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PENITENCE

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Il y a là cependant une méprise grave sur les origines de la religion nouvelle. C’est oublier que le CUrist a fait profession de n’être lui-mèiue (lu’un aboutissement, de ne faire que donner leur couronnement à des institutions ébauchées dans l’A. T., de songer moins à créer qu’à parfaire, à innover qu’à transformer. Les ablutions, les onctions, les impositions des mains, le matériel de tous ces rites auxquels il a conféré l’ellicacité proprement sacramentelle, étaient d’un usage courant avant lui et autour de lui ; il n’y a pas jusqu’à la Gène juive qu’il ne se soit borné à transfigurer pour en faire l’Eucharistie.

16. — Or le recours aux prêtres pour la purilication de l’àme, pour la rémission des péchés, n’était pas moins traditionnel. Il est prescrit tout au long dans la loi de Moïse : qu’il s’agisse dune souillure légale contractée par inadvertance ou d’une faute morale engageant plus ou moins la conscience ; que le péché ou le délit ainsi commis soit le fait d’un prêtre, d’un chef, d’un particulier ou de la collectivité elle-même, le Lévitique (iv.v.vi) prescrit que l’expiation en soit faite par le prêtre.

Il y a plus. Tout sacrilice n pour le délit » ou n pour le péché » s’accompagne d’une confession de la faute. S’il s’agit des fautes du peuple lui-même, la confession en est faite par les « anciens de l’assemblée » (iv, 13-15) ou parle prêtre lui-même (xvi, 21) : sauf le cas d’expiation pour la violation d’un précepte détermine, la confession est alors toute générale : elle porte sur toutes les iniquités des enfants d’Israël et toutes leurs transgressions. Mais, si c’est un particulier qui demande « l’expiation pour le péché », c’est à lui qu’il appartient de faire connaître sa faute. » Celui qui se sera rendu coupable de l’une de ces trois choses [refus de témoignage, contacts impurs, serments inconsidérés], confessera ce en quoi il a péché ; puis il amènera à lahweh, pour le tort qu’il lui a fait par son péché, une femelle de menu bétail, brebis ou chèvre, et le prêtre fera pour lui l’expiation du péché » (v, 5-fi). Cette confession, il est vrai, le texte ne ditpas explicitement et directement qu’elle doive être faite au prêtre sacrificateur ; mais un passage parallèle ne permet pas d’en douter : c’est au prêtre, y est-il dit pour un cas de même nature, qu’il appartient d’apprécier la valeur de la victime olTerte pour l’expiation et de juger si elle est proportionnée à la gravité de la faute. « Si quelqu’un pèche, dit Dieu à Moïse, et commet une inlidélilé envers lahweh, en déniant au prochain un dépôt, un gage, une chose injustement appropriée ou ravie avec violence, une chose perdue et qu’il a trouvée, il olfrira [après restitution] un sacrilice deréparation. Il amènera au prêtre, pour être oITerl à lahweh en sacrilice de réparation, un bélier sans défaut, pris du troupeau, et ci après son estimation du délit » (vi, 6). L’estimation du délit est faite manifestement par le prêtre auquel est présentée la victime de réparation ; c’est à lui d’apprécier si la valeur en est sudlsante et son jugement suppose donc, de tinte néces<ilé. qu’il a reçu cet aveu de la faute à expier que mentionne le v. 5 du ch. V et que le livre des yomhres, à propos de ces mêmes péchés contre le prochain, demande lui aussi explicitement (v, )).

.Vu reste, la chose va de soi, et ce même passage du livre des iomlirese montre bien. A la prescription de la restitution il ajoute en efTet l’observation suivante : « Si celui [qui a été lésé] n’a pas de représentant à qui puisseêtre rendu l’objet du délit, cet objet revient à lahweh, au prêtre, outre le bélier avec lequel il fera l’expiation pour le coupable » (v, 8). Ainsi appelé à recevoir, en cas de dis parition du propriétaire, l’objet volé ou injustement retenu, le prêtre sacrificateur peut-il n’avoir pas reçu du coupable l’aveu de son vol ?

Et il en est de même pour toutes ces impuretés légales, même de l’ordre le plus intime, dont il faut lui demander l’expiation (/.et’., xv). « Le huitième jour, est-il dit de l’homme (14-15), ayant pris deux tourterelles ou deux jeunes pigeons, il se présentera devant lahweh, à l’entrée de la tente de réunion, et il les donnera au prêtre. Le prêtre les olfrira l’un en sacrifice pour le péché, l’autre en holocauste, et il fera pour lui l’expiation devant lahweh, à cause de son llux. u — Cf. ag-So, pour la femme. — Ces sortes de sacrifices sont-ils concevables sans que le motif en soit révélé au prêtre ? Et la confession catholique devait-elle donc demander des aveux d’ordre beaucoup plus intime ? A qui avait été assujetti à la loi de Moïse, la loi du Christ sur la confession du péché pouvait-elle paraître si onéreuse ?

17. — Or il n’est pas douteux que l’usage de ces’c sacrifices pour le péché » ne persistât à l’époque du Christ. Les historiens croient même constater alors parmi le jieuple juif comme une recrudescence du sentiment du péché et de la préoccupation de s’en purifier (ScuuKaBR : tieschichte des /ûdischen Volkes im Zeitalter Jesii Cliristi^, t. II, p. 3b-)-fi-îo ; LAcnANGB : Le Messianisme chez les Juifs 1. III, ch.A’ ; W. BoussET : Die Religion des Judentunis im neutestamenthciien Zeitalter, p. 446)- Josèphb, eu tout cas, mentionne en propres termes, comme continuant à s’olTrir pour les péchés secrets, ce sacrifice du bélier dont nous avons vu le Léviti(]ue réserver l’estimation au prêtre sacrificateur. « Celui qui pêche et en a conscience, mais sans que personne puisse l’en convaincre, offre un bélier, suivant le précepte de la Loi, et le.^ prêtres en mangent les viandes ce jour-là-mênie dans le temple » (Aiitiq. jud., III, IX, 3). L’offrande aussi dont parle saint Luc à propos de la purification de la mère du Christ est une offrande expiatoire : des deux pigeons offerts, conformément à la Loi. « l’un est pour l’holocauste, l’autre pour le sacrifice pour le péché » (Lev., XII, 8).

Il n’est donc pas étonnant, étant donnés ces usages et cet état d’esprit, que saint Jean Baptiste, en prèch, ant le baptême de la pénitence pour la rémission des péchés, se soittronvé par là même en prêcher la confession. D’eux-mêmes, ceux qui couraient se faire baptiser par lui confessaient leurs péchés (Marc, I, 5 el paraît.), La rémission, à leurs yeux, en exigeait la confession, et la connexion que nous voyons ainsi établie dans l’esprit des auditeurs de Jean Baptiste nous aide à comprendre que les auditeurs du Christ l’aient également perçue dans se^ paroles sur le pouvoir de remettre les péchés. Il est vrai qu’on ne saurait déterminer exactement la nature de la confession faite lors du baptême au Jourdain. Trktui-libn (Dehaplismo, xx), saintBASiLE (fief ;. hrer., 288, P. fi., XXXI, 1286) et d’autres semblent y avoir vu une confession détaillée s’adressant au Baptiste lui-même. « Ils commençaient, explique à / ses catéchumènes saint Cyrille on Jérusalem, par lui montrer leurs plaies, puis lui y appliquait les remèdes et il leur procurait enfin la délivrance du feu éternel » (Catech., iii, 7, P. G., XXXllI, Iti-}). L’auteur d’une homélie sur le baptême de N. S., faussement attribuée à saint Ilippolyte (Ei ; t « c/.yty. dt’jfvMiK, IV, éd..Vchelis, p. 25g)nousmontre comment on se la représentait au iv* ou au v’siècle (date présumée de l’homélie), a Je donne le baptême de la pénitence, y fait-on dire au Christ par saint Jean : ceux qui viennent à moi, il ne m’est possible de les baptiser qu’autant qu’ils confessent leurs péchés.