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ORIGENISME

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du Christ. >> Pour mettre à couvert sa réputation, dans les délicates fonctions de catéchiste, il s’inflige unemutilation volontaire. Lui-même fréquente l'école philosophique d’Ammonius Saccas. le père de l'éclectisme. Après une période d’extrême activité enseignante, il commence d'écrire à l'âge de trente-trois ans. Un ami opulent, Ambroise, ramené par lui de l’hérésie à la vraie foi, met à sa disposition des secrétaires et toutes les facilites d’une production littéraire intense. Lors du sac d’Alexandrie par Caracalla (2 1 5), il fuit à Césarée de Palestine : les évêqvies l’invitent, quoique laïque, à expliquer l’Ecriture sainte au peuple dans les églises. Blâmé pour ce fait par son évcque Démétrius, Origène rentre à Alexandrie et reprend son enseignement. A l'âge de quarante-cinq ans, au cours d’un voyage, en passant par Césarée de Palestine, il reçoit de l'évêque l’imposition des mains sacerdotale. Démétrius d’Alexandrie voit dans ce fait une grave atteinte à ses propres droits. Deux conciles s’assemblent coup sur coup à Alexandrie : Origène est déposé de son rang sacerdotal, excommunié. Retiré à Césarée de Palestine, durant plus de vingt ans encore il enseigne avec éclat. Il confesse la foi dans les tourments lors de la persécution de Dèce, et meurt sous Gallus, à Tyr, âgé de soixanteneuf ans (253). — Voir EusKBE, //.A'., VI et Vil, i ; saint JÉRÔMB, De yiris itlustrihus, liv et Lxii ; saint EpiPHANE, flær., liiv, i, Photius, Bihlioth., cod. cxvni.

Après une carrière traversée par bien des orages, Origène repose en paix durant cent vingt ans. Le surnom d' Aô « , uv : >ti^ç — l’homme de fer — traduit l’admiration des contemporains pour la trempe indomptable de son esprit et de son caractère. Sa gloire, propagée de son vivant par des disciples enthousiastes, tels que saint Grégoire Thaumaturge, saint Firmilien de Césarée, saint Denys d’Alexandrie, sera encore célébrée par des hommes tels que saint Athanase, saint Grégoire de Nazianze, saint Basile. Quelques notes discordantes se font bien entendre ; mais les critiques de saint Méthode d’Olympe ou de saint Eustathe d’Antioche sont amplement couvertes par les éloges du martyr Pamphile et d’Eusèbe de Césarée. Alexandrie surtout veille jalousement sur la gloire d’Origène, depuis que son disciple Denys est monté sur le siège patriarcal (247-8). Tour à tour Théognosle, Piérius, , Didynie le commentent au Didascalée ; le patriarche Théophile lui emprunte des armes pour comljattre l’anthropomorphisme des moines de Scété. L’Orient vit de sa pensée ; un traducteur infatigable, saint Jérôme, entreprend de le révéler à l’Occident.

Tout change de face le jour où saint Epiphane, évêque de Salamine en Cliypre, entre en lutte avec Jean patriarche de Jérusalem, qui, après avoir prêté aux hérétiques ariens et macédoniens une oreille indulgente, ne cachait pas sa sympathie pour les rêveries origénistes(394). Un premier avertissement, donné à Jean par celui qu’on nommait en Orient « le père des évêques », fut mal accueilli. L’ordination sacerdotale de Paulinien, frère de saint Jérôme, accomplie par Epiphane dans un monastère de Palestine sur lequel Jean prétendait avoir des droits, envenima la querelle. Bientôt saint Jérôme, puis Théophile patriarche d’Alexandrie, se rangèrent aux côtés de révoque de Chypre. Ruiin d’Aquilée, après avoir essayé de soutenir en Palestine la cause de l’origénisme, partait pour l’Occident où il espérait trouver des appuis (397). Le pape Sirice ne lui était pas très opposé ; mais son successeur Anastase (899401) allait se prononcer avec la plus grande énergie contre Origène.

Il existe trois lettres du pape Anastasb relatives

à l’origénisme. La première est adressée à Simplicien, évêque de Milan ; la seconde, après la mort de Simplicien (15 août 400), à son successeur Venerius ; la troisième à Jean de Jérusalem. On trouvera la première et la troisième, P.L., XX, p. 5 1-80 (la première également parmi les lettres de saint Jérôme, P. l., XXII, 772-774 ; la troisième également parmi les œuvres de RuIin, P.L., XXI, 627-632) ; la seconde n’a été éditée que de nos jours [Bibliophile helge, t. VI, p. 123-129 (1871) ; texte meilleur dans la Heiiie d’histoire et de littéiatiire religieuse, t. IV, p. 1-12 (1899)]. A Simplicien, Anastase signale le danger de l’origénisme, qui lui a été dénoncé par Théophile d’Alexandrie ; il déclare condamner « Origène et ses blasphèmes ». />./., XXII, 774 : Theophilits, frater et coepiscopus noster, circa salutis comnioda non desinit vigilare, ne Dei populus per diversas Ecclesias, Origenem legendo, in magnas incurrat blasphemias… Quidnuid est fidei nostræ conlruriiim ab Origène quondam scriptttm, indicavimus a nobis esse alienum atque piinitum… Quædam capitula blasphemiae… nos non suliim horruimus et indicavimus, terum et si qua alia sunt ab Urigene exposita, cum suo auctore pariler a nobis scias esse damnata. A Venerius, Anastase rappelle la lettre précédente et le presse d’en porter les prescriptions à læonnaissancedes évêques. Quant à Jean de Jérusalem, détaché de l’origénisme et complètement retourné, il avait consulté le pape pour savoir si Rufln ne méritait pas d'être condamné avec Origène, dont il s'était fait le traducteur. Le pape s’en remet à la conscience de son correspondant. Si, en traduisant Origène, Rufin s’est proposé de livrer ses erreurs à l’exécration du peuple chrétien, il faut louer son zèle. Si au contraire il s’en est fait le complice et le promoteur, on ne peut l’excuser. Provisoirement, le pape veut l’ignorer ; à lui de se faire absoudre, s’il peut, iv, P. L., XXI, 630 A : Discere hoc loco libet quid agat in romanam linguam ista translatio. Approbo si accusât auctorem et execranduni factum populis prodit, ut iustis tandem odiis teneatur quem iamdudum fama constrinxerat. Si l’ero interpres tantorum malorum consensuin præslat et legenda prodit in populos, nihil aliud sui opéra laboris exstruxit nisi ut propriæ élut mentis arbitrio hæc quæ sola, quæ prima, quæ apud catholicos christianos yera fide iam exinde ab Apostolis in hoc usque tempus tenentur, inopinatæ titulo assertionis everteret… — vi, p. 632 : flaque, frater carissime, nmni suspicione seposita, Rufinum prupria mente perpende si Origenis dicta in latinum translulit ac probnvit, nec dissimilis a reo est qui alienis vitiis præstat assensum. lllud tamen tenere te cupio, ita haberi a nostris partibus alienum ut quid agat, ubi sit, nec scire cupiamus. Ipse denique viderit ubi possit absoh’i.

En Orient, la lutte allait se prolonger quelques années. Elle mit aux prises saint Epiphane et Théophile d’Alexandrie avec saint Jean Chrysostome, élevé, le 26 février 398, sur le siège patriarcal de Constantinople. Théophile avait autrefois goûté les doctrines origénistes. Mais à la suite de démêlés avec les moines d’Egypte, un revirement s’opéra dans son esprit. Des rivalités existaient entre les moines de Nitrie, généralement imbus d’idées origénistes, et les moines de Scété, inclinant, dans un sens diamétralement opposé, à une hérésie grossière, celle des anthropomorphites. Théophile crut donner satisfaction à ces derniers en les excitant contre leurs rivaux. Les monastères origénistes furent détruits. Plusieurs moines fugitifs, parmi eux les quatre célèbres « Longs frères », cherchèrent un refuge à Constantinople. Sous la seule inspiration de la charité chrétienne, Chysostome les accueillit, sans