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MONDE (LE SYSTÈME DU)

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I)rincipcs d’une métaphysique douteuse. Pour tenir compte lie la uon-oniformité des mouvements angulaires des astres errants, Euuoîe de Cnide, disciple de Platon (iv siècle av. J.-C.), puis Gallippk, construisent le système dit des sphères homocenlriinies. C’est le système d’Aristole, dans lequel les huit sphères coJicenlriques tournent respectivement autour de huit axes tixes, diversement inclinés. Dans cette hypothèse, les dislances des astres errants à la Terre restent constantes. Mais, à défaut de mesures précises, les variations d’éclat de ces astres donnent a penser que ces dislances ne sont pas constantes. Dès le v" siècle avant J.-C, Héraglide du Pont, qui, pour expliquer le mouvement diurne de l’ensemble des astres, adoptait l’hypothèse de la rotalion de la Terre (Alliaume, ELémenis d’Astruiiomie, p. aSa), foil circuler le Soleil autour de la Terre, Mercure el Vénus autour du Soleil (Tu. H. Mahtin, Hypothèses astronomiques des Grecs, cli. v, § 3. — DuHBM, f.a Physique néoptatonicieune au Moyen Age, p. 1 1). A.U commencement de la période alexandrine (m" siècle av. J.-C), on admet sans dilUculté des mouvetnents circulaires dont les centres ne coïncident pas avec le centre de la Terre. Hipparque (il » siècle av. J.-C.) fait circuler la Lune et le Soleil sur des circonférences excentrées. Alors apparaissent les premières mesures numériques : du rapport des dislances de la Terre au Soleil el à la Lune, par Aristahqub de Samos (iii « siècle av. J.-C.), du rapport du rayon de la Terre à la distance de la Terre à la Lune, par Hipparque. Enfin, au commencement de l’ère chrétienne, Ptolémée d’Alexandrie achève la construction du système qui porte son nom. Chaque astre errant est porté par un cercle, nommé épicycle, qui tourne autour de son centre, pendant que ce centre se déplace sur un autre cercle, concentrique ou non à la Terre. Ayant développé son système jusqu’à la détermination numérique de tous ses éléments, Plolémée a obtenu une représentation, assez exacte au point de vue qualitatif, des variations de distance des astres errants, et figurant les mouvements angulaires, au point de vue quantitatif, avec toute l’exactitude que comportait alors la précision des observations.

Cependant, pour un esprit imbu des principes de la physique péripatéticienne, un tel système était peu satisfaisant. Aussi les commentateurs, tels que Proclus el SiMPLicius, qui étudiaient ces questions plutôt en philosophes, en physiciens disaient-ils, qu’en astronomes, ne regardaient-ils tous ces cercles que comme des fictions de géomètres destinées à faciliter le calcul des movivements (Duhem, lissai sur la Motion de Théorie physique, p. 2’j). Ils admettaient bien qu’une science particulière ne doit se préocciii)er que de la valeur explicative de ses hypothèses et non de leur vérité objective. Mais peut-être sentaient-ils confusément le déficit de ce système, l’absence de lien entre la nature des corps célestes et leurs mouvements. Cette nature des corps célestes, la physique péripatéticienne avait cru pouvoir la déduire de principes métaphysiques. Proclus et SiMPLioius pressentaient-ils qu il fallait suivre la marche inverse ? En tout cas, une représentation vraiment satisfaisante restait encore à trouver.

IV. Les systèmes du inonde au Moyen Age. — Après les invasions des Barbares, le Moyen Age s’occupa d’abord de faire en quelque sorte l’inventaire des connaissances acquises, en particulier dans ie domaine astronomique. Au temps de Charles le

: -hauve (ix" siècle), Soot Erigènk écrit un traité en

cinq livres De dii’isione Naturæ (Migne, P.f.., GXXII), dont le troisième est en partie consacré à l’astronomie.

Il s’inspire des homélies de saint Basile sur l’Heaxaméron, de la Géographie de Ptolémée, du Commentaire de saint Augustin sur les Catégories d’Aristole, du Commentaire de Chalcidius sui- le Timée de Platon. Il y rapporte l’hypothèse d’Uéraclide du Pont, qu’il élargit même en faisant circuler autour du Soleil toutes les planètes sauf Saturne (Duuiini, Physique néoplatonicienne, p. 30). Guillacme de Conçues (1080-1 150), auteur d’un Commentaire sur le Timée d’après la traduction de Chalcidius et d’un traité De Philosopliia Mundi, distingue, avec une remarquable netteté d’esprit, entre la rei^résentation des apparences et l’étude de la nature des choses (DuHKM, Physique néoplatonicienne, p. 71). Bien que ses connaissances astronomiques soient assez confuses, il expose néanmoins assez clairement le sj’Stènie d’Uéraclide du Pont.

Au début du xiu’siècle, se répandent les traductions latines des œuvres des astronomes arabes, des commentaires et versions arabes d’Aristole. Après s’être d’abord contentés d’étudier, de commenter, de réduire en tables le système de Ptolémée, certains astronomes arabes, tels que Thabit-in-Kourrah (fin du ix° siècle) et Ibn-al-Haitan, auteur de la Perspective d’Al-lIazon, prétendent en conclure la réalité objective des hypothèses de Ptolémée. Alors Ibn-UosKHu (.vEMPACF.), Ian-Tofail (Abou-Bacer), Iiin-Badia (AvERHoiis), Al-Bitrogi (Alpetragius), défendent, au nom des principes d’Aristole, la réalité objective du système des sphères homocentriques. Us affirment avec raison que l’accord avec les observations du système de Ptolémée ne prouve pas nécessairement la vérité objective de ses hypothèses. Mais le désaccord du système homocenlrique avec l’expérience n’ébranle pas leur aveugle confiance en la physique péripatéticienne. Plus raisonnable, le juif Moïse Ben Maimoun (Maimoniuk), revient aux idées de philosophie scientifique de Ptolémée, Proclus, Simplicius : la science humaine ne peut atteindre à la pleine connaissance des choses célestes, elle peut seulement en donner d’imparfaites représentations intellectuelles (Duhbm, Théorie physique, p. 3g). Idée en partie exacte, mais, comme celle de Proclus, trop agnostique et trop influencée par l’affirmation gratuite d’une différence de nature entre les corps célestes et les corps terrestres.

La scolastique chrétienne du xiii » siècle se trouvait donc en présence d’un seul système d’astronomie proprement dite, celui de Ptolémée, pratiquement applicable à la prévision des phénomènes astronomiques, — et de trois systèmes de philosophie astronomique. Celui d’Averroés et d’Alpetragius admettait tous les principes de la physique céleste d’Aristole, et, par suite, imposait a priorila cosmographie des sphères homocenlriques. Celui des premiers astronomes arabes estimait que l’accord avec l’expérience prouve la réalité objective des hypothèses de Ptolémée. Celui de Proclus, Simplicius, Maïmonide prenait à l’égard des principes péripatéliciens, une position agnostique, el donnait à l’astronome le droit de n’en pas tenir compte dans la construction de son système du monde.

Le premier de ces trois courants d’idées est suivi par Roger Bacon (Duuem, Théorie physique, p. 41-46). Saint BoNAVENTURE (In II Sent., disl. i^, p. 2, q. 2) el saint Thomas d’AQUiN (Exp. sup. lib. de Cælo, in lib. ii, lect. 17) y semblent plutôt favorables. C’est pleinement la manière de voir de nombreux représentants de l’école à tendances averroïstes de Padoue, tels que Alessandro Acuillini ((^^hh^ho ; - /(/ ;  ;  ; de Orhibus, Bologne, 149^), Agostini Niro (Traduction commentée des quatre livres De Cælo, Venise, 154y),