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PÉNITENCE


n’a pas lié, Dieu lui-même le chargera déchaînes que plus rien ne saurait briser (/61rf., col. 502). Aussi l’orateur insisle-t-il sur le devoir pour les tidèles de ne pas entraver l’administration de la pénitence par une commis éralionJéplacée, de prêter au contraire leur appui moral au chef de l’Eglise et d'éviter, en prenant parti pour les coupables, de leur laisser tout l’odieux de la sévérité nécessaire ((7<i(£., eoZ. 500).

Et ce lanjjage montre bien que, à A.ntioche comme à Garthage et à Rome, c’est le prêtre qui assume le jugement du pécheur. Mais il aide aussi à comprendre le sentiment de frayeur qui inspire, dans le traité sur le Sacerdoce, la description des fonctions de confesseur. Comme saint Cyprien, saint Ambroise, saint Pacien et saint Grégoire de Nazianze, saint Jkjln CuRYsosTOMi ! se prend à trembler devant ces responsabilités du prêtre. ii, u-iv, P. C, XLVUI, 633-635.

Il est le médecin des âmes et c’est à ce titre — comme à celui de juge — que la connaissance du péché lui est bien nécessaire. Gomment, autrement, distribuer à propos les soins qu’on doit recevoir de lui { « Taî ; Ttc./si rav l’piw » Scpx-neiyiia) Mais voilà justement ce qui rend ce ministère redoutable : ces maladies morales de son troupeau, qui sont à la charge du pasteur, la guérison en est si dillicile et le traitement si délicat 1 Car les infirmités et les blessures des âmes ne se voient pas ; elles ne viennent pas d’ellesmêmes à la connaissance delévêque. Souvent le mal lui reste caché, car nul d’entre les hommes ne voit ce qui se passe dans un homme, si ce n’est l’esprit de l’homme qui est en lai. Surtout, il n’a pas, pour appliquer ses rerakles, les facilités et la liberté dont dispose un simple bercer. Celui-ci ne rencontre jamais de résistance : qu’il faille lier, brûler, couper, retenir à l'étable, écarter du pâturage ou de l’abreuvoir, dès qu’il le croit nécessaire, rien ne l’empêche de le faire. Mais pour l'évêque, une fois la connaissance du mal acquise, l’embarras, au lieu de diminuer, augmente : ses agneaux sont d’un traitement si ditUcile ! Avec eux aussi, il peut y avoir à lier, à

)river de nourriture, à brûler, à couper ; mais l’acceptation et l’eiricacité de la médecine dépend ici

lies mal : '.des et non point du médecin. Le péché ne se i ; uôrit point par la violence. La contrainte par corps est permise aux juges civils ; mais ceux qui président aux Eglises ne peuvent recourir qu'à la persuasion. Aussi leur faut-il beaucoup d’art pour amener les malades à se soumettre au régime — aux remèdes — que prescrivent les prêtres. Car ce choix des remèdes exige, de leur part, une cnnnnissance approfondie des malades. Tous ne peuvent pas tout porter et on risque de les tuer en voulant leur faire suivre à tous le même traitement. Il ne sufBt donc pas de connaître la loi : en bien des cas, on a perdu les âmes pouravoir voulu la leur appliquer danstoute sa rigueur (<xi -noi-lo-jç Sa i-/oifit Jr/siv, roj ; ec" ; iT/yjza. I|ox£</ » vtc< ; yv-xic Jià T » l(n.iri 17tKiT>i*^ » ai riv àu.-j.orrr, u.i.TrM kçikv). Bien l) ! us encore que de la faute commise et de l’expiation méritée, il faut tenir compte des dispositions des coupables. Il y a les faibles et les pécheurs d’habitude ; il y a les mondains ; il y a les membres de l’aristocralie et de la haute administration. Prétendre imposer à tous le même tarif pénitentiel et vouloir proportionner uniformément le châtiment au péché, c’est, au lieu de les retirer du mal, les y prérùpiter à fond. Il faut donc au pasteur beaucoup de perspicacité et un r-'gard pénétrant ; ses yeux doivent pénétrer au plus intime de l'àræ pour que rien ne lui échappe de son état réel. (Joùf, t Stî Tr, ç o-jvsjiw ; irai //uotuy ofôvJ-p-^v r, piz te r.iptjy.oT.iiv Trâ-^o^tv tïjv tï ; ç ^y ; f^ç ï^tv… ypr, U’oStv Kvll^TaoTSV ùftrjv.t ù/J.v. ttkvtk St£ptuvi, 7cr.fXî-'fCv KzotCâi ; xKToi/ïi^w ; Ta TTaf'îtiroO -p', 7 ! c/€iv tôv Upu/ib'.v, / » K

[jlï ; uKT « toi aÙTw ytvïirat rs ttts’jÎ/ ; — De sacerdotio, lïf ir-iv, p. G., XLVIII, 635).

Dans cette page si belle et sous cette métaphore classique du langage médical, on reconnaît, à n’en pas douter, le rôle et les fonctions du confesseur : les remèdes indiqués sont ceux qui, dans le style de l'époque, caractérisent le régime pénitentiel : lier, rællre à la diète, brûler, couper, l'évêque fait tout cela quand, en vertu du pouvoir sacerdotal, il retranche du corps des lidèles, il impose des jeûnes, il exclut de la table de communion et de la participation aux rites comiilets de la liturgie. Cette corresjïondance entre les peines et les péchés, qu’il faut se garder de maintenir trop rigide, c’est évidemment un canon pénitentiel analogue à ceux que nous font connaître saint Basile et saint Grégoire de Nysse. La latitude enfin laissée au médecin dans l’application des remèdes est caractéristique des fonctions du pénitencier et l’on peut donc s'étonner que le caraclèrc l>éniteulicl de ce trailement du péché ait été mis en iloute (Voir notre article Saint Jean Chrysostomc et la confession, H. S /^., I (191 1), p. 235 sqq.).

63. — D’autant plus i]ue celle connaissance du mal par celui qui a charge de l’appliquer est précisément ce qui le distingue de cet autre traitement du péché par la prière et la prédication, avec lequel on s’obstine parfois à le confondre. En chaire, en effet, le prêtre est également médecin. Mais, et c’est la dififérence, son intervention alors n’a pour but que d’indiquer et de faire connaître les remèdes ; il ne les applique pas ; le choix en est laissé à l’auditeur.

Dans les autres cliniques, les plaies passent sou » un grand nombre de regards. I, e médecin n’applique pas de rt-niède sans avoii' d’abord découvort la blessure. Ici, rien do pareil.- les malades si nombreux qui eonl la sous nos ye « x, nous les traitons sans les connaître {>cr.116c.iic’jTuii TratOjjiiSv. ty.j 610 : <Tiuv.v a : jT71-j). Nous leur proposons à tous la même dooIrine et nous laissons à la conscience de chacun le soin de trouver le remède approprié à son mal. Le prédicateur, en effet, lance sa parole : elle va, faisant l'éiog’e de la vertu, dénonçant le vice, etc. ; c’est comme un remt-de aux vertus multiples, composé d'éléments de toute sorte ; mais a chacun des auditeurs d y prendre ce qui lui convient et lui fera du bien (te hi "np^^^opov ly.urw zy.î ^^cïî'rr/o I. « Cîtv ix-diroj t61v yjizjijvz'^y £Trt'..-).

La caractéristique, en un mot, de ce traitement du péché par la prédication, c’est qu’il n’exige pas la manifestation des blessures. Et cette circonstance, ' bien loin d’empêcher ou de compromettre la guérison, la favorise. Il y a tout profil pour les malades à n'être pas connus, et le médecin se félicite des cures obtenues à son insu (Homélie : Quod non opurteat peccata fratrum evulgare : 3-4, P. G., LI, 356-35^).

Il n’y a donc pas à en douter, les responsabilités qui firent reculer d’abord devant le sacerdoce le futur Chrysostome, sont bien celles du confesseur.

64. — Cependant ces mêmes responsabilités, son histoire nous apprend avec quelle intrépidité il les sut assumer ensuite à Gonstanlinupie. Certains de ses ennemis lui reprochèrent sou ( mpressemenl à accueillir les pécheurs : » Il encourage à pécher », portait l’acte d’accusation dressé contre lui au conci le du Chêne. « S’il vous arrive de pécher une seconde fois, euseigne-t-il, faites pénitence une seconde fois ; chaque fois que vous aurez péché, venez me trouver et je vous guérirai » (Résumé des actes du concile par Photius, Biblioth., cod., Lix, P. G., CIII, iia A). Dès le début de son épiscopat, l'évêque novatien de Gonstantinople, Sisinnius, avait de même pris prétexte d’une de ses paroles pour dénoncer au public ce qu’il appelait un nouveau relâchement de la discipline pénitenlielle. « Mille fois, s’il le faut, aurait