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MARIE, MERE DE DIEU

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que, pour aequiller envers les prêtres la redevance prescrite par la Loi, on n’attend pas que le premierné ait (les frères. L’ange exlerniinaleur passa dans les maisons des Egyptiens, mettant à mort les premiers-nés {Ex., XII, 29) : on ne voit pas qu’il ait épargné les lils uniques (ix, x).

li" Si l’Evangile parle souvent des frères de Jésus n, jamais il ne les nomme i< lils de Marie ». Le plus connu d’entre eux, Jacques fils d’Alphée (qu’il ne faut pas confondre avec Jacques fils de Zébédéc), avait pour mère une sœur de la Sainte Vierge, que saint Jean appelle Marie (épouse) de Cléophas* Cléophas et Ali>liée sont un même personnage. Malt., xxvii, 56 ;.Miirc, xv, 40 ; f.nc, xxiv, 10 ; loan., xix,

: ?5. Cela ne doit pas surprendre, si l’on considère que

l’Ecriture donne au nom ùe frère divers sens : outre la stricte fraternité du sang, il y a la fraternité de nation, de parenté, d’affection. Les frères de Jésus étaient des frères au sens large, de simples parents (xi-xvi).

Helvidius a voulu faire montre d’érudition ; à l’appui de son opinion, il a cité Tertullien et Victorin de Petlaii. Jérôme écarte simplement l’autorité de Tertuliien qui, lorsqu’il nia la virginité de Mariepost partuni, n’appartenait plus à l’Eglise. Quant à Victorin, c’est à torl qu’on l invoque : il a parlé des fi ères du Seigneur, mais non des lils de Marie. En revanche, Jérôme peut citer une légion d’auteurs anciens qui ont cru à la [)erpétuelle virginité de Marie : Ignace, Polvcarpe, Irénée, Justin et bien d’autres hé ritiers de la doctrine apostolique, qui ont professé cette doctrine contre Ebionites, ïliéodote de Byzance et Valentin (xvii).

Loin d’accorder que les « frères de Jésus » étaient lils de Marie, Jérôme n’accordera même pas qu’ils pouvaient être (ils de Joseph, comme on l’admettait jusqu’à lui as’sez volontiers. L’honneur de Marie exigeait qu’elle fût unie à un époux vierge : tout est virginité dans ce mariage (xix). Hardi coup de barre qui fixera l’orientation de la tradition. Jérôme le justifie par des raisons de haute convenance. P. /,., XXIII, ioS B : Tu dicis Mariam virginem non permon.sisse : ego milii plus vindico, eliam ipsum loseph virginem fuis.^e per Mariam, ut e.r virginali coniugio l’irgo /iliu.i nasceretur..’ii eniin in s’iruin sanctum foriiicntio non cadit et aliam eum uxorem Itahuisse non .<^crihitur,.^lariæ autem, quani putatus est hal/uisse, custos poilus fuit quant maritus ; relinquitur i’irginem euni mansisse cum Maria, qui pater Domini meruit appellari.

Sur l’histoire du culte de saint Joseph et les questions dogmatiques lices à ce culte, voir surtout Joseph Seitz, Die Verehrung des lil..Jasepli, Freiburg, i. B. 1908. Pour la question présente. II, i, 8, p. 51-.’18.

La position prise par saint Jérôme contre Helvidius fut maintenue par lui avec beaucoup de fermeté durant toute sa carrière. En 892/3, l’occasion de revenir sur la perpétuelle virginité deMarie lui fut offerte jiar l’hérésie de Jovinien. C’était un moine en rupture d’ascétisme, qui s’avisa de soutenir, entre autres paradoxes, l’équivalence parfaite, d’un point de vue moral et chrétien, entre la virginité, le veuvage et la vie conjugale. Cette nouveauté fut condamnée en 3go par le pape saint Sirice dans un synode romain, auquel fil écho, l’année suivante, un synode milanais jirésidé par saint Ambroise. Saint Sinicn, Ep. vii, P. L., W, 1168-1172 ; saint Ambroisr, Ep. xLii, P. /.., XVI, 1124 1129. Par les soins de Pammachius, l’écrit de Jovinien fut envoyé de Rome à Bethléem, oii Jérôme écrivit deux livres Adversus loi’inianum, P. I.., XXIII, 211-338. Relevons seulement quelques traits, dans le premier livre, qui louche en passant à la perpétuelle virginité de Marie. Jérôme en trouve

l’image dans le jardin fermé, dans la fontaine scellée du Cantique (iv, 12), et il ajoute : « De cette perpétuelle virginité naîtront de nombreuses vierges » ; Ilæc firgo perpétua multariim est mater virginum ; Adv. lovinianiim, I, xxxi, P /,., XXIII, 254 B. Amené à commenter l’oracle d’/s., vii, 14, il dislingue

riD/y à la fois de n’^lP^ < ! "’signifie proprement virgo, et de n~lî ?3> q"’signifie adolescentula, pælla ; il interprète : virgo sécréta et nimia parentuni diligentia custodita. Ibid.^ xxxii, 254-a55.

Pour saint Jérôme, Isaïe est essentiellement le prophète de la vierge, virginis demonstrator, Adv. loannem Ilierosolyni., x, P. /,., XXIII, 363 C. Dans son commentaire In Is<iiam, il approfondira encore les questions linguistiques relatives à l’oracle de l’Emmanuel, et soulignera notamment la diflérence entre la le^on des Septante ; (ôoù r, r^v.pOivo ; h /y.jzf^l >/, ’^£t « i, et la leçon plus expressive de saint Matthieu, i, î3 : iSryj Y, TTxpSivoi £v y’/7T/51 £ ? ! ’, qul. en tranchant le mot, fait mieux ressortir le fait de la conception virginale. /’. y.., XXIV, 109. Il admet que Marie avait lu l’oracle d’Isaïe ; par là, elle était disposée à entendre la révélation qui lui fut faite par l’ange. Anecdota Maredsolann, II, 895.

On ne s’étonnera pas de voir Jérôme passer, de la maternité i)hysique de Marie, à sa maternilé mystique, et rééditer l’antilhèseEveMarie. Mors per Ei’am ; i’ita pér Maruim, lisons-nous, Ep. xxii, 21, Ad Euslochiuni, P. /.., XXII, 408. A raison de sa virginité perpétuelle, Marie incarne l’idéal de la virginité vouée à Dieu par les i’irgines Christi. Nous trouvons cet idéal projiosé à la même vierge, Ep. xxii, 38, 422 : l’ropone tihi healam Mariam, quæ tantæ extitit piirilatis ut muter Domini esse mereretur. S’adresse-t-il à une mère, Jérôme lui conseille de former sa fille sur ce modèle. Imitetur Mariam, Ep. cvii, 7. |3, Ad Lætam, P. L., XXII, 874. 877.

Avec saint Augustin, Jérôme lutta contre l’erreur pelagienne, écartant la chimère d’un homme sans péché ici-bas. Par là, il n’entend pas limiter la puissance de la grâce, mais seulement constater le fait de notre infirmité originelle. Il ne songe pas à proposer Marie comme une exception à la loi commune, et pourtant il déclare que les plus saintes âmes ne peuvent lui être comparées..Vinsi, Elisabeth et Zacharie, Dial. adv. Pelagiunos, I, xvi, P. A., XXIII, 510D. La doctrine dcl’inimaculéc conception n’apparait pas chez lui ; [lourtant il ouvre la voie dans un texte uni- | que, où il montre Marie, fille des patriarches, affran-’chie des tares héréditaires, tout entière ficurissant pour Dieu, /n Ecvle., P.L., XXIII, 1098 G : Ex quibus nata est virgo tiherior sancta Maria, nullum hahens fruticem, nullum germen er lalere ; sed totus fructus eius erupit in florem, loquentem in Cantico Canticorum : Ego floscampi et liliiim convallium. Cant., 11, i.

Marie s’élève au-dessus de l’humanité par une plénitude de grâce, Ep. lxv, 9, P. /,., XXII, 628, qui doit faire désirer singulièrement, entre les biens de la vie future, l’honneur de lui être réunie. C’est l’espérance proposée à la vierge Eustochie, Ep, xxii, 4 I. P. L., XXII, 4^4- A une mère, Paula, qui pleure sa fille Blésilla, il fait entendre la parole de sa fille :

« Ne pleurez plus sur moi ; car à votre place, j’ai

Marie, la mère du Seigneur I « Ep. xxxix, fi, P. L., XXII, 472.

Voir J. NiiîssEN, Die Mariologiedes hl. Hieronymus, Miinster i. W., igiS ; GniiTZMACHBR, Hieronymus, 3 vol., Berlin, 1901-1908.

Dès l’année 877, saint Ambroisk (}- 897) dédiait à sa sœur Marcelline ses trois livres De virginibus. II y présente Marie comme le miroir des vierges, réalisant l’idéal de toutes les vertus qu’elles doivent