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MARIE - INTERCESSION UNIVERSELLE

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faire sentir sur nous, mais comme iine intervention actuelle dans notre enfantement à la grâce et à la

« loire, dans la formation de Jésus en nous.

" VI.' Certitude de cette doctrine, notamment pour l’intervention actuelle dans tontes les grâces. — Je n’ai pas tout dit, tant s’en faut, sur cette grande question. Et je regrette notamment de ne pouvoir m’arrêter à une comparaison entre nos deux mères, Marie et l’Eglise, qui nous aiderait singulièrement à grouper nos idées et à mettre en relief la nature et l'étendue de la coopération de Marie à l’oeuvre^ rédemptrice, de sa médiation et de sa maternité de "Tàce. Je ne puis m’attarder non plus, ni sur la nature et les modes variés de cette intervention de Marie dans notre vie surnaturelle — ce que le P. Terrien appelle très heureusement l’exercice des fonctions maternelles — ni sur certaines idées qui touchent de près à notre question sans cependant se confondre avec elle, comme la toute-puissance suppliante de Marie, la certitude d'être exaucé en recourant à elle, la nécessité de recourir à elle poiir obtenir ce qu’on demande, et notamment la nécessité d’une certaine dévotion à Marie pour être sauvé. Pour ces questions et autres du même genre, qu’il me suffise de renvoyer encore au beau livre du P. Terrien.

Il reste à dire un mot, en finissant, d’un point qui touche plus directement à notre sujet. Quelle certitude, ou, pour parler le langage technique, quelle note théologique peut-on attribuer aux conclusions dont nous avons essayé d’indiquer le sens et les fondements ?

Si l’on parle en général de la coopération de Marie à l'œuvre rédemptrice, c’est là sans nul doute une vérité qui touche à la foi, et il n’y aurait, si quelqu’un s’avisait de la nier, aucune difficulté à la définir. Les prolestants crieraient peut-être. Mais ils ne pourraient se donner une apparence de raison qu’en faussant l’idée catholique de cette coopération et en nous prêtant la prétention absurde d'égaler la mère et le Fils, de faire de Marie un second Jésus, d'ôter.^ Jésus pour donner à Marie.

Il faut dire la même chose pour les deux titres sous lesquels les chrétiens affirment et se représentent cette coopération, celui de médiatrice et celui de mère. Et, remarquons-le bien, cette coopération, comme médiatrice et mère, ils ne l’entendent pas uniquement ni directement du concours de Marie aux œuvres de Jésus sur la terre, à son incarnation et à sa mort en croix : ils l’entendent avant tout d’un concours de Marie à notre sanctification et à notre salut, d’une part de Marie dans les grâces qui nous sanctifient et qui nous sauvent ; ils ne l’entendent donc pas uniquement d’un concours lointain et médiat, mais d’un concours direct et prochain.

Dire la même chose encore des deux moments que l’on peut distinguer dans l’exercice de ce concours. Marie a coopéré à notre sanctification et à notre salut pendant qu’elle était sur la terre, coopération dont l’acte premier et principal a été le consentement et le concours à l’Incarnation, coopération continuée durant toute la vie de Marie par l’adhésion incessante de sa volonté à l'œuvre de son Fils ici-bas et par le concours, soit d’action, soit de prière, qu’elle sut donner à la formation de Jésus et à celle des apùlres et des premiers membres de l’Eglise. C’est le premier moment.

Nous avons vvi comment ce consentement et ce concours d’action ou de prière ne portaient pas seulement sur des faits particuliers, mais comment ils s'étendaient à l'œuvre rédemptrice dans toute son ampleur, et comment, par conséquent, ils étaient

regardés par les Pères et devaient être regardés comme atteignant aussi notre sanctification et notre salut, comme y étant une coopération directe et prochaine. Par là, le premier moment exige le second, le concours au ciel. Marie continue au ciel, par sa prière et par son intercession indissolublement unies à celles de Jésus, son œuvre de médiatrice et de mère, et cette œuvre de prière et d’intercession s'étend évidemment à l’ensemble de l'œuvre rédemptrice : elle est générale et universelle, puisqu’elle ne se distingue en rien, par l'étendue, de l’intercession de Jésus.

Cette double coopération de Marie, sur terre et au ciel, fait sûrement partie de l’enseignement catholique : les deux sont d’ailleurs inséparables, et les chrétiens songent à peine à les distinguer ; ils voient que l’une et l’autre ont leur centre dans la maternité divine, comme elles sont l’une et l’autre l’exercice normal de la médiation et de la maternité spirituelle. Tout cela est indiscutable, tout cela est indiscuté. Tout cela peut être défini. Sur ce point, le P. Terrien lui-même, si réservé dans ses affirmations, est aussi afiirmatif que personne.

Reste une question. Toutes les grâces sans exception nous sont-elles données à l’intercession de Marie, nous viennent-elles par Marie, comme elles nous sont données à l’intercession de Jésus, comme elles nous viennent par Jésus ? Ici quelques théologiens semblent hésiter. Saint Alphonse ne donnait la thèse affirmative que comme très probable. Le P. Terrien, nous l’avons vu, se tient aussi sur une certaine réserve. Cette réserve, il faut le répéter, ne porte en rien ni sur l’universelle médiation de Marie, ni sur sa maternité de grâce, ni sur sa coopération à l'œuvre de notre sanctification et de notre salvrt par son intervention dans la distribution des grâces. Cela admis, la question douteuse, à supposer qu’il y ait doute, se réduirait à bien peu de chose, à ceci au plus : l’intervention actuelle de Marie dans la distribution des grâces doit-elle s’entendre de <oi ; <e «  les grâces sans exception, ou bien, admise, en gros et pour la généralité des grâces, l’intervention de Marie comme indiscutée et indiscutable, peut-on faire des exceptions et discuter sur l’universalité absolue ? Les raisons d'être moins affirmatif sont, d’une part, que cette question spéciale n’a guère été traitée que dans ces derniers temps et que, partant, les témoignages explicites sont moins nombreux ; d’autre part, qu’on oppose quelques difficultés à la thèse ainsi posée.

Il faut respecter cette réserve et cette discrétion de la science et de l’amour. Mais il y aurait inconvénient à trop en tenir compte. Si, en eflet, nous regardons la question de plus près, que constatonsnous ? Que les difficultés reposent toutes sur des équivoques ou de faux supposés, et qu’elles vont aussi bien contre la médiation universelle et la maternité de grâce, telle que tous doivent l’admettre, que contre l’universalité absolue et l’exclusion de toute exception. C’est dire qu’il n’y a pas à en tenir compte.

Que constatons-nous encore ? Que les raisons apportées pour la médiation universelle et pour la maternité de grâce en général valent également pour toutes les grâces ; que rien n’autorise ni une limitation ni une exception. Il serait donc arbitraire d’en introduire, et il faut prendre les textes et les raisons dans toute leur ampleur et dans toute leur portée. Ce n’est que logique. Et la logique ici s’impose avec une force spéciale à cause du nombre et du poids des raisons et des autorités qui vont positivement et ex-, pressément à rejeter toute limitation ou exceptions Dès lors, la question de la coopération à tontes le