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MODERNISME

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Philadelpbiens : « Dieu pardonne à tous les pénitents, s’ils ont recours à l’union avec Dieu et au tribunal de révoque » (viii, P. G., V, 708). Le mot auvéSpim ne peut signilier que tribunal, ainsi que l’observe le protestant Lightfoot, le savant éditeur et commentateur des Pères apostoliques. — Tertullien dit clairement d’un chrétien péclieur qu’il pourra obtenir le pardon par le ministère de l’évêque. Si, devenu monbanjste, il excepte certains péchés plus graves, et pense que Dieu s’est réservé de les pardonner, cette restriction ne fait rien à la qviestion présente (De l’udicilia, xvin, P. /.., II, 1017).

Il est donc historiquement faux que l’Eglise ne se soit habituée que très lentement à l’idée du chrétien pécheur, et réconcilié par son ministère.

Quant au nom de » sacrement » répondant au grec « mj’stère », à l’époque des Pères il était sans doute plus ordinairement réservé au groupe des trois sacrements qui initiaient le nouveau converti à la vie chrétienne, et lui étaient conférés en même temps : Baptême, Gonlirmation, Eucharistie ; ou même souvent réservé par excellence à la seule Eucharistie ; et peu importe le nom si nous avons la chose, si la pénitence était un rite qui donnait la grâce et l’amitié de Dieu. Il est faux pourtant qu’on ne trouve jamais alors ce nom appliqué à la pénitence. Saint Augustin montre les Udèles accourant à l’église au moment de l’irruption des Barbares, demander les uns le baptême, les autres la pénitence, tous enfin la consolation et l’administration

« des sacrements ». On voit que le terme général de
« sacrements » englobe ici la pénitence. (Lettre à

Honorât, 11° S, P. L., XXXIIl, [1016]). — Quelques années après, un évcque africain, Victor db Car-TBNNA, disait : « Tu comprendras alors combien Dieu a estimé le sacrement de pénitence. » (Ouvrage autrefois attribuéà saint Ambroise, P. A., XVII, ggi-)

Enfin il est inexact et bizarre de dire que, si la Pénitence n’était pas appelée « sacrement », c’est qu’elle était regardée comme un « sacrement honteux ». Assurément on trouvait inconvenant pour un diacre, un prêtre ou un évêque, pour pécheurs qu’ils fussent, de se prosterner devant les laïques en implorant leur intercession, et on les dispensait de ces exercices pénitentiels, leur faisant faire pénitence dans la retraite. Mais ces mêmes exercices, pour les autres pécheurs, n’avaient rien qui les « disqualifiât ». {CEvangile et l’Eglise, p. 198). — « Demandez à l’Eglise de prier pour vous, disait saint Ambhoisk au pécheur coupable de péchés secrets II n’y a rien en cela qui doive vous faire rougir, si ce n’est de ne pas avouer votre culpabilité, jjuisque nous sommes tous pécheurs. » (De pœnitentia, 1. II, c. x). — D’ailleurs le sacrement consiste principalement dans l’absolution, dans la miséricorde de Dieu qui pardonne. Qu’a-t-elle de honteux ? Elle est sublime. Si les Pères avaient regardé un sacrement comme honteux parce qu’il efface les péchés, ils en auraient dit autant du baptême, qvi’ils avaient pourtant en si grand honneur.

Prop. i^tj : j J mesure que la Cène prit le caractère d’un acte liturgique, ceux qui y présidaient d’ordinaire acquirent le caractère de prêtres ».

Il faut aimer beaucoup à faire de l’histoire a priori et à mettre des « évolutions » partout, pour ne pas voir que la Cène eucharistique célébrée par les premiers chrétiens eut dès le principe « le caractère d’un acte liturgique », et que, jiar suite, ceux qui j’présidaient d’ordinaire ne jouaient pas le simple rôle d’un maître de maison dans un repas familial, ou d’un organisateur de banquet, en attendant que le caractère sacerdotal apparaisse quelques siècles plus tard. — Voyez saint Paul, I Cor., x, 16-21, et

le passage cité à la prop. 45 ; parmi les plus anciens témoignages patristiques, au i’"' siècle la Bidache avec sa liturgie eucharistique, au 11’, la description de la messe primitive par saint Justin, I Apol., lxv et suiv. (Voir article Euchahistie, col. 1565, sqq.)

Le concile de Trente a défini l’institution par le Christ lui-même du sacrifice eucharistique et du caractère sacerdotal, sess. xxii, can. 2.

Prop. 50 : « Les anciens, qui exerçaient dans les assemblées chrétiennes les fonctions de surveillants, ont été institués presbytres ou épiscopes, par les apôtres, pour satisfaire à la nécessité d’une organisation dans les communautés qui se dételoppaient, et non pas précisément pour perpétuer la mission et les pouvoirs apostoliques. »

Ces « anciens » ne recevaient pas seulement un pouvoir de gouverner les comiuunautés, mais encore les pouvoirs surnaturels et sacramentels que le Christ avait donnés aux apôtres pour les transmettre à des successeurs. Voir le plus ancien témoin patristique, un contemporain des apôtres. Clément de Rome, dans son épître aux Corinthiens, /’. G., 1, XL, xLi, xuv, 290.

On ol>jecte que « leur ministère coexistait à celui de l’apostolat ». C’est vrai ; mais cela les empêchait-il de succéder aux apôtres après leur mort, et de perpétuer leurs pouvoirs ? Un coadjuteur coexiste bien à l’évêque auquel il succédera. Il est vrai que l’apostolat, avec sa mission unique de fonder les Eglises, comportait certaines prérogatives auxquelles les évêques n’ont pas succédé. Mais pour être vraiment le successeur de quelqu’un, pour continuer ses pouvoirs, il n’est pas nécessaire de lui succéder en tout : Philippe II a été vraiment le successeur de Charles-Quint. (Voir article Eglise, col. la/i », 1360 sqq. ; art. Evi" : ques, col. 1981 sqq.)

Arrivons aux dédoublements de sacrement, invention malheureuse de l’évolutionnisrae.

Prop. 43 : « L’habitude de conférer le baptême aux enfants constitue un développement disciplinaire qui a contribué à résoudre ce sacrement en deux, baptême et pénitence. »

Les définitions de Trente réprouvent implicitement cette hypothèse gratuite, parce qu’elle enlèverait à Notre-Seîgneur l’institution réelle de la pénitence, avec sa fin particulière et sa grâce pro]n’e. L’Evangile rapporte d’ailleurs comment il établit lui-même oe sacrement (Voir prop. ij)

Et puis, cette invention n’a pas même le mérite de la vraisemblance. L’habitude de conférer le baptême aux enfants aurait pu assez naturellement porter certaines Eglises, soit à une rebaptisalion de tous les chrétiens à l’âge adulte, comme dans quelques sectes protestantes, soit à une cérémonie de libre acceptation des devoirs contractés au baptême. Mais le sacrement de pénitence n’est rien de tout cela. Quand son administration nous apparaît plus clat-’rement dans les documents plus détaillés de la fin d* W siècle et du commencement du m’, c’est sous la forme de pénitence publique, réservée à des crimes particulièrement graves, et nullement imposée à tous les adultes. La pénitence, pour les adultes, ne supplante pas le baptême’, qui continue à fonctionner parallèlement. L’analogie entre les deux, unique fondement de l’hypothèse, est faible, à cause de différences profondes. Le baptême n’est jamais un jugement, car celui qui le reçoit, étant encore en dehors de l’Eglise, n’est pas sujet à ses lois ni à ses jugements (I Cor., v, 12) : la pénitence ap[iarait dès le début sous forme de tribunal, de jugement (voir prop. 40). accompagné de peines expiatrices, et ne s’adressantquà des sujets de l’Eglise, à des baptisés.

— Le baptême, dans l’Ecriture et la Tradition, est essentiellerænl lié au rite de l’ablution, que son