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PAUVRES (LES) ET L’ÉGLISE

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LIPPE HuRAULT, cornle de Clieferny, Chancelier de France, même coUect., t. XXXVl ; Chronique septénaire de Palma Cayet, 1. Il de la II" Partie). On sait quelle misère régnait également tandis qn Henri IV essayaitLieconquérirsonroyanmeelcombien il s’atTectait de voir les tristes résultat » de la guerre civile ; il soulageait les pauvres le plus possible et, même pendant le siège de Paris, laissait passer des convois de pain destinés à ravitailler sa capitale. Pendant tout son règne, il devait se souvenir des horreurs des guerres de religion, et parce qu’il avait compris que i< s’il ne se faisait catliolique il n’y avait plus de France », il sut travailler à l’union des Français, se faire aimer des petits et des pauvres qu’il eût voulu voir mettre la poule au pot tous les dimanches, et laissa ainsi dans la mémoire despeuples la réputation d’un grand roi.

VIII. — lie Concile de Trente et la Réforme catholique. — L’Eglise et la Charité au XVII’siècle. — i" L’action du Concile. — Au milieu des troubles de toutes sortes causés par l’invasion du Protestantisme, c’est la gloire de l’Eglise catholique de s’être réformée elle-même, grâce au Concile de Trente. L’attention des Pères du Concile se porte sur tous les abus, et des règles précises sont édictées aA ec les sanctions nécessaires pour ramener l’ordre. Les établissements hospitaliers ne pouvaient échappera la vigilance des réformateurs catholiques, qui rappel lent à ceux qui seraient tentés de les oublier les traditions des premiers siècles de l’Eglise et affirment contre les Protestants l’impérieuse nécessité des œuvres. Les évêques sont tenus » de paître leur troupeau en lui donnant l’exemple de toutes les bonnes œuvres, et de prendre un soin paternel des pauvres et de toutes les autres personnes malheureuses, bonorum omnium operum exemplo puscere, pauperum aliarumque miserabilinm personarum ciiram palernam gerere » (Sess. xxiii, Decret.de Heform. cap, i). Ceux qui possèdent des bénéfices séculiers ou réguliers sont tenus d’exercer avec zèle les devoirs de l’hospitalité, selon leurs revenus. Les commendataires d’hôpitaux ou d’asiles pour les pèlerins ou les malades doivent s’acquitter exactement des charges inhérentes à leur commende et « les ordinaires des lieux auront soin que tous les hôpitaux en général soient bien et fidèlement gouvernés par les administrateurs, de quelque nom qu’ils soient appelés et de quelque manière qu’ils soient exempts » (Sess. xxii, Décret, de Beforni. cap. 8 et Sess. vii, cap. 15). « Que si les hôpitaux créés pour recevoir une espèce déterminée de pèlerins, de malades oud’autres personnes, n’ont plus de pensionnaires ou trop peu, le concile ordonne de convertir les revenus des fondations en quelque autre pieux usage qui se rapprochera le plus possible du but primitif ; il appartiendrai l’ordinaire, avec deux membres expérimentés du chapitre, de prendre les mesures les plus appropriées » (Sess. XXV, Décret, de lieform. cap. 8). Enlin les évêques doivent visiter les hôpitaux, se faire rendre des comptes parles administrateurs, et si ceux-ci ont prévariqué, ils doivent restituer les revenus indûment perçus et peuvent être frappés de censures ecclésiastiques. Aûn d’éviter l’abus des bénélices, l’adminislrateur doit être renouvelé tous les trois ans, à moins de dispositions contraires dans l’acte de fondation.

2° Les nouvelles congrégations hospitalières et les nouveaux hôpitaux, — Sous l’impulsion du Concile de Trente, un magnifique mouvement de renaissance catholique fit sentir ses heureux effets dans tous les domaines, et principalement dans celui de la

charité. La Compagnie de Jésus, créée spécialement pour lutter contre les Protestants et étendre les conquêtes spirituelles de l’Eglise romaine, joua dans cemouveineiit un rôle très considérable, sinon prédominant ; bien que spécialisée dans le ministère de la prédication et de l’enseignement, ou si l’on veut les missions et les collèges, elle se signala aussi — nous le dirons [ilus loin — dans l’apostolat charitable. Mais pour entretenir dans les âmes le (eu sacré de la charité envers les pauvres, la Providence suscita des congrégations nouvelles, ayant pour but exclusif le soin des pauvres malades. Leur succès et leur popularité, après trois siècles, sont tels qu’il suffit de prononcer leur nom pour provoquer le respect ; car elles sont restées si fidèles à l’esprit des fondateurs qu’aucune réforme ne fut jamais nécessaire parmi leurs membres.

C’est d’abord la congrégation fondée en Espagne en même temps que l’Hôpital de Grenade entre 1540 et 1550 par le Portugais Jean Cildad, bien vite connu sous le nom de Jean db Dieu, tant son héroïque charité pour les pauvres faisait éclater sa vertu. Placée par saint Pie V sous la règle de saint Augustin (b’)), confirmée par Sixte-Quint, elle est soustraite à la juridiction des évêques par Paul V en 1619 et éri gée en ordre proprement dit. Les Frères, que l’on appelle bientôt en Italie J<’ale ien Fratelli (d’une parole que criait dans les rues de Grenade le fondateur en demandant l’aumône pour ses pauvres :

« Faites-vous du bien à vous-mêmes, mes frères »), en

Espagne i-Vère-s de l’Hospitalité, en France Frères de la Charité, prononcent les trois vaux de pauvreté, d’obéissance et de chasteté, auxquels ils ajoutent celui de soigner les malades, « c /) ; ae(erea quortum de juvundis in/irmis, dit le Bref de Paul V, du 13 février 1617. Ils portent une « robe de drap brun, avec un scapulaire de même couleur et un capuce rond, la tunique ou robe étant serrée d’une ceinture de cuir noir. Ils n’ont que des chemises de serge et ne couchent que dans des draps de serge ». Les armes de l’Ordre sont d’azur à une grenade d’or surmontée d’une croix de même, l’écu timbré d’une couronne (HÉLYOT, Hist. des Ordres monastiques, IV, p. 146. L. Saglibh, Vie de S. Jean de Z>ieu, Paris, 1877).

La renommée des Frères de saint Jean de Dieu s’étend bientôt, et l’Espagne, le Portugal, l’Italie, l’Allemagne, la Hongrie, puis la France et même l’Amérique se couvrent de 300 hôpitaux dirigés et desservis par eux. En France, Marie de Médicis avait fait venir à Paris en 1601 les Frères de la Charité ; elle avait été témoin à Florence de leur zèle pour le soulagement des malades, et les installa au faubourg Saint-Germain, rue des Saint-Pères C’est X’Hôpltal de la Charité d’aujourd’hui. Paris eut dans les fils de saint Jean de Dieu ses Frères de la Charité, comme il allait avoir dans les (illes de saint Vincent de Paul ses Sœurs de Charité. Cette maison contenait 60 religieux, qui donnaient leurs soins à un grand nombre de malades, et comme Henri IV, par lettres patentes de 1602, leur permettait,

« d’ordonner, faire construire et édilier des

hôpitaux et iceux régler et faire desservir et administrer par les formes, règles, statuts prescrits par l’institution d’icelle congrégation j>, ils eurent bientôt vingt-quatre hôpitaux dans le royaume au XVII siècle, et ils en comptaient trente-huit à la veille de la Révolution.

« Ils sont très savants es remèdes de toutes maladies, 

écrit un contemporain, Palma Cavet ; ils sont hospitaliers, non seulement pour héberger les passants, mais aussi les malades, même de maladies dangereuses, les panser eux-mêmes de leurs mains,