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PANTHÉISME

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montrer sur un exemple particulier en prenant pour type le système de Fichte'.

1. Idéalisme et dogmalisme. — L’existence de l’univers implique à la fois et indissolublement un représenté et un représentatif, la Chose et l’Esprit. Expliquer l’univers, c’est expliquer ces deux, éléments en rendant compte de l’un à partir de l’autre, et de cet autre à partir de soi. Qu’il faille essayer de dériver la Chose de l’Esprit et non inversement, c’est ce qu’on croit pouvoir établir par un certain nombre de considérations, mais ce qu’ici, pour abréger, nous supposerons acquis^.

La doctrine qui part de l’Esprit pour expliquer l’univers, appelons-la idéalisme par opposition à celle qui part de la Chose et que nous appellerons dogmatisme.

Sous le nom de choses entendons non seulement les corps, mais tout ce qui est objet d’expérience, toal ce qui est donné, par conséquent les consciences individuelles elles-mêmes, lesquelles, en tant que perçues, sont des objets comme les autres et doivent être expliquées par l’Esprit. Et sous le nom d’esprit, entendons ce qui s’oppose à la chose, par conséquent ce qui n’est pas donné, mais ce à quoi quelque chose est donné, le Représentatif non représenté, le Moi sans non-moi, le Moi pur.

2. La tâche de l’idéalisme. — L’idéalisme ne peut se contenter d'énoncer cette proposition : l’Esprit a produit l’univers. — Ce serait présenter l’univers et sa relation à l’Esprit comme un fait. Mais dire qu’on est en face d’un fait, c’est dire qu il n’y a rien à comprendre, qu’il n’y a qu'à « constater >> : tout fait comme tel est toujours en marge de l’intelligible. Or, c’est, pense-t-on, l’essence de la mentalité proprement philosophique de vouloir tout comprendre et d’affirmer que tout doit pouvoir être compris ; a philosophie ne connaît pas de n faits ». Loin donc de poser ce que l’on pourrait appeler le fait de la création, l’idéalisme va essayer de rattacher l’univers à l’Esprit par un lien a priori. En d’autres termes, il va s’efforcer de montrer que posk l’esprit et 30N ACTIVITÉ, L’uNivEits s’ensi’it, — et tel univers, composé de tels éléments, à savoir celui-là même qui, indépendamment de notre volonté, se déploie autour de nous dans l’espace et dont, à titre de réalités empiriques, nous sommes nous-mêmes une partie s.

1. L’exposé qui suit est entrait d’un article plus étendu, paru dans les Recherches df science religieuse, janviertnnrs liM9, sous ce tilre : I.e sens panthéistique de la Dialectique idéaliste chez Fichte. On la divisé en paragraplies et on l’a complété par des remarques critiques.

2. Cf. article cité.

3. Kemarquons que dans ces lignes, le panthéisme est déjà viri-nelU-ment affirmé trois fois :

îy — En ne voulant pus reconnaître l’existence de faits qui ne soient que des faits, l’idéalisme décrète l’impossibilité de toute coTitinr^ence, car une réalité contingente est précisément une réalité dont on ne peut établir qu’elle doit être : elle est, mais elle aurait pu ne pas être. Or nier la contingence, c’est déjà virtuellement nier tout ce qui pourrait se distinguer de Dieu, c’est poser Dieu comme 1 être unique, c’est affirmer le panthéisme.

2/ — En affichant la prétention de vouloir tout comprendre, en f>rofessant que notre pensée ne doit nulle part rencontrer de l’ojiuque, l’idéalisme fuit secrètement de notre pensée irit arrive à déterminer les lois particulières auxquelles la Nature est soumise. — De même, c’est en vertu d’une nécessité interne que l’esprit (et entendons l’esprit en soi, l’esprit en général), c’est en vertu d’une nécessité interne que l’Esprit se représente l’espace ; mais c’est parce qu’il le veut bien, qu’il découpe des figures dans cet espace et par là rend possible la géométrie ; ainsi la géométrie tient sa forme, de l’espace qui est une construction nécessaire ; et son contenu, des Ggures qui sont une construction arbitraire.

Par le moyen de la philosophie et des sciences particulières, l’esprit doit pouvoir retrouver l’univers, le reconstruire en pensée et par là même l'élever à l’intelligibilité. Quand il aura tout tiré de lui-même, l’esprit pourra dire qu’il a tout compris,

4. Le panthéisme, principe et fui de l’idéalisme.

— Si l’existence de l’univers est une suite nécessaire de l’existence de l’Esprit, ce ne peut être que parce que l’Esprit a été contraint de le produire et de le produire tel qu’il est. Il nous faut donc concevoir l’Esprit comme soumis dans son activité à des lois rigoureuses, identiques d’ailleurs à sa nature même, et en vertu desquelles soient comme prédéterminées en lui toutes ses productions *. — Grâce à ces lois,

l’Esprit, c’est-à-dire de celle de Dieu, l’idéalisme postule déjà, au moins comme hypothèse, que l’univers est aussi nécessaire que Dieu même, qu’il fuit partie de l’essence divine, ce qui est encore le panthéisme.

La première affirmation est réfutée, comme on le verra plus loin, par l’existence de la liberté, ou ce qui, en l’espèce, revient au même, de la contingence. — La deuxième, celle qui déifie notre pensée, est contredite par l' « xpérience, laquelle ne révèle que trop nos limites : l’on peut dire fque le système de Fichte, lequel devi’aît jjrouver cette affirmation par son Buccès, contribue lui-même, itar sa faillite, à la réfuter, — car il n’arrive pas à supprimer les faits, — Entin, la troisième affirmation, celle qui pose la nécessité de la création, relève d’une i'éfntalion a/ï/turi, car il est absurde et par conséquent impossible que la création soit nécessaire. (N’oir le développement de ce dernier p ;)int dans la suite de cet article ; col, loio.)

1. Conception indispensable à l’idéalisme dialectique, et qui fait morne le fond de sa doctrine : Dieu,.^elon lui, est contraint de produire le monde, de créer une nature qu’il assume ; mais conception contradictoire, du moins pour qui se fait de Dieu une idée juste : si Dieu est souve 12