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PAPAUTE

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D’ai)rès l’usage constant de saint Cyprien, epiicopatus désigne le pouvoir épiscopal, non le corps de l’cpiscopat. Voir Catli. Eccl.un., x, p. 218, 26 ; £/)/)., LV, 9, p. 630, 1 i-13 ; 2^, p. 642, 14 ; 6^3, 3 ; Lxvn, 5, p. 739, 22 etc. Il serait d’ailleurs absurde d’entendre que le corps épiscopal est un bien que les cvêques possèdent solidairement. Voir sur ce point R. P. Kneller, Der heilige Crprian und das Kennzeichen der Kirche, p. 61 sqq. (115 Ergdnzungshefl zu den Slinuiien ans MariaLaach, igii). In soUdiim est une expression juridique, dont-il faut demander la clef aux juristes. Plusieurs personnes possèdent in solidum un bien dont la totalité appartient à chacune d’elles, mais non à litre exclusif. Telle est la définition de Ulpien, Dig., XLV, ir, 3 ; cf. XIII, vi, 5. Tel est précisément le cas du pouvoir épiscopal, auquel tous les évêques ont part simultanément. Voir D. O. Casel, Eine missverstandene SIelle Crprians, dans / « 'et'. Bénédict., t. XXX, p. 4'3-420 (igiS). L’objet de cette possession indivise est justement le pouvoir découlant de Pierre, comme Cyprien l’explique aussitôt après. Parce que la source est unique, nul n’anra pari aux biens qui en découlent, s’il ne communique avec la source, c’està-dire avec Pierre, par l’intermédiaire de ces canaux réguliers que sont les évêques. Catli. Eccl. un., v, p. 214, 2-12 :

Ecclesia unæst qtiæ iiimultitudinem latins incremento fecunditatis exlenditur, quumodo solis miilti radii, sed lumen unum, et rami arhoris multi, sed rohur unum tenuci radice fundatum, etcum de fonte uno livi plurimi de/luuni, numerositas licel diffusa videatur e.Tundantis copiæ targitnte, unitas tamen servatur in origine..4felle radium sotis a corpore, divisionem lucis unitas non capit ; ah arbore frange ramum, fructus germinare non polerit : a fonte præcide rivuni, præcisus arescit. Sic et Ecelesia Domini luce perfusa per orbem totum radios suos porrigit : unum tamen lumen est quod uhique diffanditur, nec unitas corporis separatur.

Pour l’exposition des thèses anglicanes, voir J. Fkll et J. Pearson, Annales Cyprianici, Oxoniae, 1682 ; H. DoDWELL, Dissertationes c^prianicae, Oxoniae, 1684 ; Benson, Cyprian, His life. /lis tiiiies. His iork. London, 1897. Tout récemment, le D"' J. K. Bernard, archevêque anglican de Dublin, dans un mémoire intitulé : The Cyprianic Doctrine of tke Ministry (Essays on tlie earty Ilistor) of the Cliurcli and the Minisiry, ediled by H. B. Swete, London, 1918), a cru bon de rajeunir les thèses anglicanes par des emprunts au livre de M. Hugo Koch. On ne peut pas l’en féliciter beaucoup.

La doctrine du De catholicæ Ecclesiat unitate s'éclaire à la lumière de la correspondance échangée par sainl Cyprien avec l’Eglise de Rom*.

Nous possédons dix lettres échangées entre Rome et Carthage durant la vacance du Saint-Siège, entre le martyre du pape Fabien et l'élection de son successeur Corneille ; onze lettres échangées entre Cyprien et le pape Corneille ; une lettre de Cyprien au pape Lucius ; deux lettres au pape Etienne, sans compter d’autres documents qui complètent l’information. Examinons ces diverses séries.

10 lettres écrites durant la vacance du Saint-Siège (20 janvier 250-mars 201). — Quatre de ces lettres émanent du clergé de Rome (viii, xxx, xxxi, xxxvi) ; six émanent de sainl Csprien (ix, xx, xxvii, xxviii, XXXV, xxxvii). Parmi les lettres romaines, la première (vui) ne porte aucun en-tête ; les trois autres sont adressées Cypriano papae, selon le style du temps. Parmi les lettres de Cyprien, quatre (ix, xx, xxvu, xxxv) sont adressées Preshyteris et diaconibus Romæ consisientibus fratribus ; les deux autres

aux prêtres Moj’se et Maxime et aux autres confesseurs emprisonnés pour la foi.

Cette correspondance montre que le clergé de Rome, même privé de son chef, a conscience de son rôle éminent. A l’Eglise de Carthage, qu’au début il croit plus ou moins abandonnée par son pasteur, il trace son devoir avec fermeté ; à Cyprien lui-même, quand les raisons de sa retraite temporaire sont mieux connues, on ne ménage ni les félicitations ni les avis. L’Ep., xxx surtout, due à la plume habile de Novatien, montre Rome étendant sa sollicitude sur toutes les Eglises. Si l’on assure Cyprien qu’il n’a ici-bas d’autre juge que Dieu, on ne laisse pas d’affirmer qu'à 1 évêque de Rome appartient l’initiative des mesures les plus graves, encore qu’il importe d’en faire partager la responsabilité à l’opisccpat. De son côté, Cyprien attache à l’approbation de Rome un prix très grand ; même en lempsde vacance du Saint-Siège, il tient les clercs romains au courant de tous les événements qui intéressent l’Eglise d’Afrique et de sa propre administration.

2" Lettres datant du pontificat de Corneille (mars a51-juin 253). — Durant son court pontiticat, Corneille fut en relations suivies avec le primat de Carthage, comme en témoignent neuf lettres à lui adressées par Cyprien (xliv, xlv, xlvii, xlviii, li, LU, Lvn, Li.v, Lx), et deux lettres qu’il lui écrivit (il, l). Les lettres de Cyprien portent la suscriplion : Cypriaiius Cornelio fratri {à&nsVEp., lvii, qui est une lettre synodale, les noms des évêques siégeant au synode sont joints à celui de Cyprien) ; les lettres du pape portent la suscription : Cornélius Cypriano fratri.On peut y joindre trois lettres échangées entre Cyprien et les confesseurs romains (xLVi, LUI, Liv). Deux objets surtout remplissent cette correspondance : d’une part, les blessures de la persécution, à guérir ; d’autre part, le schisme, qui, à Rome avec Novatien, en Afrique avec Félicissinie, déchire l’Eglise. La dernière lettre de Cyprien porte à Corneille ses félicitations fraternelles pour sa glorieuse confession, prélude de son martyre.

L’Ep. XLVIII renouvelle au pape l’hommage de l’Eglise d’Afrique, et l’assure qu’en s’atlachant à lui les évêques d’outremer ont conscience de s’attacher à l’Eglise catholique, iii, p. 607, 7-9 ; 1 2- 1 8 : Ao.ç cn/m siiig' : lis nayigantilius, ne cum scandalo ullo navigarent. rationem reddenles, nos scimus hortatos esse ut Ecclesiæ catholicæ matricem et radicem agnoscercnt actenerent… Placuit ut… te universi collegne nostri et communicationem tuam, i. e. catholicae Ecclesiæ unilatem pariter et caritatem probarent firmiter ac tenerent. Certains détails d’interprétation sont ici controversés ; ils doivei.t nous retenir.

Que signilîe au juste : ^cc/esi’ne C(((/io/icæ matricem et radicem.^ On a souvent entendu : la racine mère de l’Eglise catholique, et appliqué simplement cette qualification à l’Eglise romaine, mère de toutes les Eglises. Un tel sens va bien dans le contexte. Mais il demeure discutable.

Matricem et radicem ramène une image déjà connue. Nous l’avons rencontrée dans Cath. Eccl. un., v, p. 214, 4. On la retrouve Calh. Eccl. un., xxru, p. a31, 712 ; Ad Fortun., xi, p. 338, 15-17 ; Epp., XLIV, 3, p. 599, 3-6 ; XLV, i, p. 600, 1-6 ; xlvi, i, p. 604, 16-19 ; XLVII, I, p. 605, 16-17 ' i-ïiiii II P- 701, 16-22 ; Lxxi, 2, p. 772, 22-28 ; Lxxm, 2, p. 779, 19-22. La plupart de ces exemples visent, en fait, l’Eglise romaine ; mais non pas tous ; quelques-uns (à commencer parceux tirés de Cath. Eccl. hh.) s’entendent bien de l’Eglise universelle, comme telle ; ils flétrissent les entreprises du schisme, qui déchire le sein maternel de l’Eglise. Pour justifier une telle interprétation, il suUit de donner au génitif dépendant

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