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MODERNISME

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Bruxelles, 1918, in-8 ; Les religions orientales dans le paganisme romain, 2' éd., Paris, 190J, ch. vi ; article Mithra dans le Dictionnaire des antiquités grecques et romaines. Outre les ouTages mentionnés au cours de l’article, on peut consulter : Cyril Martindale, The religion of Mithra, dans Lectures on the history of Religion, II, London, 1910, et dans Christus, cli. viii. Dans la Befue d’histoire ecclésiastique (Louvain), articles pénétrants de E. Rémy sur le livre de M. Cumont (année 1901, p. ôôi-ô'j^) et sur celui de Dietericli (année 1904, p. 290-298). Paul AUard, Julien l’Apostat, t. I, ch. I, Paris, 1900.

A. d’Alès.


MODERNISME. — Le nom de Modernisme, employé depuis longtemps sans signification bien précise, reste désormais attaché à l’ensemble des erreurs doctrinales condamnées par deux documents de Pie X : le Décret du Saint-Office, Lamentabili sane f.T17 « (3 juillet 1907), et l’Encyclique Pascendi dominici gregis (j sept. 1907) ; erreurs caractérisées dans leur ensemble par l’engouement pour certaines manières modernes de philosoplier sur les choses religieuses et par le mépris de la tradition catholique.

Le décret Lamentabili avait dénoncé expressément les plus notables de ces erreurs ; il n'était personne, tant soit peu au fait de la littérature religieuse, qui ne pût les reconnaître pour les avoir rencontrées maintes fois ; et quand parut le décret du Saint-Office, tel commentateur n’eut pas de peine à mettre en marge de chaque proposition les noms des auteurs et les titres des ouvrages où l’on pouvait les aller chercher. Pour distinctes qu’elles fussent, ces erreurs n'étaient pas moins solidaires par l’unité d’inspiration ; solidaires aussi par l’acharnement d’une certaine presse à les promouvoir. Qu’il s’agît de philosophie, d’exégèse, d’histoire des dogmes, d’apologétique, d’orientation politique ou sociale, en retrouvait les mêmes organes empressés à redonner la même note, à formuler les mêmes revendications, avec l’ambition plus ou moins hautement avouée d’arracher à l’Eglise enseignante des mises au point déclarées nécessaires. Insensiblement, une fraction du catholicisme s’orientait chaque jour davantage vers ce que le Décret devait appeler bénignement en sa 65" et dernière proposition, « un protestantisme large et libéral », et que 1 Encyclique montrerait aboutissant finalement au pur nihilisme religieux.

Dans l’Encyclique Pascendi, les mêmes propositions reparurent, non plus isolées, mais enchâssées dans un corps de doctrine, et il devint plus que jamais évident que ce corps de doctrine, pour n’avoir jamais été formulé peut-être avec cette ampleur et cet enchaînement logique, n’en représentait pas moins pour certains esprits, au sein même du catholicisme, en même temps qu’une règle de pensée, un programme d’action.

Comment ce pseudochristianisme, aujourd’hui dénoncé comme le confinent de toutes les hérésies, avait pu s’organiser dans l’Eglise et contre 1 Eglise, c’est là assurément un de ces mystères de ténèbres dont l’origine profonde appartient à l’histoire des influences déchaînées en ce monde contre le règne du Christ Jésus. Ceux qui prêtèrent la main à cette mauvaise œuvre combinaient, en des proportions variables, une naïve ignorance, l’engouement pour une fausse philosophie, la fascination des conquêtes de la science, et enfin ce que le Pape signale comme la racine de tout, l’esprit d’indépendance et d’orgueil. L’atmosphère d'épais naturalisme qui pèse aujourd’hui sur les croyants eux-mêmes rendit possibles beaucoup d’illusions ; elle rendit d’autant plus nécessaire l’avertissement venu du Docteur suprême. L’Encyclique de Pie X est le dard étincelant qui perce le brouillard moderniste.

Le moindre inconvénient des malentendus et de la confusion produits par ce mouvement doctrinal, était de rendre singulièrement délicate et singulièrement ingrate la tâche de la science orthodoxe. En présence d'équivoques créées à plaisir pour confondre la recherche scientifique avec le rationalisme et célébrer toute investigation heureuse comme une revanche de la raison émancipée sur la routine d’une théologie oppressive, comment l’essor le plus légitime de la pensée chrétienne n’eùt-il pas été gêné et comprimé? Pleinement conscient de ces inconvénients et de ces dangers, le Souverain Pontife a soin de séparer la cause des initiatives fécondes et nécessaires, de celle des nouveautés téméraires. L’Encyclique s’achève sur une vision d’espoir. Soucieux non seulement de sauvegarder l’intégrité de la foi, mais encore d’en garantir le bon renom. Pie X ne renonce pas à l’entourer des splendeurs qui lui sont dues. S’il écarte avec un magnifique dédain les mirages d’une fausse science, il reconnaît que toute vérité proclamée, en n’importe quel ordre, est un hommage rendu à Dieu.

En traitant du Modernisme, nous nous attacherons aux deux documents pontificaux selon l’ordre de leur apparition. Dans une première partie, nous présenterons le commentaire des 65 propositions que condamne le Décret Lamentabili. Ce commentaire n’est pas inédit. Dû à quatre théologiens éminents qui se partagèrent la besogne selon leurs spécialités respectives, il parut, presque au lendemain du Décret, dans le journal V Univers. Nous adressons ici nos remerciements aux quatre auteurs qui, après avoir bien voulu entreprendre ce travail à notre requête, nous ont permis de le reprendre aujourd’hui, pour l’insérer dans ce Dictionnaire. Il n’existe pas ailleurs, à notre connaissance, d'étude semblable, où chacune des propositions du Décret se trouve expliquée, rattachée à ses sources, appréciée à la lumière de la doctrine catholique. Dans une seconde partie, nous recueillerons les enseignements de l’Encyclique Pascendi, sous deux chefs. Une première étude présentera la synthèse du Modernisme philosophique : c’est la seule partie rigoureusement inédite de cet article. Une seconde étude traitera plus spécialement du Modernisme théologique. Elle a paru en brochure sous ce titre : L’Encyclique et la théologie moderniste (Paris, Beauchesne, 1908).

Sur le mouvement d’idées qui précéda et provoque la condamnation du Modernisme on consultera utilement la collection des Etudes.

A. d’Alès.

Ire Partie Le décret « Lamentabili sane exitu »

Introduction. — Le décret marque nettement, dans son préambule, le but qu’on s’y est proposé. Il s’agit de préserver les catholiques des graves erreurs répandues, ces derniers temps, parmi eux par des écrivains qui, sous couleur d’une intelligence supérieure des choses et au nom de l’histoire, s’appliquaient à préparer, comme ils disaient, le progrès du dogme. En réalité, c’en était la déformation.

A cet effet, S. S. Pie X a fait noter, réprouver et proscrire les principales de ces erreurs par la sainte Inquisition romaine et universelle. Elles tiennent dans soixante-cinq propositions, dont la dernière précise assez bien l’esprit de l’ensemble. Le catholicisme actuel ne peut s’adapter à la traie science, à