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PREDESTINATION

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avec les populations barbares de l’Afrique ; voir De nat. et grat.. ii, 2, P. /, ., XLIV, 2/19 ; Bp. c Douât., seu de unitate Ecclesiae, xvi, 43 ; P> /-., XLIII, 4 2 4 ; £/. »., cxcix, ia, 46, ^*- i. » XXXIII, 922 ; et les découvertes géographiques des temps modernes l’imposent avec une irrésistible évidence. D’autre part, la grâce du Saint-Esprit devance les apôtres de l’Evangile ; elle travaille des âmes que nulle prédication n’a touchées. Une àme docile à toutes les inspirations intérieures de la grâce, étrangère aux vices qui constituent un obstacle positif à l’action surnaturelle, ne saurait être abandonnée de Dieu. Telle est la croyance positive de l’Eglise ; tel est en particulier l’enseignement de saint Thomas, qui ne craint pas, en vue d’une telle hypothèse, de l’aire appel au miracle. De veritate, q. xiv, a. Il ad. i m : Non sequitur inconveaiens, posito quod quilibei teneatur aliquid explicite credere, si in sih’is vel inter brida animalia nuiriatur : hoc enim ad divinam Providentiam pertirut ut cuilibet provideai dr necessariis ad salutem, dummodo ex parte eius non impediatur. Si enim aliquis taltter nutritus ductum naturalis rationis sequcrelar in appet tu boni et fuga iiiali, certissime est tenendum quod ei Drus vel per internant inspirationem revelaret ea quæ saut ad credendum necessaria vel aliquem fidei prædicatorem ad eum dirigerct, sicui misit Petrum ad Cornelium, Act., x. — Cf. ibid., q. xviii, a. 3 ; I », q. iii, a. 1 ad i m et3 m. Par quelles voies providentielles Dieu subvient aux besoins de telles âmes, on le recherchera plus en détail à l’article Salut.

c) D’autre part, il est certain que Dieu n’accorde pas les mêmes grâces à tous. Il a refusé à Tyr et à Sidon les grâces qui auraient pu les convertir (Mt., xi, 21) et qu’il a faites aux villes de Galilée. Le mystère de cette prédilection nous dépasse. Mais Dieu ne cesse pas d'être miséricordieux, pour laisser en certains cas libre cours à sa justice. Il disait au prophète Isaïe, Is., vi, 9. 10 : « Va, et dis à ce peuple : Entendez, et vous ne comprendrez point ; voyez, et vous n’aurez point d’intelligence. Appesantis le cœur de ce peuple et rends ses oreilles dures et bouche-lui les yeux, en sorte qu’il ne voie point de ses oreilles et qu’il ne se convertisse point et ne soit point guéri. » Ceci est le programme du châtiment, qui n’est point décrété a priori, mais seulementà raison de la faute. Dans l’Evangile, le Seigneur reprend cet oracle et en fait l’application, en commentant la parabole du semeur, Mt., xiii, 11-16. <> A vous, dit-il aux disciples, il a été donné de connaître le mystère du royaume de Dieu ; aux autres, cela est donné seulement en paraboles, aiin que voyant ils ne voient pas, etc. » Les disciples sont privilégiés ; ils reçoivent, par un enseignement ésotérique, la clef du mystère qui reste fermé pour d’autres. Nul ne souffre un déni de justice ; mais le bonheur des disciples est grand. La volonté de faire des élus éclate part : culièrement en eux ; mais elle ne repousse personne a priori.

La bonté divine doit tendre à se manifester surtout par des bienfaits. Or l’enseignement de l’Eglise nous montre une Providence surnaturelle ordonnée au salut de l’homme, de tous les hommes. Non seulement antérieurement au fait du péché originel, mais conséquemment à ce fait désastreux, nul n’est excepté de ce dessein paternel. C’est ce qui ressort de la longue série de documents ecclésiastiques affirmant l’universalité de la Rédemption et l’universalité d’une volonté salvilique en Dieu, et que nous avons cités : document du Concile d’Arles en 475 ; document du Concile d’Orange en 629 ; documents des Conciles de Quierzy en 853 et de Valence en 855 ; définition du Concile de Trente en 1 847 ;

condamnation de la 5e proposition de Jansénius par Innocent X en 1653, d’autres propositions jansénistes par Alexandre VIII en 1690 et par Clément XI en 1713. L’universalité de la Rédemption est une vérité de foi catholique, l’universalité d’une volonté salvilique en Dieu, antécédemment à l’hypothèse des péchés personnels, est une vérité certaine quant aux adultes, probable même quant aux enfants morts sans baptême.

Ces vérités excluent la doctrine hérétique de Calvin touchant la prédestination de certains hommes au mal du péché. Elles excluent pareillement la doctrine hérétique de la réprobation positive antécédente. professée par Calvin, puis par Jansénius. Elles posent au moins des bornes à la thèse de la réprobation négative antécédente.

L’hérésie naturaliste qui, au commencement du cinquième siècle, s’attaqua à la Providence surnaturelle, ne niait pas la bonté divine, mais la dépréciait en fait. Saint Augustin fut, contre Pelage, l'énergique champion delà grâce etdela prédestination. Les conciles de Milève (4 6) et d’Orange (52y), animés de son esprit, condamnent toute prétention de l’homme à faire par lui-même sa desiinée.

Depuis la ruine du pélagianisme, quinze siècles de controverse, et de multip ! es interventions du magistère ecclésiastique, ont éclairé les replis de la doctrine augustinienneet l’ont assouplie sans l'énerver. D’autre part, la condamnation des erreurs protestantes et jansénistes a mis en lumière desécueils opposés au pélagianisme, écueils laissés dans l’ombre par saint Augustin. L’universalité du dessein divin relatif au salut des hommes est aujourd’hui mieux comprise. En 1912, l’auteur d’un Essai historique sur le Problème du salut des Inlidèles pouvait conclure en connai.-sanee de cause :

A qui fait son possible, Pieu ne refuse pas la grâce : ce principe, que les Protestants ont tant reproché aux scolastiques et que les Jansénistes auraient volortiers effacé, les théologiens catholiques en ont appliqué le bénéfice aux infidèles ; Dieu accorde aux paîrns les grâces suffisantes, et s’ils usent bien de son secours, il les mène de proche en proche jusqu'à l'état de grâce, qui les établit dans son amitié. Et sans doute la foi est nécessaire, et dans cet acte de foi, lame rachetée doit s’attacher à son Rédempteur dans l’Eglise qu’il a fondée ; mais il suffit d’appartenir de cœur à l’Eglise visible, et celui là 11 énie qui ne la connaît pi int, peut lui appartenir de coeur, en vou’ant toutes 1"* volontés de Dieu dans l’ordre du salut Par le fait même, il adhère véritablement à son Sauveur. S’il croit à la Providence divine et accueille d’avance les desseins miséricordieux forrrés par la Bonté infinie, il accepte implicitement le Don suprême que fieu a fait aux hommes ; pour incapable qu’il soit de nommer Jésus Christ, virtuellement d croit en JcsusClirist. Cet acte de foi, rigoureusement indispensable, est possible à tout païen de bonne volonté. A déf. ut de prédicateur qui vienne annoncer l’Evangile, Dieu éclairera intérieurement les âmes, il leur donnera la conviction qu’il les aime, qu il s’occupe d’elles et qu’il veut les sauver.

L. Caim : kan, Le problème du salut des Infidèles, Essai liistorique, p. 5ag, Paris, 1912.

Tout nous invite à reconnaître, dans l’histoire de notre race, l’action d’une Providence paternelle qui, avec une liberté souveraine, fait plus ou moins luire sur tous les hommes les rayons de sa grâce et de sa

bonté.

Pour les prédestinés, en qui le dessein salvilique de Dieu se réalise, le bienfait divin est immense, il est manifeste. Pour les réprouvés, en qui ce dessein échoue parleur faute, qu’il sufTise d’observer ceci. Les grâces qu’ils ont reçues et qui devaient procurer leur salut s’ils y eussent répondu ainsi qu’ils pouvaient le faire, ne cessent pas d'être des bienfaits divins par le fait qu’ils les ont frustrées. Car l’inten-