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MARTYRE

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lésilaient-ils, dans cette persécution, comme dans a précédente, à transformer les persécutés en iiartyrs. Deux frères, de la ville d’Aquæ Regiae, 1 valent une première fois été torturés enscjuble.puis 'un, qui un instant avait paru faiblir, s'était resaisi et aait cric aux bourreaux : « Inventez contre es chrétiens tous les supplices que vous voudrez, ce |ue mon frère fera, jele ferai. » On appliqua à l’un t à l’autre les lames rougies au feu, les ongles de er, puis lesbourreaux, les voyant inébranlables, les envoyèrent en disant : « Tout le peuple les imite, t personne ne vient à notre religion. » V, v) Ceuxi aussi, par leur exemple, avaient « libéré leur ité ».

Une question se pose après cette persécution comme iprès toutes les autres : celle des lapsi. La lecture lu livre de Victor de Vite montre qu’ils furent nomircux. Cependant, le nombre des martyrs et des onfesseurs l’emporta certainement. L’auteur de la 'assion des sept martjrs dit, dans un style imagé :

Si l’on vit sortir de l’arche, à la recherche des adavres, une foule de corbeaux destinés à périr, lus grande cependant est celle des colombes bieneureuses qui s’envolèrent au nom de la sainte Triité. B (Passio septem monaclionnii, ii.) Dès le lenemain de la persécution, un concile romain, tenu u Latran en 487, posa les conditions de la réconciation, et détermina la durée de la pénitence des enégats. Il frappa les membres du clergé de plus évères sanctions que les laïques. Il distingua soineusement ceux qui avaient été rebaptisés par ruse u par violence et ceux qui s'étaient soumis de plein ré à un second baptême. Il semble que queluc confusion s'était faite à ce propos dans esi)rit des simples, et que beaucoup de ceux qui valent été rebaptisés malgré eux se croyaient deveus ariens (Hefelk-Leclercq, Histoire des conciles, , II, p. 934-935). Tous n’avaient pas vu la question ussi clairement que l'évêque Habetdeum. Il subisait la peine de l’exil on de la relégation dans une ille de Tripolitaine, où demeurait un des plus fanaiques prélats ariens. Celui-ci lui lit lier les mains, lettre un bâillon dans la bouche, et l’inonda d’eau aptismale. Mais « cette eau menteuse ne put sublerger sa volonté).. Quand il eut été délivré de ses ens, l’arien lui dit en raillant : « Eh bien I frère [abetdeum, te voilà devenu chrétien à notre maière : que te reste-t-il donc à faire, sinon te soulettre aux ordres du roi ? — Il n’y a, répondit-il, de lit condamnable que si la volonté a consenti. Moi, ?rræ dans ma foi, j’ai par mes cris confessé et éfendu ce que je crois et ce que j’ai toujours cru. Lprès que tu m’eus chargé de chaînes et que tu eus errouillé la porte de ma bouche, je me suis retiré ans mon cœur comme dans un prétoire, et là ai dicté aux anges les Actes de la violence qui l'était faite, et je les ai faitlire à Celui qui est mon ouverain. » (Victor de Vite, V, xii)

La résistance de la liberté morale à la force matéielle a rarement inspiré de plus beaux accents ; et je e jjuis mieux Unir que par une telle parole le porralt de ces martyrs de la persécution vandale, dont i lidt lilé est le dernier rayon de gloire qui ait claire l’ancienne Eglise d’Afrique.

V. -- Le martyre a L'ÉPOQnE de la Réforme

. L' intolérance protestante ; 2. Le luthéranisme : Allemamagne ; Etats Scandinaves ; 3. /.e cali’inlsnie : Pays-Bas ; France ; Suisse ; Hongrie ; 4. L’anglicanisme : la législation ; les prisons et la torture ; les supplices ; le cardinal Fisher, Thomas More ; martyrs anglais devant leurs juges ; V humour dos martyrs ; la joie des

martyrs ; les conversions opérées par eux ; le loyalisme des martyrs anglais ; 1 opinion des contemporains ; bibliographie ; 5. i’n épisode contemporain.

I. L’intolérance protestante. — Les catholiques rais à mort en haine de leur foi furent très nombreux dans les pays où s’implanta la Réforme.

L’intolérance religieuse a fait, au xvi^ siècle, des victimes dans tous les partis. Un grand nombre des propagateurs ou des adhérents des idées nouvelles, lulliériens et calvinistes, ont été décapités, pendus ou brûlés par sentence des Parlements en France, de l’Inquisition en Espagne et en Italie, des tribunaux de Philippe II dans les Pays-Bas. Les villes protestantes de la Suisse et les princes luthériensde l’Allemagne noient ou brûlent les anabaptistes. Henri VUl, pour affirmer l’orthodoxie anglicane, lit brûler des anabaptistes et des luthériens. Sous le règne de sa fille Marie, des anglicans sont exécutés. Parlant des réformateurs tombés ainsi ^ic limes de leurs opinions, un célèbre historien protestant a loué

« la fermeté inflexible qui leur lit braver les dangers, les tourments et la mort même, lorsqu’en prêchant les doctrines de paix ils portaient le tumulte

de la guerre dans toutes les parties de l’Eglise chrétienne ». (Hume, The I/istory of England frurii ihe invasion of Jiitius Cæsar to ilie révolution in 1688, Londres, 1762 ; trad. française, t. VII, Paris, 1819, p. 16) On ne peut dire plus clairement que beaucoup d’entre eux vécurent et moururent en révoltés. C’est l’impression que donnent les martyrologes de la Réforme (Chespin, Foxe), résumés par Agrippa d’AuBiGNÉ (Histoire universelle, 1616, 1. II, c. x : éd. delà Société de l’Histoire de France, t. I, Paris, 1888, p. 202-208). On y trouve des personnages comme Cranmer, le mauvais génie d’Henri VIII, qui avait luimême, sous ce prince, envoyé au feu des hérétiques, qui changea plusieurs fois de religion au gré des souverains, et ne montra sur le bûcher l'énergie du désespoir qu’après avoir vainement attendu dune dernière rétractation la grâce de la vie ; comme ce prêtre apostat qui faisait manger des hosties à son chien, et, au moment de la mort, demandait en raillant qu’on essayât de ramener celui-ci à la religion catholique ; comme ce fanatique qui, pendant la messe, arrachait l’hostie des mains du célébrant ; ou cet ancien moine qui, à Westminster, assommait avec un morceau de bois le prêtre qui disait la messe, et dont le sang coulait dans le calice et sur l’hostie consacrée : Foxe appelle le meurtrier « un (idèle serviteur de Dieu ». On y voit encore des condamnés qui, avee une assurance suspecte, ont préditle châtiment prochain de leur juge, prédiction accomplie soit avant la Un du procès, soit au lendemain de l’exécution, ce qui fait dire à Bossuet : a II est aisé de prophétiser quand on a de tels anges pour exécuteurs. » (Histoire des variations, X, vu ; éd. de 1688, t. II, p. 97) « Est h noter que tous les susnommés sont appelés martyrs », écrit Agrippa d’Aubigné, voyant en chacun d’eux « celui qui meurt purement pour la foi » ; mais il faut avouer que « ce courage forcené », comme dit encore Bossuet, ressemble peu à « la constance véritable, toujours réglée, toujours douce et soumise aux ordres publics, telle qu’a été celle des martyrs ". (Cinquième avertissement aux protestants sur les lettres de M. Jurieu)

Cependant, à côté de ces fanatiques, et faisant contraste avec eux, beaucoup d’autres dissidents ont accepté la mort avec résignatfon, non comme des rebelles, mais comme des croyants persuadés qu’en souffrant pour leurs opinions religieuses ils accomplissaient un devoir de conscience. Sans trop regarder si à leur bonne foi ces involontaires victimes de l’erreur n’ont pas souvent mêlé, dans une plus ou