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MOÏSE ET JOSUÉ


un territoire au détriment des Moabiles et, indirectement, (les Anuuonites. Une troisième marque de leur alfaiblissement paraît encore dans le récit même de la conquête de la Cisjordane ; c’est dans la montagne seulement, et donc seulement dans les territoires proprement amorrhéens, queles Israélites parviendront d’abord à s’implanter.

135. — g) Sur les Héthéens les données sont plus sommaires. Une fois et dans un texte sans analogue, le i( pays des Héthéens » est synonyme de tout Canaan pris en son sens large (/ « *., i, 4 ; cette leçon manque dans les Septante). Au temps des patriarches, le récit de l’achat par Abraham de la caverne de Macpélah nous montre les « fils de Hetli » dans la région d’Hébron (Gen., xxiii ; cf. xiv, 9, 10 et xlix, 29, 30, 82) ; c’est dans le voisinage, sinon plus près de la montagne de Séir, qu’Esaii prend des femmes de la même race (GcH., XXVI, 34, 35 ; cf. xxxvi, 2) ; le rapportdes espions signale le Héthéen dans la même montagne (A’dm., XIII, 29 [Vulg. 30]). D’autres textes donnent une autre impression pour le moment de la conquête. Le pays des Héthéens est distinct de la Terre Promise (Jud., i, 26). Il est au Nord, dans la montagne du Liban, vers l’Hermon, selon le sens probable de Jos., xi, 3 et Jud., iii, 3, où le mot « Hévéen » paraît avoir remplacé « Héthéen « (t’iti.in/r.L). C’est là qu’au temps des rois d’Israël les Héthéens formeront un royaume puissant (cf. I Reg., x, 29 ; XI, 1). Ainsi donc, à l'époque des patriarches, les Héthéens, dont le vrai séjour étaitla Cœlésyrie, où on les verra plus tard former un état important, avaient débordé dans la Palestine et, envahissant le territoire, poussé jusqu'à Hébron. Pour ce motif, ils figurent dans les listes des peuples à conquérir et à déposséder de la Terre Promise ; mais déjà, au temps de l’invasion, on a l’impression que leur prestige a singulièrement diminué en Canaan.

136. — /')Nous ne ferons guère que citer les autres peuples qui prennent place dans les listes : Jébuséens, Hévéens, Phérézéens, Gergéséens, Cinéens, Cénézéens, Cadmonéens. De plusieiu’s d’entre eux on ne connaît que le nom. Le groupe sur lequel les renseignements sont les plus précis est celui des Jébuséeus. Ils sont peuple de montagne (fus, . XI, 3). Le rapport des espions les signale dans la montagne de Juda, plutôt dans la région d’Hébron (jVum., xni, 29 [Vulg. 30]). Mais ils sont surtout en conne.xion avec Jérusalem (Jus., xviii, 16) qui, de ce fait et contrairement aux données des inscriptions (Tell el-Amarna), prend sous le calame de certains rédacteurs le nom de Jébus (Jud., xix, 10, 11 ; cf. Jos., XV, 8 et XVIII, 16). Ils y constituent une force avec laquelle les envahisseurs doivent compter et que tout d’abord les fils de Juda (Jos., xv, 63) ou, selon une autre source, les flls de Benjamin (Jud., i, 21) ne peuvent réduire. Israël ne les dominera et ne conqueri-a sa capitale qu’au temps de David et grâce à son action vigoureuse (II Sam., v, 6-g ^ I Cliron., XI, 4-6). — ï) Pour le temps des patriarches, on mentionne des Hévéens au pays de Sichem (<en., xxxiv, 2). Mais c’est plus au Sud qu’est leur véritable séjour. L’un de leurs principaux centres à l'époque de la conquête est Gabaon (El-Djib ; Jos., IX, 3 sv. ; cf. XI, ig) ; ils forment une petite confédération qui groupe autour de ce chef-lieu les localités de K’p^iiâh, Berot^ et Qiryat-Y' ârim (Jos., IX, 17). — j) Ce sont les Phérézéens qu’il faut surtout chercher vers le Nord, près de Bétliel et de liai, à l'époque d’Abraham (Gen., xiii, 7), près de Sichem au temps de Jacob (Gen., xxxiv, 30), sur le bord méridional de la plaine d’Esdrelon dans les jours de Josué (Jos., xvii, 15) ; Jud., i, 4, 5 semble toutefois les mettre en relation avec le pays de

Tome m.

Juda. — k) On notera que les Cinéens, les Cénézéens et, sans doute aussi, les Cadmonéens ne sont pas vis à-vis d’Israël dans la même situation que les peuples qui précèdent ; lils du désert, plus ou moins étroitement apparentés à la race sémitique, ils pourront contracter des relations d’amitié avec le peuple de Dieu et même se fondre avec les fils d’Israël ; nous le verrons plus loin à propos des Cinéens.

137. — l) Au terme de cette étude, les Philistins méritent une attention spéciale. Nulle part dans le Pentateuque ils ne figurent aux listes des peuples à conquérir. En revanche, lorsque Josué, devenu vieux, a conscience d’avoir accompli sa tâche, il ne manque pas de signaler parmi les pays et les peuples à réduire <i tous les districts des Philistins (Jos., xiii, 2), les cinq princes des Philistins » (Jos., xiii, 3 ; cf. Jud., ni, 3). Au début de la période des Juges, ce peuple ne semble pas constituer un danger pour Israël. L'épisode auquel fait allusion Jud., iii, 31 ne parait pas avoir une portée générale et d’ailleurs le texte est douteux (un certain nombre de manuscrits des Septante [54, 58, 69, ^5, 76, 106, 121, 134, Aldina, Slave] répètent ce verset après Jud., xvi, 31, où il trouve un contexte beaucoup plus naturel). Au contraire, à partir de l'époque de Sarason et pendant les premiers temps de la royauté, les Philistins vont jusqu'à mettre en péril l’existence du peuple de Dieu. Or on sait que les Philistins étaient, eux aussi, des immigrants, qu’ils venaient de Caplitor et, pour cette raison, étaient dits descendants des Caphtorim ou même appelés Caphtorim (Gen., x, 14 ^ 1 Cliron., i, 1 2 [lire : et les Caphtorim, d’où sont sortis les Philistins] ; Deul., II, 23 ; Am., ix, ^ ; Jer., XLvii, 4). Dès lors, si les Philistins sont absents des listes de la Genèse et de l’Exode, ne serait-ce pas qu’au temps des patriarches, ils étaient encore absents du pays, qu’aux jours de Moïse ils n’y étaient pas encore fermement installés ? A l'époque de la conquête, au contraire, et dans les derniers jours de Josué, ils avaient l’organisation qu’ils devaient garder dans la suite, ils apparaissaient comme des adversaires dangereux, dignes d'être traités à la façon des Cananéens (/os., XIII, 3). Bref, l’immigration philisline coïnciderait à peu près avec l’immigration Israélite. C’est précisément parce que les deux peuples seraient en même temps en voie de s'établir et de se chercher un territoire fixe, que les conflits et les luttes deviendraient si âpres dans la suite. A cette conception on peut faire une objection. En effet, si les Philistins n’y figurent jamais sur la liste des peuples à conquérir, leur nom n’est pas pour autant absent de la Genèse et de 'E.rode. C’est ainsi qu’Abiraélech, roi de Gérare (Gen., xx, 1, 2 ; xxvi, I, 17-25), avec lequel Abraham et Isaac entretiennent des relations et contractent des alliances (Gen., XXI, 22-34 ; XXVI, 20-33), est appelé roi des Philistins (Gen., XXVI, 1, 8) ; son pays est appelé pays des Philistins (Ce »., XXI, 82, 34 ; cf XXVI, 14, 15, 18). Mais beaucoup de critiques estiment que la mention des Philistins à cet endroit est un anachronisme imputable à un rédacteur d’une date postérieure à l'époque mosaïque. La même explication rendrait pareillement raison d’y ?.r-., XIII, 17 et xxiii, 31 (xv, 14 se présente comme prophétique).

138. — 3° Siluation politique des peuples de Palestine au moment de la conquête. — Les constatations qui précèdent nous laissent déjà entrevoir la population de Canaan comme très morcelée, du fait de la multiplicité des races. Les détails que nous pouvons recueillir sur la situation politique du pays sont de nature à confirmer cette impression. — a) Il y a toujours intérêt à consulter la table ethnographique

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