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OCCULTISME

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^2) L’état divinatoire. — Mais l’élat particulier qu’on appelle le sommeil, même normal, est un étal dans lequel nos sens et nos facultés psychiques peuvent logiquement subir, et subissent réellement parfois, l’action d’un esprit, ange ou démon, ou du Saint-Esprit lui-même. Les anges étant les ministres de Dieu, il ne reste pratiquement, en dehors des songes naturels ou pathologiques, ((ue les songes diaboliques ou divins. De ces derniers, les saints Livres nous fournissent quelques exemples (songe d’Abimélcch, Gen., xx ; ~ de saint Joseph, Mallk., 11 ; — des mages, Malth., 11, etc., etc.). — Quelquefois la nature d’un songe transcendant demeure douteuse, et les théologiens discutent. — En matière de songes ordinaires, il est quelquefois malaisé aussi d’établir s’ils sont normaux ou pathologiques, si la clairvoyance excessive dont ils témoignent dénote un état morbide ou demeure compatible avec la nature. Dans l’hypothèse de morbidité, il y a lieu d’établir si les démons n’utilisent pas ou ne provoquent pas un état favorable à leur action hypothétique, et qui peut être la matière d’une tentation et d’un péché. On voit combien la question est complexe.

Du reste, l’oniromancie ou divination par les songes n’est pas tout l’occultisme divinatoire. Les autres formes de la mantique postulent chez le devin ouladevineresseun étal morbide ou prélernaturel au moins aussi différent de l’élat normal que le sommeil. En cela la divination se distingue bien nettement de la prophétie ; dans la divination, comme dans tout pronostic ou pressentiment, il y a exaltation de certaines facultés humaines qui vont au-devant de la vérité ; dans la prophétie, il y a démarche de la vérité elle-même vers l’inlelligence humaine qui reçoit sans effort une impression parfaite (cf. saint Thomas, 11 ll**^, q. CLXxi, a. 6 : la prophétie est une connaissance imprimée dans l’intellect du prophète par une révélation divine). On ne s’exerce pas à la prophétie ; on s’entraîne à la mantique. Les Pythies et Sibylles étaient des professionnelles de l’exaltation divinatoire.

L’occultisme peut avoir fait appel au démon pour réaliser ou perfectionner les états divinatoires, dans un temps où la science était loin de pouvoir réaliser ces états par ses seules ressources, loin de concevoir, même, un rapport de cause à effet entre ces états et les éléments éloignés du pressentiment qu’ils déclenchent. Mais toutes les f(jrmes de divination se rattachent à un dédoublement de la personnalité, au gré duquel les facultés psychi<]Ues inférieures augmentent d’intensité. Si la divination est pratiquée à l’état de veille, elle témoigne toujours d’une acuité exceptionnelle de facultés instinctives, d’une espèce de

« flair » discernant une relation que l’intelligence

elle-même n’explique pas, entre le symptôme interpréié et la conclusion du « devin ».

§3) /.’objet de la dii’ination. — C’est ainsi que, dans le corps humain, les signes les plus cachés peuvent être un élément de pronostic et de diagnostic. L’arthritisrae, la tuberculose, la syphilis, se lisent sur certains visages ; et, dans l’état actuel de la science, nous rattachons le signe à son sens par tous les chaînons qui l’en séparent. A la rigueur, le grand nombre des cas où le lien se vérilie autoriserait encore scientifiquement la conclusion, si l’on ne comprenait pas le rapport entre le signe et l’état qu’il trahit. C’est ainsi qu’en tout temps on a pu concevoir un lien entre les traits du visage et le caractère (physiognomonie), ou enire la furme de la main et les apt itudes(ch iromancie), ou en Ire l’examen de l’arrièrefaixet le tempérament du noviveau-né (amniomancie, Lancblin, op. ciV., ^2), ou enfin entre le type de l’écriture et les dispositions révélées par les gestes qu’elle

ébauche (graphologie). Ilien d’occulte dans ces sciences quand les rapports sont observés avec constance, ce qui est le signe de la science, à plus forte raison quand les rapports sont comjjris, ce qui est déjà philosophique. Oo considère comme des savants Lavater et Gall, mais à condition que leurs conclusions soient analysées par des hommes épris de rapports constants (cf. D^ Blondel, La Psyihophysiol. de Gall et ses idées directrices, thèse de Paris, lettres, igii), et non mêlées de spéculations fantaisistes sur les quatre humeurs (Cénia Lioumow, /.es Visages et les Ames, p. 187 sq., après avoir invoqué Lavater, p. 17). Il peut être scientifique d’étudierla chiromancie ou chéiroacopie (Bosc, iJict. ; cf. Vas-CHIOH, /.a Psychologie de lu main, Collection Peillaube, éd. Rivière) ; cette science n’est qu’une forme ancienne (cf. Hekmippk, De Astrologiu diaUigtis, éd. Kroll, p. 5) de la physiognomonie ; et l’on peut même étudier la main du singe (Combes, Le Cosmos, iyo8, cité par Piobb, Année Phitus., 1908) ; mais il faut se garder de tout pronostic établi sur un empirisme incompris et hasardeux (Lamblin, Des vrais secrets des se, occ., p. ^o sq. ; — cf. Stklla, Se. occ., 1900, p. 25, joignant de stériles remarques pour les

« initiés » à des vraisemblances scientifiques sur la

séméiologie des phalanges, p. 22-24). H faut se garder surtout de déterminer ce qui dépend de la liberté de Dieu (ligne de vie) ou de l’homme (don de soimême, carrière, mariage, etc.) : Piobb cite une septuagénairedontlalignedevieétaitrudimentaire (yJnn. pliil., 1907, p. 13.0) ; il y a de nombreux désaccords entre les chiromanciens au sujet de l’inlerprétation de la ligne de vie (Bois, Péril occ, p. 63), et l’on voit des hommes partager un même destin avecdes lignes différentes. — Il n’en existe pas moins une solidarité indéniable entre certaines formes de muscles et certains gestes habituels ou virtuels, et d’autre part entre ces gestes et le tempérament. Il peut donc y avoir un rapport de cause à effet, scientifiquement observé, non seulement entre la forme des mains, mais même entre la démarche, le port de la canne, l’usure des semelles, la tenue des vêlements d’une part, et le caractère d’ailleurs (Echo du merveilleux, 15-o4 et 01-06, 1907) : le bon sens et l’expérience de la vie courante enseignent à juger les gens sur la mine et sur ta tenue, et souvent le flair exercé ne s’y trompe pas. Nul besoin d’occultisme pour remarquer (Lamblin, op. cil.’) que le rire en A est le rire des gens francs. L’écriture aussi dispose favorablement ou non les profanes ; un homme peu exercé en graphologie eoiinail des types d’écriture qui trahissent le sexe, la profession, la nationalité ; il n’est pas jusqu’à certains ordres religieux où l’écriture ne présente chez tous les profès un air de famille. Mais dans le détail les rapports sont iii plus subtils : l’expérience ne les justifie que « huit fois sur dix » (Papos lui-même, /.es ails divinatoire^, p. 12) ; la raison ne les saisit pas : pourquoi le scripteur qui liiirre la première partie de sa signature veut-il cacher quelque chose de sa vie privée (G. dr Fallois, conférence à la suite de l’ouvrage de Duciiatel, cité in/ra, % télépathie, p. 121) Les occultistes ici avouent que ce qu’on « surprend » vaut mieux que ce qu’on c apprend » (Stella, o/). cit., dédicace) : ils n’ont donc |)a8 de principes.

§ 4) /a méthode divinatoire. — Quand la divination s’exerce sur d’autres objets que le corps humain, elle devient de plus en plus aléatoire ; mais il s’y mêle encore un principe scientiliijne de pronoslic plus ou moins perceptible, dans la mesure même où une personnalité humaine agit à son insu sur l’instrument prétendu de la divination. De même que ce n’était pas le coq qui avait averti saint