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ORDINATIONS ANGLICANES

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concordent avec les théories sui-la nature Je la messe que Cranmer nous a livrées dans les citations données plus liaut. Quant aux autres détails contenus dans la Formula de iSaS, il nous sullira d’en noter quelques-uns : Luther donne comme direction de déposer le pain et le vin sur la table sans cérémonies ni prières d’aucune sorte ; il laisse indécise, quoique non indiscutée, la question de l’eau à mêler au vin ; il insiste tout spécialement sur ce que les « paroles d’institution », c’est-à-direlerécitscripturairederinstitution eucharistique, devront être prononcées tout haut (évidemment pour indiquer qu’on ne les prononce pas pour consacrer, mais seulement pour rappeler au peuple un événement hi :  ; torique île la vie de Noire-Seigneur). Toutes les liturgies luthériennes constituées dans la période qui suivit l’apparition de cette Formula se distinguent par ces caractères. Or l’examen des deux Prayer Books d’Edouard VI prouve jusqu'à l'évidence qu’ils appartiennent à ce groupe luthérien.

Le premier Prayer Bock, mutilation du Missel de Sarum. — Dans le premier Prayer llool :, le texte du Missel de Sarum, forme ou variété du Missel romain la plus généralement usitée en.Angleterre, fut adopté par les Réformateurs pour servir de base à leur revision, si l’on peut donner ce nom de revision à une pareille œuvre de mutilation systématique. On maintint les Inlroils (sauf que sous cette appellation, et conformément encore au désir de Luther, on introduisit un Psaume entier au lieu de l’Introït classique de la messe romaine) ; on maintint le Kyrie, le Gloria, tout le système des Collectes, des Epitres et des Evangiles des dimanches et même de quelques rares fêtes en l’honneur de Saints mentionnés dans l’Ecriture ; on retrancha seulement toutes les Proses ou Séquences. Mais « toute cette abomination qui est appelée offertoire « fut supprimée. Le.Ganon, il est vrai, pour éviter l'émotion populaire qu’eût causée son omission complète, subsiste quant à son ossature ; mais toutes les phrases qui pourraient sentir le sacrifice sont omises ou modifiées, comme le sont aussi toutes les phrases ou expressions similaires des autres parties de l’ancien office. Gasquet et Moye.s, dans le rapport présenté par eux au Saint-Oflîee en 1896, en cataloguent seize exemples. (Gascjukt et Moyes, Ordines Anglicani, pp. 62, 63 et app. iii) Les Reviseurs d’Edouard VI retranchent en entier l’OlTertoire de la messe ; ils retranchent la prière pour l’olTrande de l’hostie ; Suscipe Sancta Triniiaf : hanc oblalionem… ; ils retranchent les prières :.ic-eptum sit Omnipotenti Deo hoc sacrificiuni novum… ; Sic fiât sacrificium nostrum in conspectu tu<i hodie… ; Orate fratres… (à cause des mots : ut meum pariler et vestrum acceptum fiai Domino Deo sacrificiuni), avec le répons : Accipiai Dominas digne hoc sacrificiuni lundis… Os abolissent toutes les Secrètes, qui pour la plupart parlent de sacrifice ou d’oblation. Ils ometlent dans le Canon les mots : hæc sancta sacrificia illibata ; hanc ohlationem servitutis nosirae… quant ohlationem tu, Deus…, hostiani puram, hostiam sanctam, liostiam imniaculatam, et sanctam sacrificium, inimacalatani hostiani. De même, là où dans l’ancien missel se reucoutraient les paroles : Agnus Dei qui tollis peccata 7 ; iK/(rfi….les Reviseurs, les ayant interprétées avec raison comme adressées au Christ présent dans son sacrifice eucharistique, les transformèrent en une déclaration faite par le ministre olficiant pour publier que « Christ, notre agneau pascal, fut olfert pour nous une /ois pour toutes quand il porta nos péchés en son corps sur la croix ». Il est vrai que ce premier Prayer Book recommandait au chœur de

chanter, pendant que se donnait la communion, le ; mots : « O Agneaii de Dieu… », exactement comm( ils sont dans le Missel ; mais pour déterminer le sens où le chœur devait entendre ces mots, il faut tenii compte de la déclaration que nous venons de citer ei qui, dans l’intention des Reviseurs, avait justemeni pour but d'éviter toute équivoque ; car, comme If remarquent Moyes et Gasquet dans l'écrit d’où nous tirons ces citations, cette phrase : « Christ, notrt agneau pascal, qui fut olfert pour tous quand il porte nos péchés sur la croix », constiluaient un mol de passe que les Réformateurs échangeaient conli nuellerænt entre eux, pensant établir par là que depuis la mort du Christ, toute sorte de sacrifice el de sacerdoce sacrificateur avait pris fin. Enfin, outr( les changements déjà énumérés, les Reviseurs rayèrent encore la prière, propre au rite de Sarum qui se disait avant la communion : Ave in aeternum., carnem qnam ego hic in mnnibus teneo, et les prière ; Ave in aeternum sanctissinta caro Christi… et Ayt in aeternum cælestis potus…, ainsi que la prièrf Placent tihi sancta Trinitas, qui contenait les mots Præsta ut hoc sacrificium quod ego… obtiili… si milti propitiabite.

Le deuxième Prayer Book d’Edouard Vl (1538), nouvelles mutilations. — Ce n’est pas tout. Quand le premier Prayer Book fut mis eu usage et que tons eurent été requis de l’adopter deux fails notables se produisirent : Gardiner, h chef (lu parti protestant le moins éloigné de la doc trine orthodoxe, s’empara de deux ou trois phrases de la liturgie nouvelle sur lesquelles il croj’ait pouvoir s’appuyer pour lui trouver un sens catholique ; et d’autre part Cranmer, l'àme du mouvement réformateur, avait pour lors dépassé sur la nature d «  laSainte Communion, la doctrine de Luther, pour rejoindre Calvin, apportant par là une grande cause de joie au parti calviniste anglais. L’un des effets de tout cela fiitiui’en 1552 on publia une deuxième édition du (( I-ivre de la Prière commune », où, à la suite de revissions nouvelles, on supprimait les détails qui rassuraient ({uel(^ie peu Gardiner et ses amis, pour donner satisfaction aux critiques soulevées contre le premier n Prayer Book » par Bucer, rhéréli( ;  ! ue de.Strasbourg. Car Bucer, arrivé à Londres juste après l’apparition de ce livre, au printenq^s de iS’ig, avait composé sur ce sujet, à la demande de llolbeach évêque d’Ely, la Censura qu’on peut trouver dans ses Scripta anglicci. Les nouvelles modilications furent au nombre de neuf. Dans la première édition on n’avait fait qu’abolir tous les termes qui parlaient de sacrifice ; mais l’enchaînement même des diverses parties de la Messe subsistait, el il exprimait tellement cette idée que, pour parler comme Luther (voir supra, col. i f^li), « tout ce

« qui précédait cet abominable Canon lui était as « servi ». Du point de vue protestant, c'était dans le

premier Prayer Book un sérieux défaut ; mais dans le second il fut amplement réparé, et selon les principes propres aux Calvinistes : car tandis que les Luthériens cherchaient à garder ce qui leur semblait bon de l’ancien rite et en éliminaient seulement cei qu’ils en jugeaient contestable, le parti réformé s’efforçait, dans ses nouveaux rituels, d’effacer autant que possible toute trace de cette Messe abhorrée. C’est à cpioi on réussit pleinement dans le cas présent : F^e Canon expurgé lui-même, qui figurait dans l'édition précédente, se vit cette fois couper en deux, et le morceau le plus long, relégué au début de l’olTice, y devint une Prière pour l’Eglise militante, tandis que l’autre, très raccourci, prenait place à la fin comme Prière d’action de grâces. Le