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PENITENCE

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ce qu’on a pas crainl d’appeler une « instruction à l’usage des lonfessejirs « ( « Beicblvalcrliclie Anweisung », dit K. Adam, Die Kiicliluhc Sùndenvnr !  ; ebuiig iiacli dem lieit. Aiigiiatiri, Paderborn, lyi^, p. 145). C’est la 26" des Divei’sis quæstionihiis Lxxxui, p. /.., XL, 17-18. Elle date des premiers temps de son sacerdoce et le nouveau prêtre semble avoir vculu y lixer pour lui et pour ses amis la ligne de conduite à suivre avec les diverses calétories de pécheurs. Tout y est ramené à ce preuier principe, qu’il faut se rendre compte de i'état d'àme de celui qui s’accuse et discerner si les lécliés sont des péchés de faiblesse, d’ignorance ou de malice. C’est poir ces derniers seulement qu’il est absolument indispensable d’imposer une peine déterminée. Les fautes, au contraire, de faiblesse et d’ignorance sont susce|)libles d’indulgence, et il n’y a donc qu'à se pénétrer de ces considérations pour jUgcr quand il y a lieu ou non d’urger l’obligation de la pénitence rigoureuse ou publique ( « Qaibiis hene tiactatis, proliahiliter jtidicnri l’olest qui non sint cogendi itd pænitenttam luctuosatn et limentahilem, qiiamvis peccata faleantur, et quibui iiulla omninosperiuidn sit sains, nisi sacii/iciiim obtiilerint Deo rpiritum contribulalam per pænitcntiam. » — pour le sens et la portée de cette règle voir notre article : Saint Augustin a-t-il confessé dans 7?. pr. d’Ap.^lnin 1921, p. 221 sqq.). On ne saurait donner plus clairement à entendre que le confesseur juge de la pénitence à imposer par la gravité subjective des fautes accusées. En elles-mêmes, elles sont graves : on ne s’en accuserait pas autrement, et il n’y aurait pas lieu de songer pour elles à la pénitence publique. Mais l'état d’esprit de celui qui s’en accuse permet au ])rètre qui en reçoit I aveu de ne pas en exiger cette expiation rigoureuse. Et voilà donc bien ! a porte ouverte à la pénitence privée : la clef en est aux mains du prêtre.

70. — On voit en effet la conséquence qui <lëcoule de la liberté d’action ainsi reconnue à l’adminislrateur de la pénitence. Dès là qu’il croit constater cette « contrition > qui seule importe et que Dieu ne saurait rejeter ; s’il lui semble avoir obtenu ce < renoncement au péché qui en est le meilleur remède », quel que soit le motif sur lequel son jugement se fonde, il est en son pouvoir ou même de son devoir d’accorder le pardon.

Juge en un mot du péché et des pécheurs, le prêtre a pour mission de remettre les péchés au nom de Dieu ; il lui faut pour cela s’assurer, autant que

;e comporte l’humaine nature, que le pécheur est

dans les conditions voulues pour que Dieu lui veuille pardonner : le serviteur ne saurait prétendre à pardonner lui-même où il suppose que son maître ne saurait le faire. C’est pourquoi il lui incombe d’imposer une pénitence, une satisfaction : c’est dans la manière d accepter et de subir la |)eine ainsi infligée, qu’apparaîtra le mieux la volonté d’amendement. Il n’y a pas cependant que l’empressement et que la rigueur à se châtier où apparaisse la volonté sincère de renoncer au péché. L’appréciation du prêtre n’est donc liée à aucune condition de temps ni de manière, l’our former son jugement, il a à tenir compte des circonstances où se trouve le pénitent lui-même et des dispositions d'àme qu’il manifeste. Nul doute d’ailleurs que son appréciation reflète les tendances propres de son caractère personnel : en matière lie pénitence, la rigidité et l’indulgence eurent toujours leurs représentants ; les canons pénitentiels avaient justement pour but de prévenir les écarts de jugement ; mais ces canons eux-mêmes, nous l’avons vu, sauvegardaient la liberté d’appréciation de l'économe de la pénitence.

71. — Or, il est facile de s’en rendre comidc, une administration de la pénitence ainsi conçue ouvrait nalurellerænt la porte, non jias à l’inslitution d’un mode de rémissinn des péchés parallèle à celui de la pénitence publique, et portant dès lors le nom de pénitence privée, mais à des atténuations, à des abréviations, à des suppressions de peines, qui réduisaient pratiquement le traitement du péché par l’Eglise à ce que nous a[)pelons aujourd’hui de ce nom. Mgr Batiifol a bien vu cette dérivation. Parlant de la pénitence ecclésiaslique en général, qu’il déclare toute sacramentelle mais en partie secrète et en partie publique, il conclut : « Ne disons pas, il y a 1 ne i>énitence publique, et il n’y a pas de pénitence secrète. Disons : il y a une consultation I = ; confession] secrète, une satisfaction publicjue, une réconciliation publique. Le jour où toute cette publicité disparaîtra, il n’y aura pas une institution nouvelle, mais la modilicatioii d’une seule et même institution préexistante » (Etudes liist. et de théol.posit. : les origines de la pénitence, p. 208-209).

On ne saurait mieux dire, croyons-nous, à condition cependant de ne pas nous faire trop attendre

« le jour où disparaîtra toute cette publicité n. II

semble liien en elTet que, de tout temps, la publicité tout au moins de la satisfaction a été supprimée dans certains cas et en ce sens nous n’hésitons pas à considérer la pénitence dite privée comme ayant toujours coexisté à la pénitence dite publiipie.Non pus, encore une fois, qu’elle se présentât, aux pécheurs comme une voie de pénitence parallèle à l’autre, plus courte, plus facile et plus discrète, dont il fût loisible ; i tous de s’assurer ou de revendiquer l’avantage. Non ; le choix du remède ne fut jamais laissé aux pécheurs ; mais le remède leur fut toujours dosé, et ce que nous appelons la confession pri^ ée représente seulement la dose pi us légère <iue, soit à raison d’une culpabilité moindre, soit par égard aux circonstances, à la bonne volonté, à l’ignorance ou même à l’opiniâtreté des malades, les prêtres jugeaient leur suffire ou leur pouvoir être seule imposée. Ainsi s’cil)liquentles responsabilités si redoutées des médecins des âmes.

Mais le fait reste. Quelque lourde que fût la responsabilité, on l’assumait, et, à l’occasion, comme nous l’a déjà dit saint Cyphibn (n 50), on allait jusqu'à ce qu’on considérait comme l’extrême limite de l’indulgence. Ainsi, des partisans du schisme de Félicissi me, coupables par ailleurs d’adultère et d’antres crimes passibles d’une longue expiation, furentils admis avant terme à la communion i)ar Cytrikn lui-même (/?/)., MX, |5, p. 685). C'étaient bien là, il faut l’avouer, des cas limites. Mais les angoisses menus où ils jettent le saint évêque nous permettent de saisir sur le fait la part d’initiative personnelle qui lui appartenait dans le jugement du pécheur, et donc le ministère de la pénitence privée en des cas relevant normalement de la pénitence publique.

73. — Car cette suppression de la longue et publique satisfaction pour le péché est bien, à proprement parler, ce qui cara< ; térise la pénitence privée, telle que nous l’avons vu concevoir. On pourrait la définir : la rémission du i)éché accordée par l’Eglise sans enr « ")lement dans la classe des iiénitents proprement dits. Telle est du moins la notion qui s’impose à qui veut s’en faire une idée d’aprè.s le langage « les anciens.

« Quand on conçoit la pénitence connue la concevuionl

les Pères, sous la forme idéale et parfaite de la pénitence solennelle, où la vertu rémissive du sacrement s’exeri, ail tout entière, d’instinct on rapporte tout h ce premier concept ; la pénitence secrète n’apparaît pa » comme une institution spéciale, comme une seconde espèce de p^ni-