Page:Adhémar d'Alès - Dictionnaire apologétique de la foi catholique, 1909, Tome 3.djvu/937

Cette page n’a pas encore été corrigée

1861

PENITENCE

1802

formelle du Christ, quis’esl choisi lui-même des hommes pour auxiliaires et corauie pour suppléants. Ainsi s’explique l’insistance croissante avec laquelle on a dû dans l’Eglise prêcher la nécessité de la confession au prêtre lui-nirrac.

Maisd’aulre part, plus la praliquede la confession s’est généralisée, plus aussi s’en sont multipliés les heureux eflfets. Les consciences se sont affinées ; des fautes estimées moindres au sortir du paganisme ont paru plus graves après plusieurs siècles de christianisme. La délicatesse plus grande qui les a fait redouter davantage a produit aussi un empressement plus grand à y opposer le remède de la confession. iVEglise, un jour, en a solennellement prescrit l’application au moins annuelle aux péchés reconnus comme mortels. Les meilleurs parmi les pasteurs el les (idèles sont allés plus loin : ils ont eu, ils ont répandu la dévotion de la confession. Sous forme d’oeuvre surérogatoire, la confession est devenue de l)lus en plus fréquente, el par là encore son influence bienfaisante s’est élargie et accrue : si l’administration de la pénitence a tant contribué à l'œuvre moralisatrice el civilisatrice de l’Eglise, c’est, du poinlde vuepsj’chologiqueet humain, à la confession surtout qu’elle le doit.

Appkndicb, — Le sscret de la confessio.n

119. — I. Sa conception ocluelle. — Il resteà dire un mol du secret de la confession. La loi en est corrélative à celle de la confession : établie en principe par le Christ, elle a été déterminée et précisée par l’Eglise. Le concile de Latran, qui, au xiii » siècle, prescrit aux pécheurs le minimum de la confession annuelle, enjoint aux confesseurs d'éviter tout ce qui serait de nature à révéler la faute ainsi connue. En cas de violation de secret, la peine prévue est celle de la déposition et de l’internement perpétuel.

Depuis, les papes ont encore resserré, en les précisant davantage, les obligations de cette loi. Elle interdit non seulement une manifestation quelconque de la faute, mais aussi toute utilisation de la connaissance acquise en confession. L’usage échapperait-il a toute possibilité de soupçon ou même devrail-il être tout au profit du pénitent, en dehors de la confession, il demeure totalement proscrit. Seul le pénitent pourrait l’autoriser ; encore serait-il alors peu sage au confesseur d’utiliser au for externe la permission ainsi reçue. Aucune autorité sur terre ne saurait du moins le relever ou le dispen'^er de cette loi du secret. L’Eglise elle-même s’en dénie le pouvoir ; elle y reconnaît une loi d’origine proprement divine, dont elle a bien pu déterminer le sens el les applications dernières, mais à laquelle il ne lui appartient pas de déroger.

Telle est la conception du secret de la confession universellement reçue aujourd’hui dans l’Eglise catholique. On n’y voit pas seulement un secret d’ordre professionnel analogue à celui qui résulte pour les avocats, les médecins, etc., des contidcnces reçues au titre de leur |)rofession. Dans tous ces cas, il n’y a pour lier le contident qu’un contrat tacite intervenu librement entre lui et le consultant. Mais ici il y a plus. Le recours au prêtre n’est point alfaire libre pour le pécheur. La confession lui est imposée par Dieu lui-même, et c’est pourquoi, à la promesse, au contrai tacite de silence qui intervient alors entre lui et le confesseur, s’ajoute, pour le lier également à son égard, l’obligation faite par Dieu à ce dernier de lui garder le secret le plus absolu.

ISO. — Ainsi s’explique la transcendance exceptionnelle de cette loi. Elle n’a pas été portée seulement pour rendre plus acceptable le précepte de la confession ; la violation ou le relâchement n’en

aurait point seulement pour clVet de discréditer ce mode de rémission du péché ; l’intérêt des âmes, en un mot, leur intérêt i>iis au sens le plus élevé et le plus uniersel, n’est pas seul : 'i exiger que, pour en assurer le maintien, on passe outre à tous les inconvénients que l’observation en peut avoir parfois pour le confesseur ou le pénitent lui-même, et qu’on renonce à tous les avantagesque, dans un cas donné, la violation permettrait d’en assurer aux individus ou à la société elle-même.

La raison dernière de cette rigueur est à chercher plus haut et plus loin. Elle est dans le caractère même de l’aveu fait au confesseur. Un homme sans doute le reçoit ; mais, par son intermédiaire, c’est à Dieu niénie qu’il s’adresse. Le prêtre, en un sens, n’y compte pas. Il est le juge divinement institué pour connaître du péché ; mais c’est en cette qualité seulement qu’il est appelé à le connaître. A titre privé, il l’ignore totalement ; et l’efTacement, la disparition du confesseur humain derrière le confesseur divin, que nous avons rencontré à la base des exhortations antiques à la pénitence, reparait ici pour servir également de base à la loi du secret de la confession. Depuisles jours oiiTEglise l’a définitivement formulée, papes et docteurs la justillent par cette absorption de l’homme en Dieu. Gomme homme, le confesseur ignore, el c’est pourquoi il ne peut ni parler, ni répondre, ni seulement paraître savoir. Le faire serait trahir lesecreldu Dieu qu’il représente :

« Le prêtre, disait le pape Innocent III, dans un

sermon sur la consécration du prêtre, le prêtre à qui le pécheur se confesse, nonpas comme à un homme, mais comme à Dieu (ciii peccalor con/itetiir, non ut homini, seil ut /)eo), doit éviter toute parole ou tout signe qui donnerait à penser qu’il connaît son péché.- (/'./,., CCXVII, 652 CD). « Le prêtre, reprend saint Tuo.MAS, est tenu de garder le secret avant tout el principalement parce que lesilence est de l’essence même du sacrement : le prêtre en elTct ne connaît le péché que comme Dieu, dont il lient la place dans la confession » (Supplem., q. ii, a. 4.c). « Ce qui est connu par la confession est censén'étre point connu, car on ne le sait point comme homme, mais comme Dieu » ((t. I, adi" et cf. ad 2", ad 3", etc.).

131. — 2. Son antiquité. — Cependant la doctrine ainsi établie semble se heurter pour les premiers siècles à une pratique el à une conception de la confession toutes différentes. La confession parfois aurait été publique ; nous-mêmes avons paru admettre l’assujettissement à la pénitence publique pour les fautes secrètes préalablement confessées : que devenait dans tous ces cas cette loi du secret, essentielle, dil-on maintenant, au sacrement de ])énitence et établie par Dieu lui-même ?

Remarquons d’abord que ces faits, tels qu’ils sont allégués, ne prouveraient pas que la loi ait été méconnue et violée sciemment ; tout au plus pourrait-on en conclure qu’elle était ignorée. Il parait bien que la distinction du for interne et dii for externe ne s’est précisée que peu à peu. Morin (l. 1, c. x) a cru pouvoir en nier l’existence pour les premiers siècles : ce qui est tout au moins une forte exagération ; mais, sans aller jusque-là, on peut bien reconnaître que la concentration habituelle entre les mains de l'évêque de tous les pouvoirs pénilentiels était de nature à entretenir ou à produire celle confusion.

183. — ^)uanl aux faits eux-mêmes, il n’est pas exact que la confession publique ait jamais été obligatoire pour les fautes secrètcs.ll est possible, encore <lu’on en connaisse peu d’exemples, que parfois certains pénitents aient tenu à s’iniliger à eux-mêmes celle aggravation de peine et d’humiliation ; mais