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PREDESTINATION

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tin et saint Fulgence, arrangeant et tronquant les textes pour leur donner un sens prédestination. En même temps il correspondait avec divers personnages : Marquant de l’riim, Jonas d’Orléans, Servat Loup abbé de Perrière*, mettant leur science à l’épreuve. On dit qu’il reçut le sacerdoce subrepticement, sans la permission de son abbé. Vers 8/(5, il lit le voyage de Home et sur la route sema ses idées.

Noting, évoque de Vérone, qui avait rencontré Gotescalc en voyage, engagea Raban Maur, devenu archevêque de Mayence, à le réfuter. Selon Kahan Mair, P. A-, CX11, t53l, Gotescalc décrivait la prédestination comme une force qui contraint l’homme de pécher, Dei pracdestinatio invitum hominem facit peccare. La réfutation donnée par l’archevêque de Mayence s’inspire de Prosper et île l’Ilyponineslicon, alors attribué à saint Augustin. P. /.., CXII. 15301 533.

Gotescalc parut à la diète synodale de Mayence en octobre 848, et déposa une profession de foi où il allirmait une double prédestination des élus au repos éternel et des damnés à la mort éternelle, absolument sur le même plan : Gemina est pracdestinatio sive electorum ad requiem, sire reproborum ad mortetn… similiteromnino (texte conservé par Ilincmar, De prædestinatione, Y, P. I.., CXXV, 89 D). A l’issue dusynode.le miserabilis monachus, signalé comme grrovagus, fut détenu à Reims, sous la garde de l’archevêque Hincmar.

L’année suivante, il comparut de rechef au synode de Quierzy (849). N’ayant donné aucun gage d’amendement, il fut déposé de la prêtrise, battu de verges et emprisonné. Témoignage de Hincmar, cité par Ram db Lyon, liber de tribus epistolis, xxiv, P. L., CXXI, 1027. On lui permit néanmoins de communier à Pâques et on lui laissa la liberté d’écrire. Il en prolita pour rédiger deux professions de foi, que nous possédons, P. L., CXXI, 337-366, et un libelle intitulé PUæium, où il soutient, entre autres choses, que le Christ est mort pour les seuls prédestinés. Voir Hincmar, De Prædestinatione, xxix, P. L., CXXI, 291 A ; xxxiv, 365 B ; xxxv, 370-372.

Pour éclairer les moines sur la portée des erreurs de Gotescalc, Hincmar avait composé un Opitsculum ad reclusos et simplices, dont le contenu ne nous est révélé que par Raban Maur, Ep., iv, P. L., CXII, 151 81 530. Cet opuscule fut jugé plus ou moins sévèrement par Ratramne de Corbie, par Servat Loup, abbé de Ferrières, et par Prudentius, évêque de Troyes, qui crurent devoir élever la voix en faveur de Gotescalc. Prudkntius se prononça pour la double prédestination, en tendant d’à il leurs la prédestinât ion ad poenam, non ad culpam. Il inclinait à croire que le Christ n’est pas mort absolument pour tous les hommes, et interprétait en ce sens le texte de saint Paul, II Tim., 11, 4. Un Synode de Paris (84g) lui donna raison. A la requête de Charles le Chauve, Ratramnr écrivit deux livres De prædestinatione, P. A., CXXI, 13-80. Expliquant en quel sens Dieu endurcit les cœurs coupables, il ose avancer ceci, L. I, p. 19 A : Manifestatur operari Deum in cordibus honiinuni ad inclinandas eorum voluntates quocumque voluerit, sive ad bona pro sua misericordia, sive ad niala pro meriiis eorum, iudicio utique suo, aliquando apertu, aliquando occulto, semper tamen iusto. — Aux côtés d’Hincmar, se rangeaient, outre Raban Maur, Scot Erigène — faible et plutôt compromettante recrue ; Florus, magister de Lyon, et Amolo, évêque de la même ville.

L’écrit de Scot Erigùnr De prædestinatione (année 851), P. L., CXXII, 346-440, suscita des contradicteurs dans les deux camps. Tandis que Prudentius de Troyes, dans son De prædestinatione

contre loannem Scotum(8bi), P. L., CXV, 1009-1366, l’accusait de renouveler les erreurs de Pelage et d’Origène, Florus lui-même croyait utile de le réfuter et le traitait de vaniloquus et garrulus liomo. Adversus loannis Scoli Erigenæ erroneas definitiones l, ber, P. L., CXIX, ioi-250.

Cependant le siège de Lyon devenait vacant par la mort d’Amolo, et son successeur Rbmi prenait position entre les deux camps, de manière à tout brouiller. De tribus epistolis liber, P. /.., CXXI, g851068.

En 853, un synode de Quierzy adopta contre Gotescalc les quatre célèbres capitula d’Hincmar, qui furent contresignés et publics par Charles le Chauve. Le 1" consacre le principe de l’unica prædestinatio, ayant pour objet le don de la grâce et conséqueinment de la gloire, s’il s’agit des élus ; le châtiment, s’il s’agit des réprouvés. Le a* affirme, dans l’homme racheté par le Christ, l’existence du libre arbitre restauré par la grâce. Le 3* affirme la portée universelle du texte de saint Paul touchant la volonté salvifique, I Tint., 11, 4. Le 4e revient sur la même doctrine en affirmant la valeur universelle de la rédemption du Christ, dont le fruit est à la portée de tous, encore que tous n’en profitent pas. D. B., 316-319(279-282). Il faut reproduire au moins le premier de ces capitula :

De us omnipotens heminem sine peccato rectum cum libero arbitrio condidit et in paradiso posuit, quem in sanctitate iustitiæ permanere voluit. Homo libero arbitrio maie utens peccavit et cecidit, et factus est massa perditionis totius hurnani generis. Deus autem bonus et iustus elegit ex eadem massa perditionis secundum præscientiam suam quos per graliam prædestinavit ad vitam, et vilam illis prædestinavit aeternam ; ceteros autem, quos iustitiæ iudicio in massa perditionis reliquit, perituros præscivit, sed non ut périrent prædestinavit ; poenam autem illis, quia iustus est, prædestinavit aeternam. Ac per hoc unam Dei prædeslinationem tantummodo dicimus, quæ aut ad donum pertinet gratiæ aut ad retributionem iustitiae.

Selon cette doctrine, très fondée en Ecriture et en Tradition, la prédestination divinea essentiellement pour objet le don divin, c’est-à-dire avant tout la grâce, qui tend à fructifier dans la gloire. Ceux pour qui elle fructifie dans la gloire, peuvent être appelés simplement prédestinés. Ceux pour qui elle ne fructifie pas, ne peuvent être appelés prédestinés ; mais, où la grâce avorte, la justice divine revendique son droit et prédestine un châtiment aux coupables.

Le point de vue d’Hincmar n’était pas celui du parti que menait Rémi de Lyon. Rémi, qui estimait Hincmar et les siens solidaires des errements de Scot Erigène, rédigea contre les capitula de Quierzy une critique acerbe : De tenenda Scripturæverilatc, P. /-, CXXI, io83-1134. Au mois de janvier 855, un synode de Valence adopta, sous son inspiration, six canons qui s’opposent directement à ceux de Quierzy. D. B., 3ao-325 (283-288).

Le i « r rappelle, en termes généraux, le devoir de maintenir la foi, la vérité, la paix, la tradition de l’Eglise, en toutes matières et particulièrement en ces matières délicates de la prescience divine et de la prédestination. Le 2e rappelle que la prescience divine ne faitau libre arbitre aucune violence, et donc laisse au pécheur l’entière responsabilité de sa perte. Le 3e affirme contre Hincmar la gemina prædeslinatio, en des termes qu’il faut noter :

(Ilom., ix, 21-22) Fidenter fatemur prædestinationem electorum ad vitam et prædestinationem impiorum ad mortem : in electione tamen salvandorum miseri-