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MYSTÈRES PAÏENS (LES) ET SAINT PAUL

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tuniquea successives, des qualités de ces astres ». Mais quel rapport peut-il y avoir entre cette idée et la conception du corps pneumatique chez Paul, dans laquelle le rvrjfirz n’est pas quelque chose d’extérieur, un vêtement sur le corps, mais un principe d’action qui anime le corps ?

Pour étayer son hypothèse, Reitzenstein cite les passages suivants des écrits hermétiques : Hermès (Corpus Hermelicum, VIII, 2) exhorte les hommes à chercher un pilote pour les conduire vers les portes de la Gnose, où brille l'éclatante lumière… et à déchirer la robe qu’ils portent, ce vêtement d’ignorance principe de la méchanceté. Constatons de nouveau que la conception paulinienne est tout autre. Dans un autre passage des mêmes écrits, XVIII, il est parlé du a^i/jot à7ùij.y.zm, mais le contexte indique (pie nous sommes là dans une spéculation métaphysique, qui ne peut être mise en rapi)ort avec la conception tout objective de Paul. Ailleurs encore, XIII, 14, Tat, qui vient d'être régénéré, demande à son père Hermès si ce corps, composé de puissances, se décompose jamais. Hermès lui répond : Le corps sensible de la nature est loin de la génération essentielle (du corps régénéré). L’un est décoinposable, l’autre ne l’est pas ; l’un est mortel et 1 autre inmiortel. Ignores-tu que tu es devenu Dieu et fils de l’Un, ainsi que moi ? Il est question dans ce passage d’une transformation essentielle de l’iiomme qui devient Dieu. Cette idée est tout à fait étrangère à saint Paul, pour qui, dans le passage du corps psychique au corps pneumatique, il n’y a pas un changement de substance, mais de principe d’action.

Quelle est donc chez lui la conception du - : >u.y-TvîvuaTixov ? Pour l’expliquer dans son entier, il fauilrait exposer toute la doctrine de l’Apôtre sur la résurrection des morts, travail qui a été fait ailleurs et auquel nous renvoyons le lecteur (Mangknot, OTi. cil. Ueiue du Clergé français, t. LXXXIV, p. 257-'289) : restreignons le sujet au nécessaire. Uemarquons que Paul met en opposition le corps psychique et le corps pneumatique : ^TreicsTai 7û/j.y. ^jyiv.iv, iysipzrvA aSi[j.v. "n-Jijij-v.Tt'/Av, I Cor.^ XV, /|/i. Or, le corps psychique, c’est le corps animé par la l’uyr :  ; le corps pneumatique sera donc le corps animé par le TTJsj/iv.. En cette vie, le corps humain est surtout sous l’influence de la ^'jz^, , principe de vie animale, siège des sensations, des instincts, des sentiments ; il est corps psychique, quoique l’action du r> ; -3// « s’exerce déjà en l’homme dès cette vie, soit au point de vue naturel, soit, chez le chrétien, an point de vue surnaturel. Mais le corps ressuscité sera dégagé de toute opération animale, et il aura pour principe de vie le TJij/j ! /.. Ce tosî/jioc n’est pas, comme on pourrait le conjecturer, le Saint-Esprit, c’est l’esprit, élément supérieur de la personnalité humaine, agissant en union avec le Saint-Esprit. L’homme ne sera donc pas divinisé, comme l’enseignent certains passages de la littérature des mystères, que nous avons cités.

Ce corps pneumatique sera semblable au corps glorifié de Notre-Seigneur, nous dit saint Paul, Philip., III, 21 : Celui-ci (Jésus-Christ) transformera le corps de notre humiliation pour le rendre semblable au corps de sa gloire, roi 70J// « Tt t^ç oo'çï ;  ; « ùtoj j cf. ( Cor., XV, liÇj. Ce corps du Christ a donc pour caractéristique spéciale d'être un corps de gloire, c’est-à-dire un corps glorieux. Devrons-nous admettre avec Reitzenstein que Paul a emprunté aux mystères cette idée de la ôo ? « , lumière brillante ?

Dans les écrits hermétiques, l'âme transformée est représentée comme joigTiant le choeur des dieux, et cela est la gloire la plus parfaite, r, zùnozdrr, ti-v., de l'âme. Dans un papyrus magique, un magicien prie Isis de la façon suivante : AiçKjov, « ; dj ; iSi^Kiy. t « iv5 « ot

wj jio’j 10-j 'Cipci’j. On peut établir un curieux rapprochement de cette prière avec celle de Jésus, s’adressant à son Père : ïlccr^p, od^txvjv q'/j riv jiivj îvk 6 uii^ ioidrr, 15. Joan., xvii, I, et un peu plus loin, ^ 4, ^/<^ » î

Dans un traité attribué à Koraarios il est parlé de ceux qui revêtiront la îciçK ix toO n-jpii. Mais ce sens est inconnu à la langue grecque courante. Or, Paul a employé le mot oà-v. très souvent, 77 fois, et d’ordinaire au sens qu’il reçoit dans les Septante. Dans son expression, aùiiy. ri-^ 150f>iç, on pourrait retrouver le sens donné à ôi|K dans Jsaie, lii, 14 : Mriuç y.Soïïjii àrrà vydptîiTTuv zà sië^i G-oy, xv.i yj ôo'çk co’j kttô tôiv v.vdpûnoiv. où il entre dans ce terme quelque chose de physique, comme dans plusieurs écrits apocryi>hes, Hénoch, XLv, 3 ; IV Esdras, vii, 78-91 ; Apoc. jiarucli, XLviii, 49, 50, dans lesquels la gloire est assimilée à une grande lumière.

Il nous semble que l’on devrait rattacher cette idée du corps de gloire de Jésus-Christ à la vision que Paul en eut sur le chemin de Damas, où le Seigneur lui apparut enveloppé de lumière ; il n’y voyait pas à cause de l'éclat de cette lumière, Jifa ^oZ j-wri^ ir.si-K’j, Jet., XXII, II. Il y a aussi dans cette expression un souvenir des théoj)hanies de l’Ancien Testament, où Dieu apparaissait à l’homme dans sa gloire, /.et'., IX, 23 ; Nombres, xir, 28, etc. et de laShekinah, gloire de Dieu, souvent mentionnée dans les Targums.

Dans sa première épître aux Corinthiens, Paul leur apprend que nous porterons l’image, rr.v sUiw.^ du Céleste, c’est-à-dire de Jésus-Christ, xv, ^9 ; nous devons être transformés à la même image, celle du Seigneur, H Cor., iii, 18. Pour lui, d’ailleurs, l’homme est l’image et la gloire de Dieu, ii/.ôrj xy.i ôi ; a &aoû,

I Cor., XI, 7 ; l’homme est renouvelé selon limage de son Créateur, H Cor., iii, 10 ss. Et, en effet, d’après l’Apôtre, le croyant est conforme à l’image du Fils de Dieu, ffoni, , viii, 29, lequel est l’image de Dieu,

II Cor., IV, 4 ; Col., I, 15. Le croyant est donc transformé à l’image de Dieu.

Paul aurait-il emprunté ce terme et l’idée qu’elle exprime aux liturgies des mystères qui enseignaient la déification de l’initié ? Nous ne le pensons pas, car l’idée et l’expression lui venaient directement de l’Ancien Testament. Dieu a fait l’homme : Il l’a fait suivant l’image de Dieu, tot m-j « @ : i-j, Gen., I, 27. Dieu a créé l’homme pour l’immortalité et il l’a fait image de sa propre nature, cixz-jv- if.c, iSiai iôc ; T » : Tî ; ,.Sagesse, 11, 28 ; le Seigneur a fait l’homme de la terre… il la fait à son image, xv.t ix6-j% « jtsû. Ecclésiastique, xvii, 3, L’enseignement de l’Ancien Testament est tellement précis sur ce point qu’il est parfaitement inutile d’aller chercher cette expression et cette idée dans les liturgies des mystères, qui d’ailleurs l’expriment beaucoup moins clairement.

De ces études de détail, passons maintenant à un examen portant sur les rapports qu’on a prétendu relever entre les conceptions centrales des mystères et les doctrines de saint Paul.

IV. Les conceptions centrales des religions de mystères et les doctrines de saint Paul. — Avant de traiter directement cette question, il est bon de nous demander si nous ne trouverons pas ailleurs que dans les religions de mystères quelques-unes des idées que l’on prétend que saint Paul leur aurait empruntées.

Parmi les idées que nous avons rencontrées dans plusieurs des religions de mystères, il 3' a celle de la déification de l’initié, lequel reçoit la communication directe de la vérité par la révélation divine. Or,