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iNORD (RELIGIONS DE L’EUROPE DU)

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cessé d'être parlée presque partout depuis un siècle et demi au moins, alors que la messe a été célébrée en langue slave pour la dernière fois, dans la lande de Liincljours, en l’année i^Si ? C’est seulement cbez les Wendes de Lusace — ces Serbes ou Sorabes qui conservent si tidèlement l’usage de leur langue et leurs vieilles coutumes — c’est seulement cbez eux que l’on arrive peut-être à relever quelques traces des anciennes croyances. Encore n’csl-elle nullement caractéristique, l’idée de ces Wendes que les serpents peuvent rendre service, les aider à devenir rapidement riches et ne demandent, pour ce faire, que de légères ollrandes. Le culte féticUique des serpents n’est nullement spécial aux Slaves, et fut également en honneur chez les anciens Germains. La croyance aux vampires n’a rien de plus particulier.

.joutons, pour terminer, que, comme leurs congénères, les Slaves occidentaux croyaient en une vie future. Au témoignage de saint Bonh-ace, chez les Wendes voisins des Germains, les femmes refusaient de survivre à leurs maris, et ces « sulties » se brûlaient elles-mêmes ou se laissaient égorger sur leur bûcher.

^ E. Lks peuples germ.vno-scandinaves. — Nous voici maintenant, dans cette longue revue des religions des peuples de l’Europe septentrionale, arrivés aux plus occidentaux : habitants de l’antique Germanie à l’Ouest de l’Elbe, depuis les contins des cantons occupés par les Wendes et les Wilzes, jusqu’avix ultimes rivages continentaux de la mer du Nord et jusqu’aux plaines insulaires de la GrandeBretagne, habitants des deux péninsules Scandinaves de la grande péninsule suédo-norvégienne comme de la petite péninsule danoise, hal)ilants de l’Islande et peut-être mème(si les Varégues sont Araiment des Scandinaves) dominateurs d’une grande partie de la Russie, voilà tout l’ensemble des peuples dont les religions sont dites germaniques.

I. Observations générales. — Ici les documents sont moins rares et plus complets ; les matériaux d'études ne manquent pas. Mais l'étude n’est pas moins délicate qu’ailleurs ; peut-être même l’esl-elle davantage encore. Voici pourquoi.

Ni dans les Niebeliingen, ni dans les chants Scandinaves, nous n’avons une œuvre totalement originale. Formés au xiio ou au xiii' siècles de divers chants abrégés, allongés, complétés ou modifiés suivant les exigences du système d’arrangement, les chants des Nielietungen ont perdu leur aspect primitif et une sérieuse partie de leur valeur documentaire sous la main du collecteur et de l’ordonnateur ; ils produisent l’illusion de les avoir conservés, mais cependant ils ne peuvent être tenus, dans l'état où ils nous sont parvenus, pour des chants populaires proprement dits. Voilà pour les Niebeliingen ; et que penser des Eddas Scandinaves, de l’Edda poétique comme de l’Edda en prose ? que penser des Sagas islandaises et des chants des scaldes, sinon que leur étude exige autant et peut-être plus de prudence encore, et plus de méthode. En réalité, les bases absolument sures font défaut, car les textes historiques, tous de civilisation chrétienne sinon de civilisation latine, déforment ou faussent inconsciemment bien des faits.

Puis voici une autre dilliculté. Comme les populations linnoises et les populations slaves, Germains et Scandinaves couvrent un terrain considérable, dans les nombreux cantons desquels ils se sont différemment adaptés, dans les nombreux cantons desquels ils ont aussi, au cours des siècles historiques, différemment évolué. De là l’impossibilité de leur attribuer une seule et même religion, et dans l’espace, et dans le temps. Ces peuples ont vécu trop

loin les uns des autres, ils se sont trouvés dans des conditions de vie trop différentes pour qu’ils aient pu la conserver partout la même…, s’ils l’ont jamais eue telle.

Enfin est-il bien légitime de confondre dans une même élude et sous une seule rubrique les Germains et les Scandinaves ? Leur religion, leur mythologie sont elles unes ? Et ne doit on pas morftrer en quoi consistent les différences, comme aussi quelles sont les ressemblances ?

Pour tous ces motifs, nous n’hésiterions pas i séparer les Germains des Scandinaves, si d’autres considérations ne devaient pas, elles aussi, entrer en ligne de compte. Germains et Scandinaves, tous ces grands blonds dolichocéphales, groupés autour des rivages continentaux de la mer du Nord et ayant essaimé ailleurs, sont vraiment des frères de race ; ils ont manifestement des langues, des coutumes, des croyances aussi qui leur sont communes. Dès lors, est-ce surtout aux différences qu’il convient de s’attacher ? Et ne vaut-il pas mieux étudier simultanément des religions dont les unes ont certainement agi sur les autres ? Aux religions germaniques et Scandinaves s’appliquent admirablement, en effet, les célèbres vers d’Ovide :

Faciès non omnibus una, A’ec diversa lamen, qualem decet esse sororum.

Voilà pourquoi nous ne les séparerons pas ici les unes des autres, mais nous nous elToreerons néanmoins de préciser le plus possible ce qui appartient à chacune d’elles. Sur un fond commun, des religions plus ou moins différentes se sont constituées dans certaines parties de l’Allemagne, en Suède, en Norvège et en Islande. Il convient donc de ne pas attribuer à toutes les populations germano-Scandinaves, indistinctement, ce qui a été simplement — autant qu’on peut le déterminer — de telle ou telle d’entre elles.

2. Les croyances religieuses des Germains d’après César et Tacite. — Que le dieu du ciel Zio-Tiwaz provienne de ce que Chantepie de la Saussaye appelle « l’héritage ancestral des IndoGermains », qu’il ait été à l’origine le dieu principal des Germains, ce sont là des idées très intéressantes, et même très acceptables, mais qu’aucun texte historique ne Vient formellement corroborer. Nous nous refusons, pour notre part, à trouver dans le chap. xxxix du Be moribus Germanorum de Tacitk une conûrmation delà seconde de ces idées : Tacite ne dit nullement, en effet, que les Semnons adorent un dieu suprême, et qui régit tous les autres ; il se borne à indiquer que, dans cette tribu, « c’est la divinité qui règne ; tout lui est soumis et obéissant (Ihi regnalor omnium deus ; cetera suhjccta alque parentia). Voilà précisément ce pourquoi les Semnons ne pénètrent que garrottés (vinculo ligatus) à^ns le bois sacré qui sert de temple à leur divinité (ainsi attestent-ils leur propre faiblesse et la puissance du dieu) ; voilà pourquoi, s’ils viennent à tomber, ils ne se relèvent pas, mais sortent du bois en roulant sur le sol. Ne demandons pas aux auteurs anciens ce qu’ils n’ont pas voulu nous donner, et tenons-nous uniquement sur le terrain des faits certains. Dans de telles conditions, voici ce que l’on peut dire.

César et Tacite ont fourni sur les Germains de leur lemps des renseignements trop peu précis, et surtout des renseignements trop localisés pour qu’on en puisse conclure à une religion des Germains leurs contemporains. César attribue aux Germains trois dieux de la Nature : Sol, Vulcanus, /.una, mais il ne dit rien de plus, car il ne connaît pas assez les Germains pour être très explicite, et, d’autre part, nous n’avons le droit de tenir conqite de son témoignage