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MOÏSE ET JOSUE

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consacrera l’engagement, qui sera définitif (Ex., xxi, 5, 6).

c) Le sort des femmes esclaves est difTcrent. Le cas

visé est celui de la femme esclave qui devient concubine dans la maison de son maître ; c’est, ou bien parce que telle est la condition la plus fréquente, sinon normale, des femmes esclaves, ou bien parce que le législateur ne vise que ce cas particulier. L’esclave-concubine ne sort pas la septième année (Ex.^ xxi, 7), sauf le cas (Ex., xxi, _ll) où son maître n’aurait pas eu égard aux mesures prises pour sauvegarder ses intérêts et sa dignité [Ex.. xxi, 8-10).

(l Toutefois les esclaves des deux sexes sont mis sur

le même rang quant aux brutalités dont ils seraient victimes de la part de leurs maîtres ; les réparations et sanctions sont, il est vrai, beaucoup moins sévères que quand il s’agitdes hommes libres [Ex., xxi, 20, 21, 26, 27 ; cf. 32). 301. — 2") Dans le Deutéronome, les ordonnances relatives aux esclaves [Deut., xv, 12-18) se rattachent à celles qui concernent l’année de rémission. Gomme dnns le Code de Valli^nce, il n’est question que de l’esclave hébreu. — a) Il semblerait que seul l’esclave ait le droit de disposer de sa liberté (selon le sens réfléchi que peut ayo’w yimmàk^ér ; Deut, , XV, 12) ; en tout cas la sentence de mort est renouvelée contre quiconque enlève son frère pour le vendre ou le mettre à son service (Deut., xxiv. 7). — b) De nouveau on parle de la libération de l’esclave au terme de la sixième année (Deut., xv, 12). Des recommandations sont faites à ce sujet, dans lesquelles on reconnaît le sens profond d’humanité qui caractérise ce code. Non seulement l’esclave sort sans rien payer (cf. Ex., xxi, 2), mais on ne le renvoie pas les mains vides ; on lui donne quelque chose du menu bétail, de l’aire, du pressoir. D’une part, on n’oubliera pas que son travail a contribué à rendre efficaces les bénédictions de Dieu ; d’autre part, on se rappellera qu Israël lui-même a été esclave en Egypte [Deut., XV, 13-15). Le souvenir des services reçus doit même exclure tout sentimetit pénible lors du départ de celui qui est vraiment moins un esclave qu’un serviteur [Deut., xv, 18) ; rien de surprenant à ce qu’ici, comme dans le Code de l’alliance^ on entrevoie le cas où l’esclave voudra se fixer chez son maître (Deut., xv, 17j. — c) Ce qui doit davantage attirer l’attention, c’est qu’au point de vue de la libération de la septième année, la condition est la même pour les esclaves des deux sexes (Deut., xv, 12, 17). On peut se demander s’il s’agit pour la femme-esclave du même cas que dans Ex.^ xxi, 7-11. Tandis qu’en ce dernier passage, le cas visé est celui de l’esclave-concubine, il se pourrait que le texte deutérotiomîque fît abstraction de cette hypothèse. Il serait possible, d’autre part, que le Deutéronoine se un état social dans lequel le concubinat servile serait devenu plus rare. On le noiera : c’est en conformité avec cette législation que se présente la pratique à laquelle il est fait allusion dans le livre de Jérémie (Jer., xxxiv, 8-16 ; il est question des esclaves des deux sexes) pour l’époque du roi Sédécias. — d) D’après le Deutéronome les esclaves des deux sexes, — mieux : les serviteurs et servantes, — ont leur place dans la famille, participent à sa vie, notamment dans les actes religieux, dans les pèlerinages à la Ville Sainte et dans les repas sacrés qui s’y rattachent [Deut., xii. 12, 18 ; xvi, 11, 14). Remarquer encore l’ordonnnnce humanitaire concernant l’esclave fugitif {Deut. y xxui, 16, 17 [Vulg. 15, 16]).

303. — 3" ») Dans le Code sacerdotal (Loi de sainteté), la question des esclaves est traitée a propos de l’année jubilaire (Z.ei’., XXV, 35-55). Après une exhortation sur l’attitude à garder vis-à-vis des pauvres (Lei’., xxv, 35-38), le législateur envisage le cas où un Israélite, devenu pauvre, est contraint de se fendre (nimkar, même forme verbale que dans le Deutt’rononie) au service d’un maître, israélite comme lui (Lee, xxt, 39a). C’est bien lui, en effet, qui se vend ; on ne le vend pas comme on fait des esclaves {Lev., XXV, 42b). —. a) Une distinction capitale est, dès lors, établie entre l’esclave hébreu et l’esclave étranger.

— « I En réalité, un Isruélite ne doit jamais traiter son

« frère n comme un esclave (Lcv.. sxv, 39^), mais bien

plutôt comme un mercenaire i.vâAhîV), comme un étranger fixé pour un temps limité (^’.^iï^ » h) dans le pays (/< « (’., XXV, 4ûa). Non seulement on ne doit pas lui imposer un travail d’esclave, mais sa sujétion ne durera pas toujours. Il n’est pas question ici toutefois de la rupture de son engagement en la septième année (cf. J ?.r., xxi, 2-11 et Deut., XV, 12-18), mais seulement en l’année du jubilé ; il sortira alors avec ses enfants, sans que l’on fasse les distinctions établies par le Code de l’alliance

[Ex., XXI, 3, 4) ; il retournera dans sa famille et la propriété de ses pères [Lev., xxv, 40b, 41). pour appuyer cette ordonnance, le législateur invoque un motif dont il n’a pas encore été question : c’est que les esclaves, aussi bien que leurs maîtres, ont participé à la faveur divine lors de la libération de la servitude égyptienne (Lev., xxv, 42aj ; la clémence dont ou doit user à leur égard est une conséquence de la crainte de Yahweh [Leu., xxv, 43).

— /3) Un autre cas est envisagé au sujet de l’Israélite pauvre ; celui où il serait réduit à se vendre à un étranger [gêr, (o.’îâèli) établi dans le pays ou à un descendant de cet étranger (Lee., xxv, 47). ! 1 y aura alors un droit de rachat que pourront exercer un des frères de l’esclave, son oncle, son cousin germain, tout autre proche parent et l’esclave lui-même, s’il recouvre des ressources (Lev., xxv, 48, 49) ; le prix du rachat se calculera d’après le temps qui séparera la vente et le rachat de l’année jubilaire (Cev., xxv, 50-52). En tout cas, le jubilé sera pour l’esclave et ses enfants une date d’nlTranchissement (ici’., xxv, 54), Yahweh ne peut consentir à ce que les Israélites aliènent leur liberté d’une manière définitive, car c’est de lui et de lui seul qu’ils sont vraiment les serviteurs (/.rc, xxv, 55) ; il ne peut davantage supporter qu’ils soient traités avec dureté (Lei’., xxv, 53 ; cf.’16t^). — b) Les véritables esclavps seront pris par les Uébreux et achetés parmi les peuples qui entourent Israël : on pourra de même en acheter aux étrangers (toiàb^im) fixés pour un certain temps dans le pays. Ces esclaves seront la propriété du maître dans le vrai sens du mot ; il les transmettra, comme tout autre héritage, à ses descendants (Lei>., xxv, 44-46).

3° Le droit de refuge

303. — C’est encore une loi sociale qui, commune aux trois codes, met bien en relief les préoccupations d’humanité, en même temps que de justice, chères au législateur hébreu.

1 » ; La formule du Code de Vaillance [Ex., xxi, 12-14) est très brève ; elle se ramène à trois points : — a] L’exposé du principe (forme de la loi du talion) d’après lequel quiconque frappe un homme à mort doit être mis & mort (Ex., XXI, 12) ; on ne dit rien de l’exccnteurde cette sanction. — b] Une réserve en faveur du meurtrier qui « n’a pas guetté sa victime, maïs à la main duquel Dieu l’a présentée », autrement dit, en faveur du meurtrier involontaire. Dieu fixera un lieu où il pourra s’enfuir ; c’est l’expression même du droit de refuge. On remarquera la manière tout h fait vague, d’allure primitive, dont le lieu de refuge est désigné [Ex., XXI, 13). — c) Quant au meurtrier volontaire, (( qui agit avec présomption contre son prochain pour le tuer par ruse », il n’y a pas pour lui de droit de refuge ; on doit le prendre même « à mon autel » (expression à noter) pour le faire mourir,

304. — 2") Le Deutéronome (Deut., xix, 1-13) renferme de plus grandes précisions : — a) D’abord touchant le choix des lieux de refuge. Ce seront des villes, car le nouveau code vise une situation sociale déjà avancée ; d’autre part, dans une législation qui attache à l’unité de sanctuaire une importance sans précédent, il ne saurait être question d’un autel de Dieu à propos de chaque lieu de refuge, Trois villes seront mises à part lorsque Israël entrera en possession de Canaan (Deut., xix, 1, 2, 7 ; cf. tv, 4143) ; elles seront choisies de telle sorte que de tous les points du pays, divisé en trois régions, le meurtrier puisse y avoir accès facile (Deut., xix, 3). Même, si Yalnveh favorise l’extension du territoire et donne à son peuple tout le pays qu’il lui a promis, il faudra ajouter trois autres villes [Deut., XIX, 8, 9). De plus les chemins qui y mèneront devront être entretenus en bon état (Deut., xix, 3a). — b) Ces villes doivent servir è ce que le sang innocent ne soit pas versé au milieu du pays, qu’il n*y ait pas de sang sur Israël (Deut.. XIX, 10). Par conséquent, tout meurtrier n’aura pas le droit d’y trouver refuge ; seul aura la vie sauve celui qui aura tué son prochain sans le savoir et qui auparavant n’avait pas de haine contre lui (Deut., xix, 4K Même un exemple illustre ce principe : l’exemple classique du bûcheron dont la hache, lancée sur l’arbre, s’échappe du manche et atteint un compagnon (Deut.. xix, 5). Lin tel homme n’a pas mérité la mort et il faut à tout prix le soustraire à la colère du vengeur du sang qui pourrait l’atteindre et le frapper si la ville de refuge était trop éloignée (Deut., xix, 6). On remarquera le sens psychologique très vif qui anime cette appréciation de la responsabilité ; d’autre