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MARIE, MKRE DE DIEU

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naUirelleinent à l’esprit, et plusieurs Pères l’ont aflniise, depuis saint Justin, Dial., lxxviii. jusqu’à saint Ambroisb, De institutione rirginis, v, 31j, P.L., XVI, 315, et à saint Augustin, Serm., ii, 6, tj, P. L., XXXVIII, 338. On sait que la Loi condamnait à la lapidation l’épouse adultère, Dent., xxii, 2/1. Mais d’autres préfèrent s’arrêter à une hj’polhèsc plus honorable pour Joseph aussi bien que pour Marie. En présence d’un fait qui le dépasse, Joseph s’incline sans comprendre et se tient prêt à admettre toute explication qui sauve l’honneur de Marie. Par ailleurs, il juge que sa place n’est pas avec elle puisqu’il n’a aucun droit de père, et accepte d’avance le plus douloureux sacrifice. Dans sa détresse, il se tourne vers Dieu, et Dieu lui parle par un ange, comme il a parlé à Marie. Saint Jiinô.MH indique déjà cette solution en termes excellents, ! n Mail., I, 11, P. L-, XXVI, 24 G :.Serf hnc testimonium Mariæ est, quod Iofeph, sciens illiiis castitalem et admirans qunæyenerat, celai silentiu ciiiiis mysteiiitm nesciehat. Et Alrrrt le Grand : Sicut iustus cogitai’it dimiltere, sicut pins disposiiit non accusare, et sicnt sapiens volnit id facere occulte, quia hoc fuit tutius quodconsilio humano poterat invenire.

Le message de l’ange ne présente aucune ambiguïté : que Joseph ne craigne pas d’introduire dans sa maison (7rr/3K/a£eiv) son épouse ; qu’il remplisse les devoirs d’un chef de famille, et en exerce le <lroiten donnant à l’enfant un nom, le nom symbolique déjà révélé à Marie. L’évangcliste, qui vient d’affirmer si nettement que Marie a conçu par la vertu du Saint Esprit, n’hésite pas à l’appeler ici épouse (yyj’Axrj.) de Joseph, car, malgré la loi de respect que les deux l’poux se sont prescrite d’un commun acconl, leur union est un vrai mariage. Nous avons entendu saint Augustin l’affirmer, en revendiquant pour Joseph le nom de père de Jésus, De consinsn evangelistarnm, II, I, 2. Il serrera de plusprès la question présente, en montrant dans l’union de Joseph avec Marie les trois biens essentiels du mariage ; Contra Inlianum Pelagiannin.Y, xii, ^6, P. L., XLIV, 810 : fn illo quod secundum Evangelium coningium nuncupavi, omnia tria bona nuptiarum dixi esse compléta : fidem, quia nutlum adutterium : prolem, ipsum Dominum Christuni : sacramentam, quia nullum divortium. L’enseignement du docteur d’Hippone a fixé sur ce point les hésitations de la théologie catholique. D’autre part, nous verrons l’évangéliste saint Luc, par égard pour la sainteté de ce mariage, ramener encore, à une date ultérieure, l’expression qui a servi à lui-même et à saIntMattliieu (i, 18) pour désigner les fiançailles de la vierge. En abordant le récit de l’Annonciation, saint Luc parlait de la vierge fiancée à Joseph, i, 27 : Tïvf.6évov’£ii-jT, 7rEJij.ivf, v y.v^pi ot cv^iiv.’lw7v ; y.Tout à l’heure, n, 5. il monlrera Joseph se mettant en route pour Bethléem, jùv Maptà^u tô £fj-vr^7Tiufj.iv/i v.ùrÇt, ^/jrn èy/.Oot. Il serait logique de traduire : avec Marie sa /lancée, qui était enceinte. Nul n’imaginera ici un conflit entre les évangélistes. Seulement, une touche exquise de langage, assimilant à une fiancée l’épouse de Joseph, rappelle discrètement le mystère dont le lecteur est averti.

Saint Matthieu fait expressément remarquer ici l’accomplissement de l’oracle d’Isaie sur l’Emmanuel ; pour la première fois, il use de cette formule : iw. (S-nui) n)Yiprj16r, ri’p.Sjv^ qui reviendra "iouvent dans son évangile (voir 11, 15-23 ; iv, il, ; viii, 17 ; xii, 17 ; xiii, 35 ; XXI. 4 ; de plus, onoi^ Tt/ïj^wô&jTtv « t Vpv.fv.i rûv tt/sî^ïjtSjv, XXVI, 5(j ; rcTE’l-n)rip’j}Or, TÔ’prflh, ii, 17 ; xxvii, g). Invitation à reconnaître à l’œuvre la même Providence divine qui, après avoir dicté l’oracle dans l’Ancien Testament, en procure l’accomplissement dans le Nouveau.

Ainsi l’oracle concernant la Vierge-mère est-il interprété en toute rigueur etappliqué expressément à la mère du Messie, par un texte inspiré. On sait que l’exégèse rabbinique avait entrevu le caractère merveilleux de la naissance du Messie. Le commentaire authentique de saint Matthieu fixe, aux yeux du chrétien, le sens de l’oracle d’Isaie ; l’exégèse catholique, et avec elle souvent l’exégèse protestante, a suivi la voie ouverte par l’évangéliste, en confessant la réalisation de la prophétie. L’exégèse incrédule devait naturellement protester ; elle rend souvent le

« contresens » des Septante responsable de l’éclosion

d’un mythe. On a vu plus haut que, si les Septante se sont portés spontanément à rendre’almah par nypOttioc, ils ne l’ont pas fait sans raison, et que ce premier mouvement était le bon. On n’en peut pas dire autant de la substitution tendancieuse opérée par la jeune exégèse des Aquila, des Symmaque, des Tbéodotion, lesquels écrivirent veSviç. Quant à la conviction de l’évangéliste, un croyant admettra volontiers qu’elle s’est formée sous l’assistance de l’Ksprit saint ; d’ailleurs il est facile d’en indiquer les considérants rationnels. Le nom expressif d’Emmanuel devait l’incliner à reconnaître dans cet oracle le Verbe incarné ; une tradition remontant à Marie et à Joseph — car il faut bien faire appel à leur témoignage — l’avait mis en possession de la donnée relative à la conception virginale. La traduction des Septante a pu lui apporter un surcroît de lumière, mais la nécessité de ce surcroit n’apparaît pas, pour l’évangéliste écrivant, à l’intention des fils d’Israël, son évangile araméen

Le témoignage de saint Matthieu, en faveur de la conception miraculeuse de Jésus, ne présente aucune ambiguïté ; mais, plus loin, l’évangile prononce une I>arole qui peut être tournée contre la croyance à la perpétuelle virginité de Marie, i, 26 : « (Joseph) ne connut point son épouse, jusqu’au temps où elle enfanta son fils [premier-né], n Tous ceux qui, depuis Hblvidius, ont prétendu qu’après la naissance de Jésus Marie donna le jour à d’autres enfants, n’ont pas manqué de citer ce texte ; et l’objection y trouve un point d’appui que ne lui offrait pas le verset 18 : car ce sont bien les relations conjugales que vise le mot V/iv !.jTzîv. — Bornons-nous, pour le moment, à ce qui est la substance de la réponse faite à Ilelvidius par saint Jbrômg : dire qu’avant la naissance de Jésus, Joseph ne connut point son épouse, n’est pas affirmer qu’il la connut après. A l’appui de cette réponse, on peut invoquer une foule d’exemples semblables. L’évangéliste a dit ce qui importait à son but, sans se préoccuper des interprétations abusives.

Le mot « premier-né » a donné prise à une objection presque identique. Comme il n’est pas sur que ce mot appartienne ici au texte de saint Matthieu (voir les variantes), nous réserverons la réponse pour l’examen d’un passage de saint Luc. où il se représente et où il est sûrement authentique (Luc, u.l).

Luc, ii, 1-7 :

Il adviiil qu’en ces jours -là parut un cditde César Augusteprescrivant de recenser toute laterro. Ce premier recensemont eut lieu alors que Oulrinius rtait f^ouverneur Je Syrie ; tous allaient se faire inscrire, chacun dans sa ville, Joseph aussi monta de GaliU-e. de la ville do Nazareth, en Judée, à la ville de David appelée Bellilcem. parce qu’il était de la maison et de la famille de David, pour se l’aire inscrire avec Marie, sa fiancée qui était encelnie. Or il advint que, pendant qu’ils étaient là, les jours de son enfantement furent accomplis ; elle enfanta son fils premier-né, l’enveloppa de Ian[ :  ; es et le coucha dans une crécne, parce qu’il n’y avait pas pour eux placo dans l’hôtoUerie.