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MARIE, MÈRE DE DIEU

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Creayit Doniinus novum in terra : femina amplexahitur firiirn suum ; yel quia Synttgoga idula derelictura erat et adhæsura uni Deo : ’el terrain ipsam ludæae désignât siios coinplexurani habitatores posiliminio redeuntes. Opéra syriaca, éd. Roraae, 1740, t. II, p. 141E. Saint Jérôme traduit : Creavit ûominux noyum super terrant : femina circunidabit firuni. Voir son commentaire In leremiam, P. L., XXIV, 880. Cette version rend exactement notre texte hébraïque. Mais il demeure difficile de reconnaître dans femina la Vierge, dans circunidabit l’idée de grossesse, dans liruni le Messie. Aussi plusieurs exégêtes catholiques modernes suivent d’autres voies, dont une, déjà indiquée par saint Eplirem, s’accorderait bien avec le texte et le contexte : il s’agirait d’Israël et de son retour à Dieu. Voir Houbiuant, Biblia hehraica cuni notis criticis, Parisiis, 1753 ; Reinke, dans Theologische Quartalschrift, 18bi, p.bo(j563 ; CoNDAMiN, l{e’ue Biblique, 1897, p. 396-404.

La traduction que nous avons citée, faite sur l’hébreu, est conforme au sens général de la vulgate, que recommande l’interprétation commune des exégètes catlioliques latins depuis le Moyen-.lge. Celte interprétation s’impose à l’attention, sinon tout à fait à l’adliésion. Cf. Knabenisaukr, in li. l.

Jusqu’ici, nous nous sommes bornés aux textes qui peuvent s’entendre de la Vierge mère, au sens littéral. Beaucoup plus longue est la liste de ceux que les Pères lui ont appliqués au sens typique et de ceux que l’Ey lise, dans sa liturgie, emploie au sens accommodatice pour célébrer la nouvelle Eve. Donnons quelques brèves indications sur un sujet inlini.

Parmi les figures à l’A. T., applicables à la Vierge, on peut signaler :

Gen., 14-22, l’arche de Noé, qui porte le salut du monde. — Cf. S. Proclus de Co.vstantinople, Or., VII, 3 (fn Sancta Tlieophania). P. G., LXV, 760 ; saint Ephrem, Oratio ad Deiparam, 0pp. Græca, t. 111, p. 629 D ; HÉsYCHius’DE Jérusalem, Oratio de laudibus Deiparae, P. G., XCIIl, 1461 B.

Exod., III, 2, le buisson ardent, image d’une virginité incorruptible. — Cf. S. Ephrem, Opp. Svr., t. III, 605 D ; Opp. Græc, III, 676 D ; S. Théodote d’ÂN-CYRK, Honi. ii, a (M Salyatoris nativitatem), P. G., LXXVII, 1872 B.

£x< « /., XXV, lo-ii, l’arche d’alliance. — S. Cyrillk d’Alexandrie, De adoratione in spiritu et veritate., 1. IX, P. G., LXVIII, 597.

ladic, VI, 37, la toison de Gédéon, qui recueille toute la rosée du ciel. — S. Augustin, In. Ps. lxxi, Enarr., 9, P. L. XXXVII, 907 ; S. Proclus, Or., vi, 17 {De laudibus Mariae), P. G., LXV, 766 D.

Ps. xLiv, l’époise du roi. — S. Athanask, Ep. ad. Marcellinam de interpretatione Psalniorum, vi, P. G., XXVI, 16B.

Ps. xlv, 5, le tabernacle de Dieu. — S. Grégoire DB Nazianze, Carmina, 1. ii, s. 11, viii, Ad A’emesium, p. 180-184, i^. G., XXXVII, 1565A ; Venantius FoR-TUNATUS, Miscellanea, viii, vi, P. L., LXXXVIII, 268.

Ps. Lxxxvi, 3-5, la cité de Dieu. — S. Ephrem, Oratio ad Deiparani, Opp. Gr., t. III, 529 F.

Ez., xLiv, I. 2. — Entre les figures de l’Ancien Testament, celle-ci mérite une place à part. Dans sa description du temple céleste, le prophète Ezéchiel a un trait mystérieux :

lalivé me fit venir du côté du portique extérieur de la maison qiù re|<ardait l’Orient ; il était fei-jné. Et lalivé me dit : Ce portique sera fermé : il ne s’ouvrira point, et personne n’entrera par ce portique ; car lahvé, le Dieu d’Israël, est entré par là.

Le temple décrit par Ezéchiel est l’Eglise ; la nuée qui remplit le temple, figure le Messie. Elle pénètre

par la porte orientale, car le salut vient de l’Orient, selon Is., XLi, 2 ; Bar., iv, 36 ; v, 5. Jésus, qu’une étoile d’Orient doit révéler aux Mages, pénètre dans le sein de Marie. II n’aura point de frères selon la nature, mais bien d’innombrables frères selon la grâce. Dans cette porte close, des Pères ont reconnu le sein virginal de Marie, Le fait est que le texte d’Ezéchielne présente aucun autre symbolisme plausible. Et de la sorte, il complète la série des oracles d’Isaie, de Michée, de Jérémie, par un trait descriptif applicable à la maternité singulière de Marie. Les auteurs du N. T. n’ont pas relevé ce trait : il leur suffisait d’affirmer le miracle de la Conception virginale, pour mettre à son rang, dans la vénération des lidèles, la mère de Jésus. Mais la pensée chrétienne, s’emparant de cette donnée, a fait ressortir toutes les convenances du mystère et découvert dans l’A. T. des anticipations propres à en rehausser la majesté. L’interprétation que nous venons de signaler se rencontre en saint Ambhoise, De instituiiune virginis, vm, 5a, P. L., XVI, 820 A. Il y appuie l’assertion de la virginité de Marie, inviolable dans l’enfantement aussi bien que dans la conception de son Fils. Sans prendre la peine de se référer à saint Ambroise, saint Jérôme la fait sienne, et la mentionne plusieurs fois comme une opinion reçue : Ep., XLviii, 21, Ad Pammach. , P. L., XXII, 510 ; In Ezecli., I. XIH, P. L., XXV, 430 AB ; Dial. ady. Pelagianos, II, iv, P. L., XXIII, 538 C. On pourrait apporter beaucoup d’autres autorités, par exemple celle des Testimonia ady. Græcos, attribués quelquefois à saint Grégoire de Nysse, iii, P. G., XLVl, 209 A. Quiconque admet l’unité du plan divin et reconnaît dans l’Ancien Testament une ébauche du Nouveau, sera disposé à faire, en pareille matière, crédit aux Pères de l’Eglise et à penser que les harmonies qu’ils ont cru découvrir ne sont pas imaginations vaines, mais répondent à de réelles intentions de l’Esprit saint.

Souvent aussi, les Hères ont signalé la figure de Marie dans quelques-unes des femmes de l’Ancien Testament ; telles :

Sara, l’épouse d’Abraham, longtemps stérile et merveilleusement féconde. — Saint Ambroise, De institutiune virginis, v, 33, P. L., XVI, 313B.

Marie, scieur de Moise, associée à l’œuvre du législateur. Exod., xv, : iO-23. — Saint Ambroise, De institulione virginis, v, 34, P. I.., XVI, 314 A.

Les héroïnes du peuple de Dieu : Debbora.

Judith.

Esther, la reine toute-puissante par sa prière.

L’Eglise a suivi les Pères dans la voie de ces applications.

L’exploitation liturgique de certains textes scripturaires, en l’honneur de la Mère de Dieu, s’inspire de raisons particulières.

Il existe surtout deux catégories de textes de l’A. T., que l’Eglise se plait à détourner de leur sens primitif pour les ajipliquer à Marie : ce sont les textes sapientiaux relatifs à la Sagesse incréée, et les textes relatifs à l’Epouse du Cantique. Les clercs habitués à l’Office divin et les fidèles qui récitent le petit Office de la Sainte Vierge goûtent souvent le charme mystique de ces applications, sans en connaître le fondement précis. Nous devons en rendre raison.

Les livres sapientiaux nous montrent la pensée divine à l’œuvre avant toute création, concevant le dessein des grandes choses que Dieu devait réaliser pour sa gloire. Ils la montrent encore à l’œuvre dans l’acte même de la création, ouvrière d’ordre et de beauté, condescendant sans s’amoindrir, s’abaissant au particulier, s’insérant pour ainsi dire dans le détail des réalisations divines et se jouant parmi les