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MARIE, MERE DE DIEU

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dans l’acte même de son enfantement. Ailleurs, il va plus loin, et atlirnie qu’après avoir donné naissance à Jésus, Marie connut un époux. Il semble bien que, aux yeux de Tertullien, les « frères de Jésus » sont des iils de Marie ; De carne Christi, vu ; IV Adv. Marcionem, xix ; cf. De virginibus velandis, w ; De morwatnia, viii. Donc, s’il est très ferme sur la virginité ante partunij par contre il ne voit aucun inconvénient à abandonner la virginité in parla et la virginité pose partum. Sur ces deux points, un démenti catégorique lui sera donné ultérieurement par renseignement de l’Eglise.

Nous traduirons quelques pages caractéristiques du De carne Christi (texte de Œhler), laissant toutefois de côlé des passages très crus et particulièrement déplaisants en un tel sujet. — Nous renverrons à notre Théologie de Tertullien, p. ujS-ig^, Paris, 1905.

De carne Christi, xvii, xviii, xx, xxi, xxiii.

XVII… Avant tout, il faut mettre en lumière la raison pour laquelle il convenait que le Fils de Dieu naquît d’une vier^^e. Il devait naître d’une façon nouvelle, celui qui devait inaugurer une naissance nouvelle, le Seigneur, objet du signe prédit par Isaie. Quel est ce signe ? Voici qu’une vierge concevra dans son sein et enfantera un fils. Dune la vierge conçut et enfanta Emmanuel, Dieu avec nous. Voilà une naissance nouvelle : un homme nait en Dieu. Dans cet homme, Dieu est né, prenant la chair de l’antique semence, mais sans l’antique semence, afin de la réformer par une semence nouvelle, spirituellement, en l’alTranchissanl des antiques souillures. Mais toute cette nouveauté, comme tant d’autres, avait sa figure dans l’antiquité ; un plan raisonnable présidait à la naissance de l’Homme-Dieu par une vierge. La terre était vierge, elle n’avait pas senti l’effort du laboureur, elle ne s’était pas ouverte à la semence, quand Dieu la prit et en fit un homme, âme vivante. Si telle est la tradition relative au premier homme, il convenait que le suivant, le dernier Adam, comme dit l’Apôtre, fut tiré d’une terre — c’est-à-dire d une chair — non encore ouverte par la génération, et élevé par Dieu au ranjj ; ’d’Esprit vivifiant. Gôpen dant — pour ne pas laisser passer ici le nom d’Adam — d’où vient que le Christ fut appelé, par TApôtre, Adam, si son humanité n’était pas d’origine terrestre ? Ici, la raison proteste que Dieu, pour reconquérir sur le diahle son image et ressemblance, prit le contrepi’?d de la conquête. Eve encore vierge avait laissé pénétrer en elle la parole, ouvrière de mort. Il fallait que pénétrât aussi dans une vierge la parole ouvrière de vie, afin que le sexe auteur de rentraînement vers la ruine, fut aussi l’auteur du salut. Eve avait cru au serpent ; Marie crut à Gabriel. La faute qu’Eve commit par sa croyance, Marie, par sa croyance, la répara. Mais [dirat-on ] Eve ne conçut rien alors par la parole du serpent — Erreur. Si elle enfante désormais dans l’abjection et dans les douleurs, c’est à cause de la semence qu’est la parole du diable. Enfin elle mit au jour un diable fratricide. Au contraire, Marie a mis au jour Celui qui devait, en son temps, sauver Israël, son frcre selon la chair et auteur de sa mort. Donc Dieu fit descendre dans le sein [de Marie] son Verbe, bon frère, pour anéantir la mémoire du mauvais frère. Le Christ devait sortir, pour sauver l’homme, d’où l’homme était entré déjà condamné.

xviii. Mais répondons plus simplement : il ne convenait pas que le Eils de Dieu naquit d’un homme, de peur que, s’il était tout entier Fils de l homme, il ne fût plus Fils de Dieu, et n’eut rien de plus que Salomon ou que Jonas, comme l’a prétendu f’^bion…

XX (Sur Mnff, , i, 20). Par quel procédé tortueux prétendez-vous retrancher la syllabe de [ex), qui fait oflice de préposition, et la remplacer par une autre qu’on ne trouve pas remplissant ce rôle dans l’Ecriture sainte ? Vous dites qu’il -est né par iprr) la vier^^e, ot dans le sein (in), non du sein, parce que ran ; re même a dit à Joseph dans un songe : « Ce qui est né en elle, c^t de l’Esprit saint », et non ; « Ce qui est né d’elle ". Apri’S tout, il n’a pu dire : d’elle, sans par là même dire en elle ; car cela seul qui était en elle, a pu naitre d’elle. Donc c est tout un de dire : en elle et d elle, car ce qui était en elle était d’elle. Heureusement, le métne Matthieu. .parcourant la (çénéalogie du Seigneur, d’Abraham jusqu’à Marie, dit (i, ifi) : k Jacob engendra Joseph, époux de.Marie,

Tome m.

de qui nait le Christ. » A son tour, Paul impose silence à ces

grammairiens, en disant [Gal., iv, k) : " Dieu envoya son Fils, fait d’une femme. » A-t-il dit : <f par une femme », ou

« dans une femme »’? Remarquez commo il tranche le mot.

en disant : fait^ et non pas né. Il était plus simple de dire : né. En disant : fatt^ il a marqué Tmcarnalion du Verbe et aûirmé la vérité de la chair née de la vierge. Ici nous invoquerons encore les psaumes, non pas de l’apostat et hérétique et [datonicien Valentin, mais du très saint et très orthodoxe prophète David. David chante parmi nous le Christ, ou plutôt le Christ même se chante par lui. Prêtez l’oreille au Christ et entendez le Seigneur dire à Dieu son Père (l*s. xxi. 10. 11) : « C’est vous qui m’avez tiré du sein do ma inere. » Et encore : « Vous êtes mon espoir depuis les mamelles de ma mère, je fus jeté en vous au sortir de ses entrailles »… XXI (Sur Mait.^ I, 23) …Serrons l’euneini de plus près. L’Ecriture dit : « Voici qu’une vierge concevra dans son sein. » Et quoi ? Sans doute. Le Verbe de Dieu, non la semence d’un homme ; cela, pour enfanter un fils. Car « elle enfantera un fils ». Comme la conception fut son fait, de même l’enfantement, bien qu’elle ne fut pas cause de la conception. Au contraire, si le V’^erbe s’est incarné de lui-même, il s’est lui-même conçu et enfanté ; et c’en est fait de la prophétie. Car la vierge n’a pas conçu ni enfanté, s’il n’est pas vrai de dire que ce qu’elle enfanta, après avoir conçu le Verbe, est sa propre chair. Et c’en serait fait, non seulement de cette parole du prophète, mais de celle de l’ange, annonçant la conception et l’enfantement de la vierge, et de toute Ecriture qui parle de la mère du Christ. En effet, comment est-elle sa mère, si ce n’est pour l’avoir p -rté dans son sein ? Mais il ne doit rien au sein qui l’a porté, rien qui assure le nom de mère à celle qui l’a porté ? Car ce nom n’est pas du par une chair étrangère. Il n’y a à nommer le sein maternel que la chair fille de ce sein. Et celle-là n’est pas fille qui est née à part. Donc silence à Elisabeth, portant un (ils prophète qui déjà connaît son Seigneur, et remplie elle-même de l’Esprit saint ! Elle se trompe en disant : < D’où m arrive cet honneur, que la mère de mon Seigneur vienne à moi.^ » Si Marie portait Jésus dans son sein non comme un fils, mais comme un liùte, comment Elis. theth lui dit-elle : « Béni le fruit d i votre sein ? » Qu’est-ce que le fruit du sein, s’il n’a germé du sein, pris racine dans le sein, s il n’appartient pas à colle qui possède le sein ; et comnænt le Christ est-il fruit du sein (de la vierge) ? Osera-t-on dire : il est la fleur de la tige issue de la racine de Jessé ; or la racine de Jossé est la rare de David, la tige issue de la racine est Marie fille de David, la fleur de la tige est le fils de Marie appelé Jésus-Christ : il est encore le fruit, car la fleur et le fruit ne font qu’un, vu que par la fleur et de la fleur tout fruit passe à l’état de fruit ? Quoi donc ? On refuse au fruit sa fleur, à la fleur sa tige, à la tige sa racine ; on ne veut pas que la racine revfmdique. par la lige, la propriété de la fleur et du fruit sortis de la tige : on doit pourtant savoir que chaque degré de la race se réclame du premier ; en sorte que la chair du Glirist se rattache, non seulement à Marie, mais à David par Marie et à.lessé par David. C’est pourquoi Dieu jure à David que ce fruit de son corps, c’est-à-dire de sa postérité nharnelle, siégera sur son trône. S’il procède du corps de David, combien plus du cor|13 de Marie, par qui il fut contenu dans le corps de David ?

Qu’ils effacent donc les témoignages des démons, proclamant Jésus fils de David ; mais ils ne pourront *>ff ; Ker les témoignages des Apôtres, si ceux des démons ne sont pas recevables. Tout d’abord Matthieu, très fidèle évangéliste en sa qualité de compagnon du Seigneur, a voulu précisément nous livrer l’origine du Christ selon la cliair en débutant ainsi : Livre de la génération de Jésus-Christ, fils de David, fils d Abraham… Matt., i. i ; cf. Rom..-. 3., II 7V/h., II, 8 ; Ga}., ni, 8. iG.

xxrii (Sur A.Hr., ii, 31). Nous voyons s’accomplir la parole prophétique de Siméon sur le Seigneur encore tout petit enfant : " Celui-ci est posé pour la ruine et la résurrection de beaucoup en Israël et comme signe de contradiction. » En effet, la naissance du Christ est un signe, selon Isaïo :

« C’est pourquoi le Seigneur lui-même vous donnera un

signe : voici qu’une vierge concevra dans son sein et enfantera un fils. » Mous reconnaissons le signe de contradiction, dans la conception et l’enfantement de la’irrge Marie, livrés aux disputes de ces Académiciens ; « Elle a enfanté et n’a pas enfanté, elle est vierge et non vierge. « Ce langage, s il était correct, nous appartiendrait plutôt. En effet. Marie a enfanté de sa chair, et elle n’a pas enfanté par le commerce d’un homme. Elle est vierge en tant qu’épouse ; elle ne l’est plus eu tant que mère. Toutefois, si elle n’a pas enfanté, si