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MODERNISME

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philosopUique que l’esprit des hommes aurait à perïeolionner > (Conci}, Vatican., Sess. iii, cap. 4- [D. B., 1800(iG47)] ; sur le sens de cette doctrine, on peut voir l’excellent commentaire de M. A. Vacant : Etudes théologiques surtesconstilutionsdu Concile du Vatican, Paris, 1893, tome II, pp. 282-313) ne peuvent sortir leur sens naturel et certain, si l’on défend les propositions 20 et 21. Quant à la clôture du dépôt avec le temps apostolique, si elle n’est pas expressément définie par le Concile, elle est constamment supposée par lui, comme une vérité de foi catholique. — (Sur la note théologique qui convient à cette proposition, voir J.-V. Bainvkl, de Magisierio fivo et Traditione, Paris, igoS, p. laS sq.)

S* La Christologie. — Prop. 27 : « La divinité de Jesus-Christ ne se prome pas parles é’angiles ; elle est un dogme que la conscience humaine a déduit de la notion de Messie. »

Prop. 28 : « Pendant qu’il exerçait son ministère, Jésus ne parlait pas en vue d’enseigner qu’il était le Messie, et ses miracles ne tendaient pasà le prouver, ) :

Prop. 29 : 0/1 peut accorder que le Christ, tel que nous le montre l’histoire, est de beaucoup inférieur au Christ, objet de la foi. »

Prop. 30 : « Dans tous les te.rtes évongéliques, le nom de Fils de Dieu équivaut simplement au nom de Messie, et ne signifie nullement que le Christ est vraiment, et par nature, fils de Dieu. »

Prop. 31 : « La doctrine christologique qu’enseignent Paul, Jean et les Conciles de.icée, d’Ephèse et de Chalcédoine, n’est pas celle que Jésus a enseignée, mais celle que la conscience humaine a conçue touchant (la personne de) Jésus. »

Prop. 32 : a Le sens naturel des textes évangéliques est inconciliable avec ce que nos théologiens enseignent au sujet de la conscience et de la science infaillible du Christ. r>

Prop. 33 : « // est évident, pour quiconque ne se laisse pas conduire par des opinions préconçues, que .fésus a enseigné l’erreur au sujet de la pro.rimiié de l’avènement du Messie (dans la gloire), ou bien que la plus grande partie de la doctrine (qui lui est attribuée ) dans les évangiles synoptiques, n’est pas authentique. »

Prop. 34 : « Lf critique ne peut attribuer au Christ une science simplement illimitée, sans faire une hypothèse inconcevable historiquement, et répugnant au sens moral — à savoir que le Christ, en tant qu’homme, a possédé une science divine, et n’a pas voulu néanmoins communiquer la connaissance de tant de choses à ses disciples et à la postérité. »

Prop. 35 : <c Le Christ n’a pas toujours eu conscience de sa dignité messianique. »

Prop. 36 : « La résurrection du Sauveur n’est pas proprement un fait d’ordre historique, mais un fait d’ordre purement surnaturel, ni démontré, ni démontrable, que la conscience chrétienne tiré insensiblement des autres (faits de l’histoire du Sauveur). »

Prop. ij : « La foi initiale en la résurrection du Christ n’a pas tant porté sur le fait même de la résurrection que sur la vie immortelle du Christ auprès de Dieu. »

Prop. 38 : » /.a doctrine touchant la mort expiatrice du Christ n’est pas évangêlique, mais seulement paulinienne. »

Prop. 52 : (I Etrangère à l’esprit du Christ est restée la pensée de constituer l’Eglise comme une société devant subsister sur terre durant une longue série de siècles : bien plus, dans l’esprit du Christ, l’avènement du royaume des cieu.r, ainsi que la fin du monde, était imminent. ^^

Prop. ùo : t La doctrine chrétienne, à ses débuts,

fut judalsante : mais elle est devenue, par une suite d’évolutions, d’abord paulinienne, puis johannique, finalement hellénique et universaliste. r>

Cet ensemble de propositions, touchant la personne, l’enseignement et l’œuvre du Christ, doit, semble-t-il, être étudié à la lumière des explications données plus haut, à propos île la notion de Révélation. Seule, en elTel, la théorie de l’évolution, immas nente et fatale, de la conscience religieuse dan l’humanité, permet de comprendre certaines de ces propositions, et leur impose à toutes une orientation, et comme une couleur, commune.

Dans cette théorie, le Ghrlst historique, Jésus de Nazareth, n’a été, et n’a pu être qu’un chaînon, qu’un moment, nécessairement dépassé, du dé^ eloppemenl religieux de l’humanité, en marche vers la conscience intégrale du Divin qui est en elle. Ceux qui se sont efforcés de concilier — en dépit de la logique du système — celle conception avec la foi chrétienne, ont admis que ce moment, marqué par l’apparition du Christ historique, a été décisif, et, jusqu’à un certain point délinitif, dans l’hisloire de révolution religieuse de 1 humanité. Selon eux, en effet, c’est dans l’àme humaine de Jésus que s’est éveillée d’abord, avec une énergie singulière et une profondeur inégalée, la conscience du rapport filial avec la divinité, qui constitue le fonds de toute religion véritable. Ce sentiment libérateur, cette révélation de la paternité divine, reste le modèle de toute expérience religieuse, encore que le langage et les conceptions dans lesquels le Christ les a traduits, — et qui étaient ceux de sa race et de son temps — aient lentement fait place à un autre langage, à des conceptions dégagées des limitations de la pensée juive, et progressant avec la connaissance du monde et de l’homme. C’esl dans ce sens qu’on peut appeler le christianisme la véritable, et même la seule véritable religion.

Or, cette interprétation sentimenlaliste et évolutionisle du fait chrétien, que je viens de résumer d’après son plus célèbre représentant parmi nous, Auguste Sabatier, a semblé acceptable, sinon dans tovis ses fondemenls philosophiques et tous ses détails, au moins dans son esprit, à certains écrivains catholiques. L’histoire des origines chrétiennes, étudiée sans arrière-pensée théologique, leur a paru la confirmer. Cette histoire, d’après eux, rendrait témoignage à l’évolution qui substitua aux vues personnelles et conscientes, à l’œuvre apostolique de Jésus de Nazareth, Vidée chrétienne, l’interprélalion progressive, commandée par les circonstances et les nécessités de fait, de ces conceptions, de ces vues, de cette œuvre. Le Christ historique bornait son horizon au peuple d’Israël : on conçut sa mission comme universelle ; sa vie et sa morl avaient été exemplaires : on les conçut comme rédemptrices ; il s’était donné comme un maître : on vit en lui le îMessie, le Seigneur, le Fils de Dieu, le Verbe incarné ; il avait prêché le règne de Dieu dans l’attente imminente de la Parousie : les faits interprétèrent celle notion, en donnant naissance à l’Eglise, et la Parousie se sublima en avènement spirituel et intérieur, ou s’estompa dans un lointain indéfini. Déjà commencée dans les évangiles synoptiques, celle transformation du Chrisl historique se poursuit à travers les épîtres pauliniennes, pour trouver son expression la plus liante dans les méditations et les symboles johanniques. Et le succès, la valeur religieuse et morale de cette transformation, sa nécessité même, la justitienl suffisamment : pour devenir le Christ de la conscience humaine et de la foi, le Christ historique devait subir cette IransCguralion : il reste qu’elle s’est faite autour de son image, qu’el’e est le