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PAPAUTE

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d’intervenir dans une question qu’il estimait trancliée par l’Evangile. Firmilien de Césarée ne le comprit pas davantage et, dans sa lettre à Cyprien, s’emporta violemment contre le successeur de Pierre — l'évoque de Home avait à ses yeux ce litre indiscutable, — si oublieux de son devoir. Ep., Lxxv, 16-17, p. 820-821.

Faut-il conclure à une évolution dans la pensée théorique de Cyprien à l'égard du siège de Home ? On l’a fait quelquefois ; on a même cru pouvoir jalonner cette évolution avec une précision inquiétante. Voir Otto KiTSCHL, Cyprian ton Kartliago uiul die Verfassiing der Kirche, GOttingen, 1885.

Telle ne sera pas notre conclusion. A toutes les étai)es de sa carrière, Cyprien manifeste les mêmes convictions très fermes, avec les mêmes lacunes. Les circonstances devaient amener ces lacunes à se révéler, dans une crise qui fut pour lui singulièrement douloureuse. Le christianisme africain retardait un peu sur la doctrine dès lors claire à Rome et en d’autres points de l’Eglise ; on pourrait parler d’un (1 africanisme », non dépourvu d’analogie avec le futur gallicanisme. Le temps devait emporter cela. Ce qui ressort clairement de la crise baptismale, c’est, en même temps que la sincérité de Cyprien, la conscience qu’avait le pape Etienne, et l’Eglise avec lui, d’un droit supérieur inhérent au siège de Pierre.

L’importance de controverses qui s'éternisent autour de saint Cyprien nous excusera peut-être d’avoir donné à cet épisode un développement disproportionné à l’ensemble de l’histoire où il se détache.

Au milieu du troisième siècle, trois sièges patriarcaux dominent l’Eglise chrétienne : Rome, Antioche Alexandrie, avec une déférence marquée d’Alexandrie et d’Antioche à l'égard de Rome.

Les relations de l’Eglise d’Alexandrie avec celle de Rome, au cours des deux premiers siècles, échappent à l’hisloii-e. Nous savons qu’Origène, condamné dans Alexandrie, écrivit, pour se justiûer, au pape Fabien (236-ïâo) et à d’autres chefs d’Eglises. Voir EusÈBE, //. /.'., VI, XXXVI, P. G., XX, 597. Un peu plus tard, la querelle baptismale eut son contre-coup en Egypte. Saint Dknys d’Alexandrie (289-264), correspondant avec le pape Etienne, s’efforçait de faire prévaloir une solution amiable. Eusébb, VII, H-v, /'. G., XX, G40-645. Une détente se produisit sous le successeur d’Etienne, saint Sixte II (aoiit aSyaoùt258), qui cessad’urger l’exécution durescritbaptismal. Denys d’Alexandrie continua de correspondre avec ce pape et avec les prêtres romains Philémon et Denys ; ibid., v-ix, 6 ! 14-657. Cependant l’hérésie sabellienne, qui menait en Egypte une propagande active, i>aralt n’avoir pas rencontré dans le patriarche d’Alexandrie un adversaire parfaitement éclairé. Denys DE Romk(259-268) donna une orientation dogmatique, en signalant deux écueils opposés : récueil sabellien, où sombrait la foi en la Trinité, et l'écueil trithéiste, où sombrait la foi en un Dieu unique. Texte cité par saint Athanase, De decreiis Aicænae synodi, XXVI, P. G., XXV, 461 CD-465 A. Et Denys

« l’Alexandrie s’inclina devant la sentence venue de

Rome, par une adhésion exi)liLite à la doctrine de l’i.usoÙT.sî. Ibid., XXV, P. G., XXV, 461 AC. A l'égard du schisme novatien, qui avait voulu s’emparer de toute l’Eglise, Alexandrie, en la personne de son grand évêque, garda l’altitude la plus catholique. Voir la lettre de Denys d’Alexandrie à Denys de Rome, EusKBE, //. E. VII, viii, P. G., XX, 662, et sa lettre à Novatien, ibid., VI, xLv, 633.

Dans le même temps, l’Eglise d’Antioche se vit plus profondément troublée. Son évêque Fabius in clinait au schisme : Denys d’Alexandrie joignit ses efforts à ceux du pape Corneille, pour le rafl’ermir dans l’orthodoxie. Eusébb, //. E., VI, xuri, xliv, P. G., XX, 61 6-633. Un peu plus tard, Paul dk SamoSATE, autre patriarche d’Antioche (260-268), doublement scandalesx pour la foi et pour les mœurs, soulevait la réprobation de l’Orient chrétien. Denys d’Alexandrie et Firmilien de Césarée lellétrissaienl ; des conciles s’assemblaient contre lui et finissaient par le déposer. La sentence rendue par les érèques réunis à Antioche notilie la déposition « à Denys (de Rome) et à Maxime (d’Alexandrie, successeur de Denys) et à tous les évêques et prêtres et diacres associés au service divin, et à toute l’Eglise catholique sous le ciel », Eusèbe, //. E., VIII, xxx, P. G., XX, 70g. Cependant Paul refusait d'évacuer les édifices ecclésiastiques ; pour le contraindre, il fallut recourir au pouvoir civil, et la sentence rendue à cette occasion par l’empereur.urélien mérite d'être remarquée, d’autant qu’elle vient du dehors. Les édifices de l’Eglise devaient être remis à l'évêque en union avec l'évêque de Rome. Tel était dès lors le jugement de l'équité païenne.

IV et V' siècle. — Les premiers débats relatifs au Donatisme nous montrent en acte la prérogative du siège de Rome, selon la pensée de cet é êque du dehors que voulait être Constantin. C’est à Rome que se tint un premier synode, présidé par le pape Milliade (313). L’année suivante, un nouveau synode parut nécessaire, il se réunit à Arles : le pape Sylvestre s’y lit représenter par deux prêtres et deux diacres (31(i). Les Donatistes ayant fait appel encore une fois, l’empereur, après leur avoir fait entendre qu’ils devaient tenir le jugement des prêtres pour irréformable comme le jugement même de Dieu, les lit mander et conlirma la sentence des papes Miltiade et Sylvestre (3 16). — Voir HEKEHi-LECLEBCQ, Histoire des Conciles, t. I, ch. iii, p. 260-298, Paris, 1907.

Le cadre du concile de Nicée (325), qu’emplit l'éclat du pouvoir impérial, ne laisse aux légats clu pape saint Sylvestre qu’un rôle effacé. Néanmoins, dès qu’on oublie le personnage encombrant de Constantin, ce rôle apparaît le premier de tous. Nous en avons pour garant le témoignage non suspect d’EusKBE DE CÉSARKE, qui éorit, Vita Constantini, lll, VIT, P. G., XX, 1061 R : Il L'évêque de la ville impériale ne vint pas, à cause de son grand âge, mais quelques-uns de ses prêtres tinrent sa place. » T^ ;

TTpzvQvTipot Ô'kvT^Û TTV.fAJvTî^ Tr.v V.ÙtoO zà^cj 'êTT/v^'/JOUV, La

ville impériale ne peut être que Rome, car la fondalion de Constantinople date de 829. Par les représentants du i)ape, il semble bien qu’il faille entendre non pas seulement les prêtres romains Vituset Vincent, mais d’abord Hosius évêque de Cordoue, qui exerça la présidence effective des débats conciliaires et signa le premier la définition de foi. On ne voit pas en effet quelle autre délégation aurait pu assurer à l'évêque de Cordoue le pas sur tous les personnages ecclésiastiques d’Orient, y compris les patriarches d’Alexandrie et d’Antioche. Constantin avait ou^e^t le concile en qualité de président d’honneur ; après quoi il céda la parole aux présidents ecclésiastiques, Eusèbe, Ibid., xiii, 1069 B : UapiSiSou Tsv /0-/0 » Tof ; T^4 hmHou T.pcéhpoii. Par ces présidents, il faut entendre tout d’abord Hosius, qu’Eusèbe vient de désigner dans un rang à part, vii, 1061 A, et que saint Athanase nomme expressément, Apcdogia de s’ita sua, v, P. G.. XXV, 6^9 B : Quel concile n’at-il point présidé? Tloic/.ç -/v.p où /(oi.0rty/17c/.To swi^iw, cette tradition était ferme au v" siècle ; voir Tubodoret