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NANTES (REVOCATION DE LEDIT DE)

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d’interroger les protestants malades pour savoir s’ils ne désirent pas recourir au ministère d’un prêtre catholique (déclaration de novembre lOSo), liberté pour les enfants protestants de faire profession du catholicisme à partir de l’âge de sept ans (déclaration du fj juin 1681)i suppression pour les protestants de l’accès aux fonctions de notaires, procureurs, huissiers et sergents (déclaration de juin 1685), défense aux ministres de résider dans les localités oîi l’exercice du culte protestant aura été interdit (arrêt de juillet 168a), défense aux protestants de jamais s’assembler autrement que dans leurs temples et en présence des ministres (déclaration d’août 1682), défense aux protestants de tenir des écoles partout où l’exercice public de leur culte n’est pas autorise (arrêt de janvier 1 683), autorisation de soustraire à la puissance paternelle alin de les faire élever dans le catholicisme les jeunes huguenots qui auront abjuré le protestantisme (déclaration de juin 1683), translation aux hô|)itaux des fondations alTcrentes aux consistoires supprimés (déclaration d’août 1684), obligation imposée aux ministres de payer la taille (arrêt dejanvier 168î), défense aux prolestants de prendre des serviteurs catholiques (déclaration de juillet 168/|), interdiction à tout protestant d’exercer la profession de libraire ou d’imprimeur (arrêt de juillet 1685), interdiction aux prolestants d’avoir un cimetière là où ils n’ont pas un centre légal d’exercice de leur culte (arrêt de juillet 1685), défense aux juges et avocats d’avoir des clercs appartenant à la religion protestante déclarationde juillet 1685), éducation et tutelle catholique uniformément ordonnée pour tout enfant dont le père sera mort dans le protestantisme, mais dontlamère sera catholique (déclaration dejuillet1685), interdiction duculteprotestant et destruction des temples dans toutes les villes épiscopales (arrêt de juillet 1680).

/(J Conversions et résistiuice^. Premières « dragonnades ». — L’Assemblée du Clergé de France tenue en 1682, la même qui promulgua la déclaration fameuse lies Quatre Articles, promulgua pareillement trois documents d’une haute importance à proposdu protestantisme : une circulaire C’niiersis per Gallias Episcopis, recommandant le grand œuvre de la conversion des dissidents par les voies de la persuasion et de l’apostolat ; une circulaire Fratrihus Secessionis caUnnianae, adjurant en un très beau langage les protestants français de revenir à l’Unité catholique et donnant à entendre qu’ils attireront de grands malheurs sur leur propre tête s’ils s’obstinent dans l’hérésie ; un mémoire enlin, proposant aux controversistes catholiques seize arguments ou chefs de démonstration aptes à éclairer les dissidents au sujet de la vérité du catholicisme. Le 10 juillet 1682, une lettre de Louis XI’V aux évêques de France s’inspira du même esprit et recommanda la conversion des huguenots par les voies de douceur.

Une vive impulsion fut alors donnée à toutes les (Puvres d’apostolat auprès des hérétiques, notamment aux missions dans les villes et campagnes protestantes.

Il y eut, à cette époque, un nombre considérable de conversions au catholicisme. On ne peut méconnaître que, chez beaucoup de convertis, les considérations humaines se joignirent dans une proportion variable aux Aues surnaturelles et aux argunientsdesapologistes. D’année en année, demois en mois, les rigueurs législatives se multipliaient, rendant toujours plus précaire la situation du protestantisme et des protestants. Au contraire, la profession du catholicisme permettait d’échapper à des contraintes et ouvrait toutes grandes les avenues

des fonctions ou dignités interdites désormais aux huguenots. Pour les protestants auxquels leur conversion pouvait faire subir quelque dommage de fortune ou de situation, par suite de l’hostilité de leur famille, la caisse des com-ersioiis, fondée en lô-yô par Louis XIV et gérée par un converti de grand renom, l’illustre avocat Peilisson, garantissait les compensations nécessaires. L’exemple donné aux hommes de cette génération par Peilisson, par Dangeau, par ïurenne, accentuait d’ailleurs, chez les ])roleslants, le mouvement de conversions que travaillaient à promouvoir par leur apostolat religieux les membres les plus éminenis du Clergé de France : Bossuet, Fléchier, Bourdaloue, Fénelon, Mascaron.

Parmi les contraintes qui auraient multiplié abusivement le nombre des prolestants con’ertis au catholicisme pour de tout autres motifs que ceux de la persuasion intérieure, on cite fréquemment les premières dragonnades, antérieures à l’Ëdit de Révocation. Sous le nom de dragonnades, on désigne une vexation consistant à faire peser d’une manière exclusive et prolongée sur les protestants cette forme de redevance qui consiste dans le logement des troupes. Sachant qu’ils avaient affaire à des sujets tenus pour réfraclaires aux intentions du roi, les soldats (spécialementlesdragons, d’onlenom de dragonnades), hébergés durant de longs mois chez les prolestants se seraient livrés, avec plénière impunité, à toutes sortes de déprédations et de violences odieuses. La conversion au catholicisme aurait élé, pour les huguenots, un moyen de s’exonérer des dragonnades.

De fait, il y eut des dragonnades, répondant à cette description, d’abord dans la généralité de Poitiers en 1681. sur l’oi’dre de l’intendant Marillac ; puis dans leBéarn en |685, sur l’ordre del’intendant Foucault ; dans la généralité de Montauban, à la même époque, sur l’ordre de l’intendant La Berchère, et dans quelques autres régions. Mais on doit reconnaître que ces brimades odieuses et stupides eurent alors un caractère purement local et furent exécutées à l’insu de Louis XIV et de ses ministres. Quand le gouvernement royal en eut été averti, elles provoquèrent presque toujours des ordres en sens contraire, avec un désaveu et une réprimande pour les intendants responsables, et, finalement, déterminèrent la révocation de Marillac. Les dragonnades antérieures à l’Eilit de Révocation n’engagent donc pas la responsabilité du gouvernementde Louis XIV, moins encore de l’Eglise de France ; elles ne peuvent être comptées parmi les causes importantes du mouvement de conversions qui s’accentua, tantôt pour motifs religieux et tantôt pour motifs d’intérêt politique et humain, de 1682 à 1680.

L’Assemblée du Clergé de France, tenue du 25 mai au 28 juillet 1685, se montra impressionnée, beaucoup moins par la conversion d’un nombre apprécial )le de protestants que par la résistance opiniâtre de l’immense majorité d’entre eux : résistance quiavait trouvé sa formule dans un écrit retentissant du ministre Claude : Considérations sur les Lettres circulaires de l’Assemlilée du Clergé de France de l’année lôS’i. Par ailleurs, les protestants du Midi avaient répondu en maints endroits, par des attroupements séditieux, aux sollicitations de l’Eglise et aux rigueurs législatives de l’Etat. Dans une assemblée tenue à Chalençon en juillet 5683, ils avaient marqué la résolution de rouvrir par la force les temples interdits. Aussi, une commission fut-elle nommée, en 1685, par r.ssemblée du Clergé de France, pour « rechercher et ramasser les calomnies, les impostures et les injures que les prétendus

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