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MATERIALISME

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(la partie bonne de la théorie de Newton ou théorie kinétique), est la cause dernière de tous les phénomènes, (p. aCo-aôa)

Après avoir rappelé que force de tension (énergie potentielle) et force vive (en. actuelle) se transforment sans cesse l’une dans l’autre sans cbangement dans la valeur totale de la somme, et affirmé que cela explique toutes les fonctions vitales, même les phénomènes de vie intellectuelle, Hæckel met à ce chapitre — (xii « ) essentiel, central — une conclusion digne de tout le reste : « Notre ferme conviction moniste, que la loi fondamentale cosmologique vaut universellement dans la nature entière, est de la plus haute importance. Car non seulement elle démontre positivement l’unité foncière du Cosmos et l’enchainement causal de tous les phénomènes que nous pouvons connaître, mais elle réalise, en outre, négativement, le suprême progrès intellectuel, la chute définitive des trois dogmes centraux de la métaphysique : Dieu, la liberté et l’immortalité ». (p. 205) — Ce chapitre constituant le suprême progrès intellectuel, nous avons cru devoir l’analyser en détail. Il suffit désormais d’indiquer les grandes lignes de l’édifice bâti par Hæckel, sur le fondement de la loi de substance.

II) Applications de la loi universelle de substance. — i" Cosmos. — Gomme orientation générale, négation de la création, qui est une hypothèse invérifiable ; elle fait place à la loi d’évolution « enfant du xix’s., au nombre de ses créations les plus importantes et les plus brillantes ». L’évolution étudie en quatre parties l’apparition naturelle : i ° du Cosmos, 2" de la terre, 3" des organismes vivants, 4° de l’homme. A ce sujet, Hæckel rappelle qu’il fut le premier à mener, en 18^4, « à bonne fin la tentative de suivre la descendance de l’homme à travers la série entière de ses aïeux (depuis les singes) jusqu’aux plus anciennes formes arcliigones de Monères ». Les monères elles-mêmes, il en a(Hist.de la Création matérielle, c. xv) expliqué l’origine par procréation, abiogénèse ou archigénèse, termes qui, d’après leur créateur, signifient « la première apparition du plasma vivant, succédant aux combinaisons organiques du carbone dont il est issu ». C’est la théorie carbogène de la vie : « Les phénomènes caractéristiques de la vie sont simplement les modes d’activité des corps albuminoïdes et autres combinaisons plus complexes du carbone. »

— Et par là, comme par un « pont jeté grâce à la théorie moderne de l’Evolution », le domaine de la vie psychique est relié au domaine physique, et t( nous en sommes venus à la conviction nette que tout phénomène est soumis à la loi universelle de substance » et le Cosmos retrouve sa belle unité, compromise par tout dualisme.

La procréation, abiogénèse ou archigénèse — l’événement qu’on a coutume de nommer génération spontanée, car c’est d’elle qu’il s’agit, mutato nomine,

— n’a jamais été constatée, les faits dûment interrogés se prononcent contre elle, n’importe ! Elle s’impose à la conviction moniste, sous peine d’admettre la création, le miracle de la création : entre les deux il faut choisir. Et comme le miracle est contradictoire, il faut nier la création de la vie, nier aussi la création du Cosmos, de ses éléments primordiaux ; ils sont éternels, comme le mouvement de l’éther.

a’Dieu. — Le choix s’impose aussi entre le théisme, « qui distingue Dieu d’avec le monde comme son créateur, son conservateur et son régisseur »,

— et le panthéisme, qui fait de Dieu la substance même du monde. Hæckel ne saurait avoir que du mépris.soit pourle a Monothéisme anthropistique »,

d’après lequel, assurc-t-il. Dieu ne serait, au fond, (inunesoTiedevertéliré gazeux Hct. Morph. gén., Mon., En., p. 330) ; soit pour le « Triplothéisme chrétien » (Trinité), lequel par l’affirmation trois font un, fit jadis hésiter la jeune logique de Hæckel enfant… Mais depuis, quelle triomphante revanche il a su prendre, par des interprétn lions des dogmes chrétiens comme celles-ci : le Fils du Père est en même temps Fils de la 3’Personne, le Saint-Esprit, et est conçu par l’immaculée conception de la Vierge Marie (p. 3 19) — la Vierge Marie joue un grand rôle à titre de quatrième divinité, son influence devient prépondérante, si bien que les trois personnages masculins sont complètement effacés ». (p. 3aC)… Ces exemples suffisent pour montrer dans quel esprit et avec quel esprit est critiquée la religion chrétienne.

A sa place, Hæckel propose : — o) le culte du vrai, du beau et du bien, comme religion de l’avenir, en harmonie avec la science (ch. xviii) ; — ) et l’équilibre de l’égoïsme et de l’altruisme, comme principe d’une morale vraiment scientifique et moniste (ch. xix).

3’^ L’homme, dernier terme de l’évolution du Cosmos, a longuement retenu l’attention de Hæckel : la première moitié des « Enigmes » (ch. ii-xi) lui est consacrée, et elle contient de nombreux renvois aux autres ouvrages.

a) Le corps. — Par l’anatomie et la physiologie, par l’embryogénie et la phylogénie, les chap. ii-v

« tendent à montrer » que l’homme, fils duPithecanthrupus

alalus (muet), mammifère le plus perfectionné, provient de la môme souche que les autres et ceux-ci, à leur tour, de la même branche plus ancienne de l’arbre généalogique que les autres vertébrés. L’auteur de nos grandes « chartes d origine » est « convaincu que la hiérarchie par lui tracée des ancêtres de l’homme répond en gros à la vérité ».

(p. 95)

h) L’âme. — La psychologie est une partie de la physiologie ; car, dit Hæckel, « selon moi, ce qu’on appelle âme est, à la vérité, un phénomène de la nature ». (p. io4) Ou plutôt, il considère « l’âme comme un concept collectif désignant l’ensemble des fonctions psychiques du plasma. L’âme est une abstraction physiologique… Nous nommons àme »…le travail du psychoplasma », lequel est, « chez l’homme et les animaux supérieurs, un élément difl’érenciédu sj’stème nerveux, le neuroplasma des cellules ganglionnaires et de leurs prolongements centrifuges, les fibres nerveuses ». (p. 128)

Foin de la psychologie dualiste, une « plate conception » spiritualiste, qui repose sur l’hypothèse d’un monde spirituel, du(]uel nous ne pouvons rien savoir… », et dont les phénomènes « devraient n’être pas soumis à la loi de substance » ! (p. io4, io5)

La psychologie moniste, elle, réduit toute l’activité psychique supérieure, y compris « les phénomènes merveilleux de la raison et de la conscience », aux

« processus de la vie psychique inférieure » (p. 106) ; 

et les progrès de la psychologie, dus à la théorie évolutionniste, ont abouti à ceci : que nous reconnaissons l’unité psychologique du monde organique. » A la psychologie scientifique de l’avenir, Hæckel ne laisse à faire que « l’étude de la longue suite de stades inférieurs qu’a dû parcourir l’esprit humain en se développant » (p. I2’3)

Cette tâche, belle mais difficile, de la psychologie moniste, en avait séduit plusieurs dans leur jeunesse, qui l’ont plus tard abandonnée : Virchow, du Bois-Rkymond, Wundt lui-même, bien qu’il « possède sur la plupart des autres philosophes l’avantage de connaître à fond la zoologie, l’anatomie et la