (article Chine dans le Die t. d’archéol. chrét., R. Groussbt, Hist.de l’Asie, II, p. 273278). Surtout, ces Eglises séparées opposeront une première barrière aux missionnaires qui pourraient venir d’Occident. Il y en eut bientôt une autre, l’Islam.

La conquête musulmane, commencée en 622, année de l’hégire, dure cent ans du côté de l’ouest, mais elle est arrêtée en 782 par Charles Martel. A l’est, elle se poursuit tant qu’il y adespeuplesdevant elle, jusqu’en Chine, à Java, auxMoluques. Al’heure qu’il est, elle continue en Afrique. Du coup, c’est l’Arabie, la Syrie, la Palestine, l’Egypte, l’Afrique du Nord, l’Espagne, la Perse, plus ou moins enlevées à l’Eglise. Ce sont les florissantes chrétientés d’autrefois, à tout le moins anémiées, tropoccupéesànepas mourir pour songer à desconquêtes. C’est, à peuprès sur toutes les frontières de l’est et du sud, une muraille infranchissable auxmissionnaires. D’autant plus infranchissableque les musulmans eux-mêmes,

— qu’on explique le fait comme on voudra, — sont plus réfractaires à l’Evangile.

Refoulée ainsi sur plusieurs de ses frontières, la force expansive du Christianisme trouve ailleurs ses compensations. Il y a les barbares à convertir.

2. — Les invasions, en même temps qu’elles disloquaient l’Empire, superposaient aux anciennes Eglises latines des groupes païens ou des communautés ariennes. Avant d’aller au delà du Rhin chercher des âmes à conquérir, il fallait d’abord, sur place, convertir les maîtres dnjour. Ce fut l’œuvre du vi* siècle. Il suffit de marquer les étapes.

496.C1.ov1s ouvre la série et mérite à la France le nom de Fille aînée de l’Eglise. 507, la bataille de Vouillé met fin à la domination des Visigoths ariens en Gaule. 517, c’est le tour des Burgondes, convertis avec leur roi Sicismond. En 533, c’est la puissance arienne des Vandales en Afrique, — des persécuteurs odieux, ceux-là, — qui disparait devant les armées de Justinien, et en 568 celle des Ostrogoths en Italie, ariens aussi mais tolérants, malheureusement remplacés par les Lombards ariens et persécuteurs. En 580, les Visigoths d’Espagne suivent l’exemple de leur roi Récarkdb et se font catholiques, bientôt imités par leurs voisins les Suèves. Tous ceux-là, sauf les Francs, sont des hérétiques qui reviennent à l’unité. La série se clôt en 597 par le baptême du premier roi Anglo-Saxon, un païen lui, le roi Ethrlbkrt de Cantorbéry.

L’œuvre se continuera ensuite par la conquête du reste de l’Angleterre, en attendant le dernier coup porté par saint Colomban à l’arianisme germain chez les Lombards, et la conversion du roi Ghimoald (-{-671).

Abstraction faite des agents politiques, dont il faut cependant tenir compte, cette élimination du paganisme et de l’hérésie fut avant tout l’œuvre des anciens clergés formés à la discipline romaine : saint Rbmi qui baptisa Clovis, saint Avrr qui baptisa Sigismond, saint Martin de Brnga qui gagna les Suèves. etc. Il y a aussi les missionnaires au sens modemedu mot, venus de loin parfois. Missionnaires

romains comme Auoubtw db Cantobbry et ses compagnons. Missionnaires irlandais ; à peine convertie, l’Irlande est devenue pépinière d’apôtres. En 563, saint Columba se lançait dans l’évangélisation des Pietés et des Scots inabordablesjusque-là. A leur tour, les Scots et les Irlandais descendirent chez les Anglo-Saxons de Northumb rie, venant en aide aux moines romains. Bientôt, il passeront sur le continent, et les Anglo-Saxons les suivront pour évangéliser la Germanie. Onvoitapparaitre les peuples missionnaires.

GRÛGomKDHTouRS, Il istoriaFrancornm ; — Bkdr lb Vbnbrabi.b, Hist. Ecclesiastica ; — Montalbmbbrt, Moines d’Occident ; — Ozanam, Civilisation au. * s, , Etudes Germaniques ; — G. Konra, Origines de la civilis. moderne, 1886 ; Clovis, 1901 ; sainte Clotilde (les Saints) ; — A. Brou, Saint Aug. de Canterbun (tes Saints), 1896 ; — D.Cabhol, L’Angle t. chrétienne avant les Normands, 1909 ; — D. Gotjoacd, Chrétientés celtiques, 191 1 ; — D. Lkclbrcq, L’Espagne chrétienne, (1906), L’Afrique chrétienne (190/5).

3. — Ce travail fait, il fallait aller chercher les barbares chez eux, au delà des frontièresdece quiavait été l’empire romain, parfois sur les terres conquises par les princes francs.

Un premier groupe à signaler est celuides évêques missionnaires, fixés dans les « marches » de la Chrétienté, et qui évangélisent les vallées de l’Escaut, de la Meuse, du Rhin, de la Moselle. Dès le milieu du ive siècle, on signale saintSERVAis deTongres. Viennent ensuite saint Eloi de Noyon au vu* siècle, et les trois évêques de Mæstricht, saint Armand, saint Lamiîert, saint Hubbrt.

Puis c’est la petite armée des moines cettes venus avec saint Colomban (fondation de Luxeuil en 5go). Leur champ de travail est un peu au sud, Colomban descendra jusqu’en Lombardie.TRUDPERT, Magnoald, Gall prêchent en Alsace, en Souabe, en Suisse, dans la Forêt-noire. Kilian, le martyr de Wurtzbourg, est un cette également. Tous, apôtres ardents mais peu disciplinés, portent dans leurs conquêtes l’esprit individualiste de la race. Il faudra reprendre et corriger leur œuvre, organiser les diocèses. Près d’eux travaillent les missionnaires fræcs, saint Rupbrt à Salzbourg, saint Emmeran à Ratisbonne, saint CoRBiNiENà Freising.PiRMiNUs, quifonda Reichnau, est un bénédictin franc. Au milieu du vni" siècle, toute la région entre les Vosges etleTrentin est conquise, organisée et munie d’évêchés.

Mais voici que d’autres missionnaires arrivent encore, fils de saint Benoit ceux-là, et qu’envoie l’Angleterre. Allant au plus près, ils débarquent en Frise, pays encore païen. Saint Wilfrid, achevêque d’YoRK, ne fit que passer, mais baptisa le roi Aldgid (679). Saint Willibrord, pendant un demi-siècle, évangélisa la basse Allemagne, du Rhin au Danemark, et pénétra dans les îles les plus inaccessibles delà côte. Il fonda le siège d’Utrecht. Enfin paraitsaint Boniface.

E. Martin, Saint Colomban (Les Saints), 1905.

— Montalembrrt, Ozanam, G. Korth, ouvrages cités. — Dirt. d’hist. et de géographie ecclésiastique, art. Allemagne, col. 500. — U. Berlif.rb, L’Ordre monastique, 1922.

4. — Saint Bonifacb, de son nom anglais Winfrid, est un des très grands noms de l’apostolat. Tout comme un autre il défriche, mais il cultive surtout et il organise. Cet Anglo-Saxon est à l’antipode’les Celtes : il a l’instinct de la hiérarchie, et son premier soin, après avoir pris contact en 716 et 718 avec les infidèles delà Frise, est de s’en aller à Rome se mettre au service du pape (Grégoire II). Il revient en Frise, mais tout à côté il y avait la Germanie trnns-