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MYSTERES PAÏENS (LES) ET SAINT PAUL

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est mort réellement. Sa résurrection est un fait historique qui a été attesté par de nombreux témoins. Osiris et Attis, au contr ; iire, sont des personnages mythiques, représentant d’une façon symbolique les changements annuels de la végétation, qui s’arrête en hiver, qui meurt dans les conceptions populaires d’autrefois et qui reprend vie au printemps, qui renaît. Le meurtre d’Osiris et la mort d’Attis, opérée par lui-même, n’avaient rien de méritoire et n’ont jamais été considérés comme ayant une elVicacilé rédemptrice ; ils ne sont que la transformation mythologique de phénomènes naturels ou, comme dans le culte de Mithra, l’explication légendaire d’un mythe astral. La sotériologie des mystères ne comporte donc ni participation morale chez l’homme ni collaboration méritoire et etBcace chez les dieux. Il n’j' a aucune relation entre la mort des dieux et les péchés des hommes. Ces morts des dieux peuvent-elles donc être comparées à la mort du Christ donnant sa vie pour l’humanité ? Il n’y avait, en outre, aucun rapport entre les lamentations rituelles des femmes, pleurant à une époque déleriuinée la mort d’Osiris et d’Attis, et la participation du chrétien aux soutTrances du Christ qui le transforment et lui donnent une vie nouvelle, laquelle se poursuit dans toutes les actions de sa vie quotidienne ; il n’y arieJi là de rituel ou de momentané.

Dans les religions de mystères, le salut, ^orr.pix, n’impliquait pas la rémission du péché, mais était la délivrance de ces fardeaux, le destin, la nécessité, les maux physiques, et entin la mort qui oppriment l’homme ; la vie immortelle était analogue à la vie sur la terre. EnQn, ce salut était obtenii par l’accomplissement strict, mécanique des cérémonies sacrées ; la volonté de l’initié n’était pas nécessaire pour l’obtention des effets de l’initiation. En fait, le salut était tout extérieur, n’atteignait en rien l’intérieur de l’initié et n’inlluait en aucune façon sur sa conduite morale. L’initié n’assumait aucune obligation morale. C’est seulement au temps de l’empire, dit le P. L.GHANGE (Suint Paul, l’Epitre aux Homains, p. 19. Paris, 1916), que l’idée du salut prit corps dans les mystères. Encore est-il que le salut consiste à obtenir l’immortalité bienheureuse, à échapper aux périls de l’enfer ou aux embûches des démons, à se purifier par les rites et l’ascèse, non à être délivré du péché par le pardon (de même RBiTZEKSTBiN, i’oiniandres, p. 180, note i).

Chez saint Paul, l’idée du salut était toute différente ; elle procédait d’abord de l’Ancien Testament, /s., xLvi, 13 ; iii, 10, où le salut comportait la délivrance des maux matériels et spirituels. Pour l’Apôtre, les termes sci-zr.pix et o^’^ïm ont un sens strictement spirituel. Le salut est la justification du pécheur, une réconciliation avec Dieu, une participation à la vie du Christ, opérée par l’amour de Dieu. « Dieu, écrit-il aux Romains, v, 8-10, prouve son amour envers nous en ce que le Christ est mort pour nous quand nous étions encore des pécheurs ; à bien plus forte raison donc, étant maintenant justifiés par son sang, serons-nous sauvés par lui de la colère, car si, lorsque nous étions ses ennemis, nous avons été réconciliés avec Dieu par la mort de son Fils, à bien plus forte raison, étant réconciliés, serons-nous sauvés par sa vie. n II suit de là que la vie morale de l’homme justifié est transformée. Nous ne devons plus vivre selonla chair, llom., iii, 12. « L’amour du Christ nous presse… il est mort pour tous, afin que ceux qui vivent ne vivent plus pour eux-mêmes, mais pour celui qui est mortet ressuscité pour eux. « Il Cor., v, 14-15.

Nous sommes ici dans une atmosphère bien différente de celle des religions de mjstéres. On ne retrouve pas d’ailleui’s dans ces dernières cette idée

paulinienne du salut accordé par la foi an Fils de Dieu, dans laquelle vit le fidèle, Gal., 11, 20 : « Je vis, non plus moi-même, mais le Christ vit en moi. Et la vie que je vis maintenant dans la chair, c’est une vie dans la foi à Dieu et au Christ qui m’a aimé et qui s’est livré lui-même pour moi. » Il y a donc entje le Christ et le fidèle une union qui produit dans celui-ci une lloraison de bonnes actions, et cela dès ici-bas. <i Ceux qui sont au Christ, dit saint Paul aux Galates, V, 2 : 5, ont crucifié la chair avec ses passions et ses désirs. » Les religions de mystères n’offrent rien de semblable.

Nous devons examiner ce que signifiaient chez r.pôtre la mort et la résui’rection du fidèle baptisé dans la mort du Christ et ressuscité avec lui. Observons d’abord que cette mort et cette résurrection ne ressemblent en rien à celles de l’initié aux mystères d’Osiris, qui participait à la renaissance du dieu au printemps. « Notre vieil homme, dit saint Paul aux Romains, vi, 6, a été crucifié avec le Christ, afin que le corps du péché fût détruit, pour que nous ne fussions pas assujettis au péché. » Dans la pensée de Paul, il s’agit de la mort au péché et de la résurrection à une vie de sainteté, conceptions morales, nous le répétons, que l’on ne trouve pas dans les mystères d’Osiris ou en d’autres, qui reproduisent dans un certain degré les idées mystiques inhérentes à la nature humaine.

Enfin, remarquons qu’on ne retrouve nulle paît dans les é|)itres pauliniennes cette conception de la déification de l’initié, que nous avons signalée ]ilusieurs fois dans les religions de mystères. Le fidèle est l’enfant, rexvo », le fils, ^’o ; , de Dieu : « Vous avez reçu, dit l’Apôtre aux Romains, vni, 15, 16, l’esprit d’adoption par lequel nous crions Abba, Père. L’Esprit lui-même rend témoignage à notre esprit que nous sommes enfants de Dieu. Or, si nous sommes enfants, nous sommes aussi héritiers, cohéritiers du Christ », ce qui ne veut pas dire que nous sommes déifiés ; car, ainsi que Paul l’affirme aux Corinthiens, dans sa seconde épîlre, iii, 18, nous sommes transformés en l’image du Christ. Or, être conforme à l’image de quelqu’un ne signifie pas être de même nature que lui. Le chrétien, cependant, participe à la nature de Dieu par le don de la gi-àce. C’est dans ce sens qu’il faut interpréter tous les passages, où il est parlé de l’union du fidèle avec le Christ, de sa vie dans le Christ, par le Christ.

Nous compléterons cet exposé en établissant qu’il n’y a dans les doctrines de saint Paiil sur le baptême du fidèle et sa participation à la cène eucharistique aucune ressemblance, sauf peut-cire de termes, avec les liturgies des religions de mystères.

V. Les rites dn baptême. — Les Actes des Apôtres nous apprennent que, dès les premiers joujs du christianisme, les apôtres baptisèrent ceux qui crurent en Jésus-Christ, 11, 41 ; iv, 4- Us accomplissaient ainsi l’ordre de leur Maître, qui leur avait enjoint de baptiser toutes les nations au nom du Père, du Fils et du Saint-Esprit, il//., xiviii, 19. Il est souvent ensuite parlé dans le courant du même livre, viii, 12, 16 ; x, 48 ; xvi, 15 ; xviii, 8, elc., de ceux qui furent baptisés. Saint Paul parla à diverses reprises, Rom., vi, 3 ; I Cor., i, 15, 16 ; xii, |3 ; Gui., iii, 27, de ceux qui ont été baptisés ; du baptême et de ses effets, Rom., vi, 4 ; Eph., iv, 5 ; Col., Il, 12. et de son enseignement, il ressort que le baptême est un bain de régénération et de renouvellement : Dieu nous a sauvés, i-w7£v, par l’abluliondc la régénération et du renouvellement de l’Esprit-Saint, qu’il a répandu abondamment sur nous par Jésus-Christ, notre Sauveur, Tiie, iii, 5.