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MYSTÈRES PAÏENS (LES) ET SAINT PAUL

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pour le même sens du terme itiiTrr, pio->, Rom., xvi, 25, î6 ; Col., I, a6, 2-j ; et Epli., i, g, lo : « Le mystùre de la volonté de Uieu, qu’il avait résolu en luimême, était de réunir toutes clioses dans le Christ. » Pour saint Paul, le terme, </.jjt/, , c(o> désigne donc une vérité cachée, qui est révélée par l’Esprit. Enlin, jx : j^zf, pi.cj est employé quelquefois dans son sens ordinaire ; il désigne la vérité chrétienne cachée aux païens : ixjiTipioj rf, i ttittsw ; , I Tim., iii, g, 16. Le a.i^rr, ', i', j Tf, i à-jo/jLtxi, Il Tliess., Il, 7, c’est le dessein formé par l’inique en opposition avec le dessein sauveur de Dieu.

Nous devons examiner un passage de la première épître aux Corinthiens, 11, i-15, oùil semblerait que Paul a fait allusion aux mystères et s’est servi de leur terminologie. Il parle de la façon dont il a prêché Jésus-Christ, il n’a connu parmi eux que Jésus crucilié, qui est une folie pour les païens, atin que leur foi soit fondée non sur la sagesse des hommes, mais sur la puissance de Dieu. Et, ajoute-t-il, t 6, « nous prêchons une sagesse parmi les parfaits, h rôti TUsicii, sagesse non de ce siècle…, mais nous prêchons une sagesse de Dieu mystérieuse, £v ij.j'7Tr, piu, sagesse cachée, que Dieu a décrétée avant les siècles pour notre gloire et qu’aucun des princes de ce monde n’a connue ». Dieu a révélé par son Esprit les choses que l’homme ne connaissait pas, « lesquelles nous annonçons, non avec des discours qu’enseigne la sagesse humaine, mais avec ceux qu’enseigne l’Esprit, appropriant les choses spirituelles à ceux qui sont spirituels, mîjuxzixoîi TrvE^juaTizà ^j-jxptvyjrsi. Or, l’homme naturel, 'i-j/ix<ii, ne reçoit point les choses qui sont de l’Esprit de Dieu, car elles lui sont une folie et il ne peut les connaître, parce que c’est spirituellement, TOîj/ty.TixfO ; , qu’on en juge. Mais l’homme spirituel, ms^/iKTixcç, juge de toutes choses. »

Saint Paul se rappel ! e-t-il ici les mystères païens et veut-il dire qu’il va enseigner aux Corinthiens une sagesse sous forme de mystère, qui ne sera révélée qu’aux parfaits ? En d’autres termes, veut-il instituer des mystères chrétiens analogues aux mystères païens, ou identihe-t-il les doctrines chrétiennes, qui seraient en mystère, avec celles des cultes des mystères ? Pour se rendre compte de la pensée de l’Apôtre, il faut d’abord déterminer la signification exacte de la phrase : Ac/./cj//£v 0£5û Tî^tav èv //j7tï ; ^(î.j rr, v ùnoxî)rp-.., u/i ; v< ; v. A quel mot devons-nous rattacher £v ij.ouTnpiu' ! On ne peut grammaticalement le joindre à tv-, v ccnoxsxpu/).[i.ivr, v, ce qui signifierait la sagesse cachée sous forme de mystère, car, si telle était la pensée de Paul, il aurait dû écrire : Tr, > tj p : jf : Tr, ptu a ::o/.î/.p-ju.p.évr, v, ce qui d’ailleurs aurait été un pléonasme. Quelques exégètes rattachent j » ixjTzr, pit, > à 't.a.'/.'^jp.i/. ce qui ferait dire à Paul que la sagesse de Dieu qu’il enseignait était un mystère qui ne devait être révélée qu'à quelques-uns, aux initiés, ce qui est contraire à l’idée que Paul avait du salut qui était destiné à tous les croyants.

Il resterait à joindre è » p-juT-opia à tojpi’kv ; nous avons une phase analogue dans liom., v, 15 ; SupiUh /. « pm. Dans ce cas, il faudrait traduire : Nous prêchons la sagesse mystérieuse de Dieu, celle qui est cachée, que Dieu avait décrétée auparavant pour notre gloire : sens qui rentre dans la signification que Paul donne ordinairement au terme iJ-uarripim. Nous ne pensons donc pas que l’Apôtre ait voulu dire qu’il enseignait la sagesse de Dieu comme un mystère qui ne doit être révélé qu’aux initiés.

Paul dit cependant qu’il prêche une sagesse parmi les parfaits, h toTç, rùsioti. Ne semble-t-il pas qu’il identifie cette sagesse, prèchée aux parfaits, aux doctrines des mystères, qui n'étaient révélés qu’aux

initiés, T^eiei, ceux qui étaient complètement instruits par opposition aux novices ' ? Paul aurait donc emprunté, dit-on (Loisv, art. cit., p. 163), cette expression à la terminologie des mystères. Mais remarquons qu’il n’existe a-icun passage des auteurs grecs où T£/£io5, signifie initié aux mystères. Celui-ci était appelé T£Ti/t-Tui « ; , T£/=5 « ei ; , ^ùr, ùp.f.mi et surtout //mtï ;  ;. Nous savons seulement que, dans les livres hermétiques, de date irai)récise, ceux qui ont reçu le baptême du m^ ; divin, deviennent rs/ii^t (HkitzensTEiN, Myslerien-Religionen, p. 163).Ce n’est donc pas à la langue des mystères que Paul a emprunté le terme zùiioi. Le tiendrait-il de Pythagore, qui divisait ses disciples en rù.iwi et envïimoi ? Dans la même épître, I Cor., XIV, 20, l’Apôtre paraît en effet opposer les voT.ioi aux T£ ; £<o< : « Frères, dit-il, ne soyez pas des enfants en raison, mais, en fait de malice soyez des enfants, v/ ; 7rià^£T£, et pour ce qui est de la raison soyez des i)arfaits, TÙiM « c’est-à-ilire des hommes faits. L’opposition est ici entre l’enfant et l’homme arrivé à son plein développement. Cette opposition est très marquée dans l'épître aux Ephésiens.iv, 13s. : « Jusqu'à ce que nous soyons tous parvenus… à l'état d’homme fait, môpc/. té/eiw, afin que nous ne soyons plus des enfants, vy ; 77 « i. » Il est inutile de chercher l’origine de ces termes : Paul leur a donné le sens qu’ils avaient dans la langue courante.

L’idée est différente dans le passage que nous discutons : Tiiso ; y est l'équivalent de msvp.o.Ttxôi. Développant la pensée qu’il a émise, d’une sagesse enseignée aux parfaits, Paul dit, II Cor., 11, 13, qu’il annonce les choses de Dieu, non avec des discours qu’enseigne la sagesse humaine, mais avec ceux qu’enseigne l’Esprit, appropriant les choses spirituelles à ceux qui sont spirituels, rv£u/A « T « îr ;. Et une autre preuve que tt^-j/^tizoî égale ri/uoi, c’est que dans la même épître, iii, i, au lieu d’opposer comme ailleurs ts/£io ; à "ttiî ; , il remplace te/siî ; par iTvsj/ic<71 « ç. Le sens que l’Apôtre donne à n-jij/i’y.rix-.i nous indiquera donc celui qu’il donne àré/ic^ :.

Pour saint Paul, le msu^y.rtxii est celui qui a reçu l’Esprit qui vient de Dieu, celui qui est doué de l’esprit, meùixx. Nous avons donc à rechercher la signification qu’a pour lui le terme msOp.v., le sens dans lequel il l’emploie, et cela d’autant plus que Keitzrnstkin (Ihid., p. 140) prétend que Paul s’est inspiré du sens qui était donné à miùa-A dans les papyrus magiques, dans la littérature, la philosophie, l'éloquence et la poésie païennes. Il en serait de même pour les termes 'i-j-/ix6 : et msjaxrix.oç, et vsO ; serait l'équivalent de r.yeûyc/. D’après lui, dans les papyrus magiques et les écrits mysthiues, comme dans Paul, r.veCfiy., au sens d’esprit de l’homme, d'àme humaine, est opposé à na/m et à ^c/.p-. Voici les citations qu’il donne des divers sens de ce terme : 'EmxKhOpxi as ri » x-isc/yza… 7r « T « v m.pxx x « i ttkv -veù^k. (Kenyon, Greeli Papyri,. p. 80. Cf. Pap. Berol., ', 179). Il est appelé saint : 'K-nixaicxtuM m Upi-j TJiûpM, (Wessely, Zauberpapyri, , p. 140). Dans d’autres papyrus (Ib. I, p. 68 ; Kbnyon, op. cit., I, p. 284), il est qualifié de Dieu,

1. LoiSY (L’Evangile de Paul, H. H. L. Vi., N. S., t. V, p. li').'i) reconnaît cependant que Paul n’instituait pas deux degrés d’initiation. La distinction est seulement analogue à celle des degrés d’initiation des mystères d’Eleusis. Paul n’entend pas dire qu’il ait un petit symbole secret, qu’il réserve aune catégorie spéciale de mystères, mais il n’en a pas moins l’idée et lu pratique de quelque chose qui y correspond et qu’il ne sait expiimer autrement que dans le langag-e des mystères. Loisy pense répondre ainsi à rohjeciion de Clomcn, qu’il n’y avait pas de doctiine secrète dans le christianisme piiniilif et que, lorsque Paul parle de mystère, ce n’est pas du tout dans le sens des cultes païens.