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MOÏSE ET JOSUÉ

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Hugo WiNCKLEn. Les tribus qui sont à la base de l’unité Israélite viennent toutes du même réservoir de peuples, sans doute des bords occidentaux du golfe Persique. Mais elles ont suivi des voies assez différentes. L’une d’elles, celle qui portera le nom de Juda, est d’abord venue se lixer dans le négéb ; elle y a rencontré les tribus nomades dont plusieurs fois déjà nous avons parlé et s’est unie avec elles. A l’une d’elles elle a emprunté le nom de Yahweli. — ; 5) Au regard de H. Winckler, nous l’avons vu, c’est dans le négéb que cet élément du futur peuple de Dieu aurait vécu jusqu’à son entrée en Canaan. Ceux qu’effrait un pareil radicalisme et un tel dédain des textes, Léon CAnTi, par exemple, mettent la pénétration et le séjour en Egypte au com[)te de ces groupes du négéb : ils auront, en se réfugiant en Gessen, suivi une voie que les bédouins de la péninsule sinailique ont toujours suivie et suivent encore volontiers. D’ailleurs, autour de Juda, plusieurs de ces auteurs groupent volontiers les tribus de Siméon et de Lévi ; pour autant, le rôle attribué à Moïse y trouve son explication. En revancbe, l’histoire de Joseph attirant tous les fils de Jacob en la terre des pharaons n’est qu’une superbe fantaisie destinée à donner plus de relief à l’un des principaux éléments de l’Israël du Nord. — /) Revenus au négéb après la sortie d’Egypte, Juda et ses alliés y séjournent à nouveau un certain temps. Mais ce n’était pas en vain que, dans le pays de Gessen, ils s’étaient initiés à la vie sédentaire ; ils en avaient subi le charme. Aussi du négéb jetèrent-ils bientôt un regard de convoitise sur les régions plus fertiles de la montagne d’Hébron. Ils y montèrent directement à une époque que plusieurs des tenants de cette opinion maintiennent en relation avec les temps mosaïques-, mais, d’après H. Winckler, à l’époque même de David’. Ce dernier n’était pas le jeune élu que nous présente la Bible (l Sam., XVI, i-13), qui fait brillamment son apprentissage à la cour de Saiil (I Sam, xvi, 14-23) et dans la vallée du Tcrébinthe (I Sam., xvii). C’était un aventurier, un chef de bandes, assez vraisemblablement un chef calébile (on allègue, à l’appui de cette théorie, v. g. I.Sam., xxv, où David épouse la veuve du calébite Nabal). Sa première œuvre fut l’unification des Calébites et des Judéens, auxquels il assura la possession du Sud de la Palestine. — 5) Mais ses exploits aboutirent à un résultat plus vaste. La Palestine du iS’ord était occupée, en dehors de ce qui restait de Cananéens, par un groupe puissant de tribus apparentées à Juda ; c’étaient les tribus Israélites, celles qui plus tard constituèrent le royaume schismatique. Ces clans y étaient directement arrivés de l’Est ; comme Juda, ils venaient de l’Orient, de la Chaldée. Longtemps ils avaient séjourné, non pas sans doute en Harran ou Mésopotamie, comme certaines traditions le laissent entendre (Gen., xi, 2882 ; XXIV, 4, 10 ; XXVII, 43 [ces textes sont de J] ; xi, 31, 32 et xxv, 20 [d’après P]), mais plutôt au désert des B nè{y] Qédém{Gen., xxix, i, d’après E), situé au delà de la Transjordane et des rivages orientaux de la mer Morte (cf. Jtid., vi, 33 ; viii, 10 ; etc.)’. De là ils étaient progressivement passés en Canaan. Peu à

1. Cf. Léon Gart,.4u Sinaï et dans l* Arabie (dans le BiilU-tin de la Société Neuchâteloise de Géog XXIII, 1914, p. 1-524J, Appendice, p. 513 sv.

2. Cf. Léon Cart, op. cit., p. 516-519.

3. Cf. Hugo WiM’.KLER, Geschichle Isræh in Einzeldarsiellun !

; en. Teil I, p. 24-28.

4. Cf. Eiluar.l Metek und Bernhard Lutiieb rælitfn und ihre Ifac/ibarstumme, 1906, p. 242. auas-i, bien qu’il soit moins précii et moins ex Hugo WiNC.KiEK, Geschichte…, I, p.l3 sv., 30, 126

ST., 156 ST.

Pétrée

rapliie.

Die Is — Voir

plicite,

ST., 134

peu, sous l’influence du sang et pour la nécessité de la défense, ils s’étaient rapprochés les uns des autres ; au temps de Débora et de plusieurs autres Juges, ils avaient formé des unités, toujours transitoires, mais de plus en plus compactes. David fut assez heureux pour les conquérir et leur imposer sou hégémonie.

— i) Une pareille fusion n’allait pas alors sans l’unité religieuse. Le culte judéo-lévitique de YahweU supplanta chez les Israélites du Nord ceux des élohim variés auxquels ils rendaient leurs hommages ; une croyance et des pratiques cultuelles communesachevèrent l’œuvre d’unification déjà réalisée sur le terrain politique’.

158. — ~) A l’appui de cet étrange système, on allègue d’abord le vieux cantique de Débora (Jud., v). Les tribus du Nord y sont mentionnées : la plupart sont louées pour leur empressement à répondre à l’appel aux nrmes{Jud., v, 14, 15a|Ephraim, Benjamin, Machir, Zabulon, Issacliar], 18 [Zabulon, Nephthali ) ; d’autres sont blâmées pour leur indolence {Jud., V, 15h, 16, 17 [Ruben, Galaad, Dan, Aser]). Mais sur Juda le silence est complet, ainsi que sur Lévi et Siméon : tandis qu’au regard de Wellhausen^, ces deux dernières tribus n’existaient déjà plus, L. Cart^ préfère penser qu’à l’instar de Juda, elles étaient complètement en dehors du champ de vision de l’héroïne. Ces trois tribus n’appartenaient pas au groupement Israélite, elles habitaient encore le négéb ; on sait que dans la suite le lien le plus étroit fut conçu entre les territoires de Siméon et de Juda. Le silence qui frappe dans le cantique de Débora est constant dans le livre des Juges (Jud., iii, 7-1 1 est additionnel). — i) On se plaît à relever ensuite quelques indications sporadiques renfermées dans V Ilexatetique. Isolé de son contexte très tendancieux, le récit àeNnm., xxi, ai-aS » nous montre Israël conquérant sur Séhon les territoires orientaux compris entre l’Arnon et le Yabbok ; c’est qu’Israël vient de l’Est. D’ailleurs le roi amorrhéen va à sa rencontre dans le désert, c’est-à-dire vers les steppes des B’né[) Qédém. Ce texte, où il n’est pas question de Moïse, n’a rien à voir avec l’exode traditionnel. Débarrassés des innombrables retouches de D^, les éléments fondamentaux de /os » é(E, document Israélite) fournissent des renseignements qui convergent dans la même direction. Ils présupposent (/o5., Mil, 30, 31b ; XXIV, 35) une conquête de Sichem, une alliance conclue à Sichem, avec promulgation de lois et d’ordonnances. Or c’est à cette même conquête que fait allusion Gen., xlviii, 22, la reportant ainsi en pleine période patriarcale ; de cette mainmise sur Sichem, on peut rapprocher ce que dit Jud., i, 22-26 de la prise de Béthel par les Joséphites, non encore divisés en Ephraïmites et Manassites. Ces traits divers concourent à nous montrer la Palestine centrale conquise par les tribus du Nord’. — 6) Il n’y a pas d’ailleurs à distinguer entre deux invasions, l’une remontant aux patriarches, l’autre postérieure à Moïse. Une telle distinction n’est autre chose que le résultat des nombreuses retouches faites aux documents primitifs. Il serait assez facile de discerner les principales d’entre elles. Celles d’abord qui ont mis Josué, auquel on fait l’honneur de la conquête, en relations si intimes de dépendance, puis de succession, avec Moïse. Celles surtout qui ont trait à l’arche. A l’origine, r<i arche d’^'/o’Ai’m « (expression la plus fréquente dans I Sam., iii-vii et II Sam., vi-xv) n’était autre

1. Cf H. WiKCKLEB, GfscviVA/e…, p. 29-42. J. Cf..1. WELLUnvszTt, Isrælilische…, p. 37.

3. Op cit., p. 487-491.

4. Pour toute cette argumentation, cf. L. Cart, np. cit., p. 49C-50 : î.