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MODERNISME

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les sous-sols du moi profond et du subconscient. El c’est dans leurs ténèbres souterraines que « son imagination créatrice », émancipée de toute discipline intelleclueUe, a allumé ces lueurs phosphorescentes que plu’iieurs ont pris pour des éclairs de génie.

Ses intentions de corriger Kant et de reconquérir le réel et l’absolu, déclarés à jamais perdus et inconnaissables, étaient bonnes et louables assurément. Mais il s’est trompé de méthode et de plan : ce n’est jamais dans un souterrain qu’on établit des portes et des fenêtres ; ce n’est point en éteignant les lumières de l’intelligence qu’on éclaire le monde.

En lançant ses anathèmes contre cet audacieux édilice anti-intellectuel et anti-rationnel, ce n’est donc pas seulement une menace contre la foi chrétienne que Pin X a écartée, c’est la raison humaine elle-même qu’il a vengée ou défendue contre un suicide insensé. Tanlùt, dans son fol orgueil, elle se déilie et élève des autels à la déesse Raison ; tanlùt, par une réaction fatale, dans un accès de découragement et de désespoir, elle se renie elle-même. Aussi jamais un magistère divin n’était apparu plus nécessaire pour la préserver de l’une et de l’autre folie.

BibliograpMe. — F.iROBs, La Philosophie de M. Vergson, 2 « édit. (Bonne Presse) ; Etudes philosophiques. Théorie fondamentale… tome I (Berche et Tralin), "j" édil. ; — J. Makitain, la PhUosuphie hergsonienne (Rivière) ; — GARHiooB-LAanANGB, A «.Sens commun, la Philosophie de l’être (Beauchesne ) ; — Dumesnil, La Sophistique contemporaine (Beauchesne) ; — Gaudeau, Les erreurs du modernisme, 14 conférences à l’Institut catholique de Paris, 1908 (Foi catholique) ; — Maritai.v, Le rôle de l’Allemagne dans la philosophie moderne (Conférences igi^-iy ! ) ; — Sur les origines du modernisme, cf. Goyaxj, L’Allemagne religieuse, le Protestantisme (Perrin, 1898) ; — Bertrand, La pensée religieuse au sein du protestantisme libéral (Paris, igoS) — et d’innombrables articles de Revues.

A. Farges, Prélat de Sa Sainteté.

II

L’ENCYCLIQUE ET LA THÉOLOGIE MODERNISTE

Introduction,

CiivriTRE I. — Les pniNciPBs on modernisme.

Autonomie de la conscience, — autonomie de la science, — indépendance de la science el de la foi, — critique philosophiaue, — critique scientifique, — manifestations au modernisme.

Chapitre II. — La théologie du modernisme.

Nature de la révélation, — sa valeur de vérité, — le dogme chrétien, son origine et ses progrès, — les formules de foi, — la règle de foi, la conscience et l’Eglise.

Chapitre III. — Les conséquences religieuses du modernisme.

L’attitude religieuse des modernistes, — conséquences du modernisme pour le chrétien, — pour l’Eglise. — Conclusion.

Appendick. — Le sentiment de saint Augustin sur r excommunication.

Introduction. — Parmi les encycliques pontiticales, il y en a peu d’aussi graves que l’encyclique

Pascendi ; il y en a peu d’aussi difficiles à comprendre. Le nombre de commentaires qu’elle a suscités de tout cùlé montre l’intérêt qu’elle éveille, et la diversité des interprétations qu’elle a reçues en fait assez voir la dillicullé.

Les questions à débattre sont les plus vitales de la religion. Et, cependant, on ne peut éviter la discussion ; ces problèmes ont été soulevés de bien des côtés, cl avec éclat ; le pape les a tranchés ; il importe de comprendre et de faire comprendre la question en litige, el les motifs de l’arrcl.

Cet effort est aussi d’autant plus nécessaire, que seule l’extrême gi-avilé du cas peut moliver la sévérité exceptionnelle de la sentence. Le pai)e nous dit que les erreurs qu’il condamne sont le rendez-vous (le toutes les hérésies, qu’elles conduisent au panlliéisme et à l’athéisme, et il décrète contre elles des mesures de répression et de préservation très rigoureuses. Il y aurait là une injustice et un abus de pouvoir, si ces doctrines n’étaient, en cU’el, ruineuses pour la foi.

Il importe aussi do dissiper une équivoque que les modernistes ont trop d’intérêt à créer. Dans le manifeste qu’ils ont publié en Italie (// programma dei modernisti. Risposta aU’enciclica di Pio X « Pascendi dominici gregis ». Roma, Società inlernazionale scientilico-religiosa éditrice. 1908, îS’J pp. in-8"), ils se représentent comme les tenants de la science, indépendants de tout système philosophique, amenés aux positions qu’ils défendent par le seul souci de la probité scientilique. A les entendre ([). 21), le modernisme est la méthode critique. Dans l’exposé qu’ils font de leurs thèses, ils ont soin de mettre en première ligne certaines opinions critii |ues qui ont été défendues par beaucoup de catholiques, par exemple sur l’antériorité de saint Marc, sur les logia, source commune de saint Mathieu et de saint Luc.

On ne peut tolérer une interprétation aussi fausse du document pontitical ; on ne peut laisser croire de part et d’autre, à nos adversaires el à nos amis, que tout travail sincère d’histoire el d’exégèse est dorénavant condamné par le pape. Pour dissiper c^tte erreur il n’est qu’un moyen, c’est de montrer ce que sont en effet les doctrines qui viennent d’être condamnées.

Mais comment les connaître ? Les modernistes n’ont point écrit un manuel de théologie à leur usage, où l’on puisse trouver l’expression intégrale et authentique de leurs conceptions religieuses. L’encj’clique est peut-être le j)remier document où soit contenue la synthèse de leurs doctrines’. Cet exposé, assurément, frappe tout observateur impartial par la vigueur de sa construction et, toutautant, par la sûreté et Pétendue des informations qu’il suppose. Cependant, si l’on veut en apprécier l’exactitude, il est clair qu’on ne peut, sans pétition de principe, le prendre pour point dedéjiarl ; c’est des travaux des modernistes qu’il faut partir, cl la difficulté renaît. Dans leurs livres ou leurs articles on trouvera bien des thèses éparses d’exégèse, de philosophie, d’histoire, mais a-t-on le droit de les organiser en système ? L’exégète mettra son point d’honneur à se déclarer indépendant de toute théorie philosophique, et le philosophe plaidera son

1. Rcndont compte dans le [libbert Journal quillet 1907, p. 921) de la Ninwelle Théologie de M. Campbkll, .M. Haslidall rappelait comhieti il était diiScile JDsqu’aiors de trouver lui livre qui exposât d’une façon synthétique et accessible aux non-initiés l’ensemble de la Théologale libérale. Le livre de.M. Campbell lui-même n’indique que les positions extrêmes.