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MOÏSE ET JOSUÉ

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47. — A. Position de la thèse dh l’authenticité

— Il) Au regard des dilïérents auteurs que nous venons de nommer, la thèse de l’authenticilé mosaïque du Pentatciiqiie n’implique nullement que Moïse ait tiré de son propre fonds ou reçu par révélation divine tous les éléments qu’il a mis en œuvre. On peut fort bien admettre que, dans la Genèse en particulier, il a utilisé d’anciens documents, qu’en certains cas il s’est borné à l’insertion pure et simple de tel ou tel d’entre eux. Pour qu’un écrivain mérite d’être regardé comme l’auteur du livre qui porte son nom, il faut et il sufBtqu’il en ait conçu le dessein elle but, qu’il ail rédigé intégralement les parties principales de l’bistoire qu’il retrace, qu’il ait accommodé à son but et à son dessein, au point de les faire vraiment siens, les éléments qu’il a pris ailleurs. — b) D’autre part, l’authenticité mosaïque du Pentaieuque n’implique pas que tout ce qui figure dans l’ouvrage actuel remonte à Moïse. Son œuvre a pu, comme toutes les œuvres de l’antiquité, souffrir, en nombre de détails, de la négligence et des hésitations des copistes. Il a pu arriver pareillement que des termes plus récents, plus facilement intelligibles, aient remplacé des mots devenus obsolètes. Des gloses ont pu être insérées en vue d’expliquer des vocables anciens ou des passages difficiles à comprendre. Même, à l’œuvre achevée par Moïse, des écrivains inspirés ont pu ajouter des compléments : par exemple, le récit de la mort du grand fondateur de la nation Israélite. — c) Bref, M. Vigouroux n’hésite pas à dire : i< Nous n’avons donc à défendre l’authenticité du Pentaieuque que dans sa substance, sans nous occuper des menus détails que la critique peut suspecter d’interpolation ou de modification. » (Livres Saints…, S’éd.,

IH, p. 7)

48. — B. Arguments extrinsèques. — n) L’un des traits qui séparent le plus profondément l’argumentation traditionnelle des procédés critiques, c’est l’importance relative attachée aux divers genres de preuves. Tandis que les tenants de la Haute Critique insistent plus volontiers sur l’étude interne des textes, les représentants de la tradition attachent une bien plus grande importance aux preuves extrinsèques, aux témoignages.

49. — h) Or celui qu’ils invoquent en premier lieu, c’est le témoignage de Notre-Seigneur. Ils alignent les nombreux endroits dans lesquels Jésus parle du livre de Moïse (Marc., xii, 26), de la Loi de Moïse (Luc., xxiv, 415), déclare que Moïse a ordonné (Mail., viii, 4 [Marc, , i, 44 ; Luc, v, 14])telle démarche, permis (Mattli., iiK, 8) tel adoucissement, dit (Marc, vii, 10), donné (.Varc., x, 5 ; cf. Pleut., sxiv, i-/| ; de même Joan., vii, a2) tel précepte ou même (Joan., vii, ig) la Loi tout entière. Ils soulignent des i)assages (Joan., v, 45-47) dans lesquels il est évident que Jésus a voulu, non seulement se conformer au langage de son temps, mais exprimer sa pensée personnelle. — c) Le langage des Apôtres et des disciples ne peut manquer d’être pareil à celui du Maître (Pue., 11, 22 ; xxiv, 27 ; Joan., I, 17, 45 ; -4c<., iii, 22 ; xv, 21 ; xxviii, 28 ; Rom., V, 13, 14 ; IX, 15 ; X, 5, ig ; I Cor, , ix, g ; II Cur., III, 7-15 ; Hehr., vii, 14 ; ix, ig ; Apoc, xv, 3) ; leur manière de parler ne permet pas de douter qu’ils attribuassent le Pcntateuque tout entier à Moïse.

50. — à) Nous avons vu, au début même de cet article, que la tradition chrétienne est unanime à témoigner dans le même sens. — e) La tradition juive est tout aussi explicite. Elle est universelle au temps de Noire-Seigneur, commune à toutes les sectes : Pharisiens (cf..Maltli., xix, 7 ; Joan., viii, 5 ; Ad., XV, 5) ; Sadducéens (cf. Matth., xxii, 24 [Marc, XII, ig]) ; Samaritains (cf. JosÈPHE, Antiq., Xlll, iii,

4) ; Esséniens (cf. Josèpiie, Guerre, II, viii, g) ; Hellénistes (cf. Philon, Vie de Moïse, lib. Il ; Josèpiie’, Antiq., I^V, viii, 3, 48 ; Contre Appion, l, 8). — /) Cette tradition s’est maintenue avec toute ça rigidité dans le Judaïsme orthodoxe, comme le prouvent divers textes du Talmud (ISaba Batiira, b^, etc.) et autres (Pirké Abût/i, 1, 1).

SI. — g) Cette tradition n’est aussi ferme que parce qu’elle est très ancienne et qu’elle plonge ses racines jusque dans les temps les plus lointains de l’Ancien Testament. On allègue d’abord des lej-tcs dans lesquels il est explicitement parlé de la loi de Moïse, du livre de la loi de Moïse : Jos., i, 7 ; VIII, 31, 35 ; xxir, 5 ; xxiii, 6 ; I lieg., 11, 3 ; II Ileg., XIV, 6 ; xxiii, 25 ; II Chron., xxiii, 18 ; xxv, 4 ; xxxv, 12 ; Esdr., III, 2 ; VI, 18 ; vii, 6 ; Neh., vui, i, 14 ; x, 30 (Vulg. 2g) ; XIII, 1. Parmi les prophètes : P)an., ix, 1 1 ; Mal., III, 22 (Vulg. iv, 4). Parmi les Jeutérocanoniques : Tob., vi, 13 (Septante) ; vii, 11, 12, 13 (Septante ; II et 13 seulement dansSinaïl.) ; II Macli., i, 2g ; II, II ; vii, 6, 30 ; Dan., xiii, 3, 62 ; Bar., i, 20 ; II, a, 28 ; Eccli., XXIV, 22 ; xLv, i-5.

S3. — /’) D’autres textes prouvent que, depuis Moïse, ?e Pcntateuque a toujours été connu des Juifs.

— v) C’est, pour Pépoque de Josué et dans le livre qui porte son nom, un ensemble de textes si imposant que les critiques regardent ce volume comme un complément du l’entateuque et une partie intégrante de l’//e.ra<e ; ((71(e. Références directes : cf. Jos., IV, 12 (Num., xxxii, 28 sv.) ; xi, 12 (Nuni., xxxiii, 62 sv.) ; XIV, I (Num., xx, 25 sv.) ; xiv, 2 (Num., xxxiii, 54 ; XXXIV, 16-2g) ; xxi, i sv. (Num., xxxv, 2-8) ; XXI, 4-42 (A’khi., III, 17-37 ; cf. XXVI, 57 sv.) ; cf. aussi Jos., I, 3, 13 ; IX, 24 ; xi, 15, 23, etc. Allusions qui ne trouvent leur explication que dans le Pentaieuque : cf. Jos., XXIV, 2-10 (Gen., xi, 31 ; xii, i-5 ; xxi, i-3 ; xxv, 1-4, ig-26 ; xxxvi, 6-8 ; xxxvii, i-xlvii, 12 ; etc.) ; xxiv, 32 (Ex., XIII, 19). — /3) Pour l’époque des Juges, le livre de ce nom fournit peu de rapprochements aussi précis ; mais on y trouve de telles préoccupations concernant l’observation de la Loi et de plusieurs observances de détail, qu’aucun doute n’est possible sur leur portée : cf. Jud., 11, 1 1 ; iii, 7, 12 ; IV, I ; VI, i ; VIII, 23 ; xvii, 7-18 ; xx, 18, 23, etc. Cf. aussi Jud., i, i sv. (Ex., xxiii, 23, 82 sv. ; xxxiv, 15, 16) ; III, 5 et 6, xiv, 3 (Ex., xxxiv, 16 ; Dent., vii, 3) ; XIII, 4-l4 (’V » hi., VI, 1-2 1). De même, pour les allusions historiques : cf. Jud., I, 16 et iv, 11 (Num., x, 29-82) ; I, 20 (Num., XIV, 24) ; II, I (Ex., III, 8-10, 16, 17, etc.) ; VI, 13(£’.r., vii, 8-13 ; vii, 14-x, 29 ; xii, 2g, 30 ; xrii, 21, 22 ; xiv ; etc.). A remarquer aussi les ressemblances de style : cf. Jud., 11, i-’i(E.r., xxui, 82 sv. ; XXXIV, 12, l’i ; Deut., ii, b) ; vi, 8 (Cr., xx, 2) ; vi, 16 (Ex., iii, 12) ; VI, 89 (Gen., xviii, 82) ; etc.

33. — v) Les temps de Samuel et de Saûl nous sont connus pari Samuel. On signale des rapprochements étroits : cf. I Sam., viii, 5 (Deut., xvii, 14) ; xii, 3 (.um., XVI, 15 ; Deut., xvi, ig) ; xv, 29 (Num., xxiii, 19) ; des allusions historiques précises : cf. I Sam., XII, 8 » (Gen., XLVi. 5-7) ; iv, 8 (/ï.r., vii, 14-XII, 30) ; XII, 6, 8b(Ex., ii, 23-iv, 31) ; xv, 2 (Ex., xvii, 8). — ô)LeI Chroniques ajoute ses témoignages, et ils sont des plus explicites, à ceux de 1 et II Samuel, à propos de David ; c’est pour nous montrer C|u’à cette époque la vie sociale et religieuse du peuple est tout entière pénétrée par l’inlluence des législations et directions du Pentateuque ; cf. II Sam., r, 21 (Lev.. VII, 14 [t’rùmâli]) ; II Sam., vi, 13, 17 et xxiv, 25 [I Chron., xv, 26 ; xxix, 21] (l.ev., i, m) ; II Sam., VII, 22-24 (Deut., IV, 7 ; X, 21) ; I Ileg., 11, 3 [I Cliron.,

1. On n’oubliera ] as que JosèpLe était un Juif helléniste.