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PAPAUTE

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de la puissance spirituelle, que l’on puisse atlai]uer

« sans contrevenir à l’enseignement de l’Eglise universelle

», et elle ajoute :

« Sire.., vous ne voulez pas gêner l’enseignement des

évètpies ; vous ne voulez qu’imposer silence sur tout ce qui vourruit fait r naître des conieslatinns ; muis tout ce que les évêques disent Je contraire aux prétentions injustes des parlements ne sera-t-îl pas regardé comme une occasion de troubles et de contestations P » Elle monli-e aussi combien les magistrats ont outrepassé la doctrine de 16H"J dont ils se réclament. Celle-ci rejetait le pouvoir indirect du Pape sur le temporel, pour établir V indépendance mit' tuelle tles deux puissances, chacune dans son ordre et sur son lerruin. Mais voici que les tribunaux civils détruisent cette mutuelle indépendance, et prétendent avoir pou voir indirect sur le spirituel, qu’ils envahissent (( Les tribunaux suivent aujourd’hui la même marclie f[U’iU ont réprouvée. C est par une suite de ce pouvoir indirect^qno les parlements ont prétendu être en droit d’examiner les jugements de l’Eglise (univei-selle), même avant la publication que les évêques pourraient en faire, comme, si les déciets de l’Eglise, ^ahlbles par eux-mêmes, pouvaient jamais avoir besoin de l’autorisation des princes pour lier les consciences ! » Picot, p. 205, sq.

Nous avons insisté sur cette assemblée de 1765, soit parce que c’est une des plus importantes et des plus honorables pour le clergé de France, soit parce qu’elle sut opposer avec netteté et force l’Infaillibilité de l’Eglise universelle à l’anti-infaillibilisme si outrancier des gouvernants d’alors. Elle comprenait la nécessité de l’union avec le chef de l’Eglise. Avant de se séparer, elle avait écrit une lettre au Pape, le suppliant de nommer une commission d'évêques qui étudieraient l'état des ordres religieux en France, et ap|)liqueraient ensuite les réformes, où besoin serait ; elle fit remettre au roi cette lettre avec prière de l’appuyer à Rome. Mais le roi, manœuvré par sa magistrature, s’en tint à l’idée de nommer sans la coopération du Saint-Siège une commission laïcoecelésiastique de son choix, tant pour déclarer délinitivement ce qu’il fallait penser des rapi)orts de l’Eglise et de l’Etat, que pour entreprendre la réforme des ordres religieux. La lettre de l’assemblée au Pape ne fut pas envoyée, comme le prouve un bref de Clément Xll ! , où il s'étonne de n’avoir appris que par la rumeur publique l’existence de cette commission de réforme ; Bullaire decePape, n. 56^. Nommée par un arrêt du conseil d’Etat, la commission royale comprenait cinq prélats, avec les d'.guesseau, les Joly de Fleury, etc. Sans tenir compte des recommandations du Pape, dont elle ne parla point, elle changea et tailla dans les divers instituts et même dans les canons généraux sur l'état religieux, révérés dans l’Eglise entière, et le fît avec autant de hardiesse que d’incompétence. De là sortit entin un édit du 25 mars 1768, plutôt fait pour détruire les ordres religieux que pour réformer ceux’qui en avaient besoin. Ou y déclarait nulle toute profession faite avant vingt et un ans. On y supprimait, sans recourir à l’autorité ecclésiastique, sans même consulter les évêques diocésains, les monastères non réunis avec d’autres en Congrégation, s’ils avaient moins de quinze religieux de chœur, outre le supérieur. Dans les communautés qui restaient, on relâchait singulièrement les liens sociaux, et l’on facilitait les sécularisations, de manière à inviter chacun à sortir de son état. Picot, p. 213. sq.

La désobéissance au roi, à laquelle nous avons vu s’exercer les parlements de France, prit en 1770, sur un terrain d’ailleurs purement politique, une allure si hardie et si violente, qu’elle attira l’exil à leurs membres, ainsi qu'à plusieurs seigneurs et princes qui les soutenaient, la disgrâce du ministre Choiseul, puis l'établissement de nouveaux tribunaux, connus

sous le nom de « parlement Maupeou ». A cette occasion, le roi lit cesser une criante injustice, qui, malgré les réclamations des assemblées du clergé, malgré même un édit royal, avait clé obstinément maintenue par l’ancien parlement : les prêtres bannis depuis 1756 pour refus de sacrements virent enlin cesser leur exil, et ce genre de persécution ne fut pas repris dans la suite. — Mais nous omettons ce revirement d’ordre politique, sur lequel s’acheva le déi)lorable règne de Louis XV.

L’attitude politico-religieuse du parlement de Paris et même de la haute magistrature, sous Louis XV, est le fait capital d’où dérive, en France et hors de France, tout ce qui nous resle à signaler dans l’histoire de l’infaillibilité, du côté des Etats.

C. L'écho, à l'étranger, des maximes parlementaires et de la crise ultragallicane sous Louis X’V. — Nous signalerons cette induence i’j)en Hollande, 2 ») en Russie, 3°) en Autriche et en Allemagne, 4") et surtout en Italie ?

1°) Hollande. — Le schisme des « Appelants », dont nous avons vu le parlement de Paris prendre la tète, donna lieu au schisme d’Utrecht. Sur cette origine, et sur les relations du schisme d’Utrecht avec les Papes jusqu'à nos jours, voir les informations de l’article Jansénisme, col. n84-1186.

2°) Russie. — Lorsque, sous la pression du parlement, la majorité de la Sorbonne prit parti pour les appelants (voir col. 1485), des Sorbonnistes entreprirent la fusion religieuse de l’Orient russe avec l’Occident latin sur le terrain de l’ultra-gallicanisme, d’ailleurs sans succès. Voir Gallicanisme, col. 281, et les documents dans Fébet, La faculté de théol. de Par/.î, Epoque moderne, t. VI, p. 33l sq.

30) Autriche et Allemagne. — Ce qui avait été essayé par des ultra-gallicans pour le schisme russe, le fut en quelque sorte pour le protestantisme par un.llemand, Honthkim, disciple à Louvain d’un canoniste célèbre mais égaré dans le jansénisme, V..N Esi’KN. Ce fut en efîetsous le prétexte de ramener plus facilement par des concessions les protestants à la véritable Eglise, que Nicolas de Hontheim, évêque auxiliaire de Trêves, publia en 1763, sous lejiseudonyme de <i Fébronius », un livre sur le Pape et l’Eglise, devenu fameux.

Le Cl fébronlanisme », qui n'était ((uc l'échodu gallicanisme le plus avancé, se répandit de plus en plus dans l’empire. L’université de Vienne imposa dès 1769 à tous les aspirants au doctorat de soutenir non seulement les quatre articles de 168'i, mais encore les principes extrêmes des appelants français et hollandais : voir Gallicanisme, col. 281. Cf. Picot, t. V, p. 140, sq. Sur la consultation demandée à la Sorbonne en 1786 par l'évêque de Freisingen en Bavière, à propos des énormités d’un théologien de son diocèse contre les prérogatives du Pape, voir Fkret, loc. cit., p. 164, sq. — Sur la Ponctatiun d’Etns en 1786, où des évêques allemands très influents traitaient le Pape d' « Evêque étranger », voir Gallicanisme, col. 282 ; et Ghknon, dans l'/Iist. générale de La%'isse et liambaud, 1896, t. VII, ch. xvii, p. 835, sq. Cf. Picot, p. 287 sq. Voilà pour les milieux ecclésiastiques. — Quant au pouvoir civil, déjà sous M.RiE Thérèse le fcbronianisræ d’EvBEL, professeur à l’Université de Vienne, qui fut condamné plus tard par un bref de Pie VI (D. B., 1500), inspira des réformes imitées de celles des parlements français ou de la haute magistrature du Conseil de Louis XV : comme de subordonner au plucet royal la publication des bulles et brefs du pape, d’interdire et la profession religieuse avant vingt-quatre ans, et l’augmentation du nombre des monastères.