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MARTYRE

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l’autorité du pape, imposé sous Henri VIII, sous Edouard VI, sous Elisabetli ; serment d’allégeance, sous Jacques I"’, moins absolu dans les termes, mais contenant cependant des expressions que la conscience catholique ne pouvait accepter (sur le serment d’allégeance, voir LiNGARD, Histoire d’Angleterre, trad. lloujoux, t. II, p. 138-140 ; F. Mourret, Histoire générale de l’Eglise, t. VI, L’Ancien Régime, 1912, p. 2830 ; J. DE LA Servière, La question d’altégeance, dans les Etudes, t. LXXXIX, 1901, p. 61-76, et art. Allégeance, dans le Dict. d’histoire et de géographie ecclésiastiques, fasc. VIII, 1912, col. 485-489) ; sous Charles I""-, renonciation par serment au dogme de la transubstantiation ; sous Charles II, en 1672, nouveau serment contre la transubstantiation et le culte de la sainte Vierge et des saints, exigé de toute personne occupant des fonctions publiques : c’est ce qu’on a appelé le Test, ou l’épreuve (sur la formule de ce serment, voir Bossuet, Histoire des variations, XY, xxii ; éd. 1688, t. II, p. 375-879).

La persécution sanglante commence en 1535 par le supplice de ceux qui nient la suprématie ecclésiastique d’Henri VIII. Elle se continue sous Edouard VI : loi de 1647, punissant de la confiscation, de la prison, et, en cas de seconde récidive, de la iiiort ceux qui refuseraient de reconnaître cette suprématie du roi, ou qui reconnaîtraient celle du Pape. Elle se précise et s’aggrave par plusieurs lois d’Elisabeth : bill de 1558, confirmant et renouvelant celui de 1547 ; bill de 1563, condamnant aux peines portées contre le crime de traliison toute personne convaincue pour la seconde fois d’avoir reconnu par écrits, paroles ou actions, l’autorité du Pape, ou toute personne engagée dans les saints ordres ou occupant un emploi public, qui aurait pour la seconde fois refusé le serment de suprématie : dans l’un et l’autre cas, la première désobéissance était punie du bannissement et de la confiscation des biens ; bill de 1671, punissant également des peines de trahison quiconque sollicite ou obtient une bulle papale, ou reçoit l’absolution en vertu d’une telle bulle, et seulement de la confiscation des biens et de la prison perpétuelle quiconque est trouvé porteur d’un Agnus Dei, d’une croix, d’une médaille pieuse ou d’un chapelet ; bill de 1584, punissant comme coupable de haute trahison tout prêtre catholique, né en Angleterre, qui s’y trouverait encore dans un délai de quarante jours, toute personne qui le secourrait et lui donnerait asile, et même tout Anglais élevé dans un séminaire ; bill de 1598, statuant que toute personne au-dessus de l’âge de seize ans, qui refuserait pendant un mois d’assister au culte anglican, serait mise en prison ; que si, après cette correction, elle persistait encore trois mois dans le même refus, elle serait bannie du royaume à perpétuité, et que si elle désobéissait à son ban et revenait en Angleterre, elle y subirait la peine capitale due à la félonie.

Ces lois sanglantes, qui tirent encore de nombreuses victimessous lesStuarts, et dont desassociations de fanatiques stimulaient au besoin l’application (voir une notedeLiNGARD, t.III, p. 696, sur une association fondée dansée but de 1640à 1651, avec la liste des condamnations capitales qu’elle obtint), n’étaient pas toujoiirs appliquées dans toute leur sévérité ; mais sur ceux qui leur échappaient tombait le fardeau des amendes et des confiscations, car tout catholique fidèle commettait au moins, en s’abstenant d’assister au culte de l’Eglise anglicane, le délit de recusancy. Sous Elisabeth, les réfractaires durent payer chaque mois une amende de vingt livres sterling, ce qui, si l’on tient compte de In valeur relative de l’argent, formait à la fin de l’année une somme très élevée (voir Cobbbt, A history of the protestant

Rejormaiion in England and Ireland, Londres, 1826, lettre xi). Un grand nombre de gentilshommes lurent forcés, pour l’acquitter, de vendre une portion considérable de leurs biens : et quand ils étaient arriérés dans le paiement des amendes, la loi donnait à la reine le pouvoir de saisir toutes leurs propriétés mobilières et les deux tiers du revenu de leurs domaines tous les six mois. Quant aux pauvres gens, incapables de payer le tarif, ils étaient taxés arbitrairement selon leurs ressources présumées (voir LiNGARD, t. III, p. 50, et la note p. 571-572, relatant, d’après des papiers de famille, les amendes et emprisonnements infiigés pendant une longue suite d’années à un réfractaire). Soup les Stuarts, la recusancy est punie de même, et le maître doit payer non seulement pour lui, mais encore pour ceux de ses serviteurs qui ne vont pas à l’église anglicane : une somme de cent livres doit être versée pour tout mariage célébré en dehors de celle-ci, une somme égale pour tout baptême ou tout enterrement fait dans les mêmes conditions. Quelquefois on laissait s’accumuler les amendes, et on les réclamait tout à coup en bloc, ce qui entraînait la ruine d’une famille ; quand prévalaient des idées plus modérées, on se contentait d’une sorte d’abonnement. Mais en plus, sous Jacques I", le refus du serment d’allégeance entraîna, avec l’emprisonnement perpétuel, la confiscation de toutes propriétés personnelles et du revenu des terres pendant la vie ; sous Charles I", la confiscation des biens fut décrétée contre quiconque refusait de renoncer par serment au dogme de la transubstantiation.

Le court règne du catholique Jacques II n’amena qu’un soulagement momentané dans la situation de ses coreligionnaires ; par ses demandes prématurées en vue d’obtenir du Parlement la suppression du Test, par les nombreuses dérogations qu’il y apporta de son autorité privée, par les démonstrations d’un zèle imprudent, il compromit la juste cause qu’il essayait de servir : en se montrant plus docile aux suggestions de Louis XIV qu’aux conseils modérés du pape Innocent XI, il rendit inévitable la révolution qui le renversa en 1688. Celle-ci fut suivie d’une dure réaction protestante. Guillaume III et Marie remirent en vigueur, en les aggravant même sur certains poinis, les lois pénales qui frappaient les catholiques. L’  « Acte pour prévenir l’accroissement du papisme », voté en 1700, punit comme traîtres et félons les prêtres catholiques remplissant leurs fonctions, et accorde cent livres de récompense à leurs dénonciateurs ; il déshérite les catholiques qui ont été élevés hors du royaume ; il donne le pouvoir à un fils, ou au plus proche héritier, s’il est protestant, de prendre possession des biens du père ou du parent resté catholique ; il enlève aux catholiques la faculté d’acquérir des propriétés territoriales. Rare-ment persécuteur fit plus directement appel aux basses cupidités, et porta aux droits sacrés de la propriété et de la famille un coup aussi meurtrier. Mais on recula devant l’eflusion du sang : les prêtres arrêtés furent seulement condamnés à la prison : l’un d’eux, le Franciscain Atkinson, mourut en 1729, après trente ans de captivité.

Un bill voté en 1704, sous la reine Anne, contre les catholiques d’Irlande va plus loin, car il rétablit la peine de mort : non seulement il restreint encore leurs droits civils, les déclare incapables d’acheter des terres, de faire des baux de plus de trente et un ans, de prêter sur hypothèque, mais encore il punit la célébration de la messe par la déportation et, en cas de récidive, par le gibet : ce bill est connu sous le nom de laws of discovery.

Cependant, vers le dernier quart du xviii’siècle.