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MARIE.

IMMACULEE CONCEPTION

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une vie de saint Ildefonse. archevêque de Tolède (637-667), l’honneur lui est attribué d’avoir institué la fêle de la Conceplion de Notre-Dame. Celle attribution repose sur l’interprétation arbitraire d’un décret du roi Ervige, prescrivant aux Juifs d’observer certaines fêtes, et tout d’abord « festum sanctae Virainis Mariae, qtio iiivrinsa Conceptio rjusdem GeniUicis Dei celehrutur ». Il fauilrait prouver qu’il s’agit ici de la conception passive de Marie, et non pas de sa conception active, celle qui la rendit Mère de Dieu au jour de l’Annonciation. Ballkrim, Quæstio an S. llildefonsus episcopiis loleianus conceptae Virgmis festum in Jlispaniis institiierit, Rome, é856 ; réimprimée dans Sylloge woiniiiienloriim, t. I, p. ix.

De son côté, Ballerini a prétendu prouver l’antiquité du culte rendu à l’immaculée conception île la bienheureuse Vierge Marie par une charte de donation, dont l’auteur serait Hugo de Summo, protre de Crémone. Sylloge. t. I, p. i-a5. Dans cette pièce, censée écrite en décembre loiy, in feslo sanctæ et immacnlatæ Conceptionis Ileatæ Virginis Mariae, le donateur parle de Marie comme de celle « quae gratia Filii al> originali lahe anticipala redeniplione præsertala semper fuit, tam anima quam corporeet immaculata » ; il prescrit, entre autres choses, de chanter chaque année en la même fête deux slro[)lies, qui se terminent l’une et l’autre par cette espèce de refrain : » Sine laie concepta. » Mais il est impossible d’accorder une valeur quelconque à ce document apocryphe. Malov, L’Immaculée Conception, t. I. p. Ml, Bruxelles, 1867 ; K. Kkllnbb, lleorlologie, 3’édit., p. 192, noie 4 Le premier document certain vient de Naples. C’est un calendrier, gravé sur marbre et portant, au Q décembre, cette inscription : La Conception de ta Sainte Vierge Marie. La date serait à placer entre les années 8^0 et 800, d’après l’éditeur, Mazzocchi, Vêtus marmoreum Xeapolitanæ ecclesiæ Kalendai-ium, Najiles, 1744. Comme l’Italie méridionale dépendait encore de l’empire grec, l’influence byzantine explique tout à la fois la présence de la fête à Naples et la date où elle s’y célébrait. Une seule différence, accidentelle du reste, est à remarquer ; le titre n’est pas : Conception de sainte Anne, vaais : Conception de la Sainte Vierge Marie.

Plus riche et plus important est l’apport fourni par l’.Vngleterre. Jusqu’à ces derniers temps, on rattachait assez communément à l’époque de saint Anselme, qui fut archevêque de Cantorbérj’de logS à 1109, l’établissement de la fête de la Conception dans les pays du Nord, et beaucoup d’auteurs rapportaient l’origine du mouvement à une vision dont il sera question plus loin, la vision de l’abbé Helsin, datant de quelques années après l’invasion normande de 1066. Des publications récentes ont modilié ces vues.

La fêle de la Conception de la bienheureuse Vierge IMarie apparaît, à partir du début du x* siècle, dans plusieurs documents d’origine irlandaise, étudiés par le P. TnunsTON, S. J., The Irisli Origins of our Lady’s Conception Feast, 1904 ; cf. Eadmeri monachi Cantuariensis Tractatus de Conceptione sanctæ Mariae, p. xxxii s., pour la fixation des dates. Le martyrologe de Tallaght, rédigé ers l’an 900, énonce au 3 mai, après l’Invention de la Sainte Croix, la Conception de la ]’ierge Marie : ce qui concorde parfaitement avec celle mention, insérée dans les Acta Sanctorum Mail, t. I, Anvers, 1680, p. 36l, parmi les Præiermissi du 3 « jour : Mariæ Virginis Conceptio celebratnr in Martyrologio Tamlactensi. Dans un calendrier versifié, d’après un exemplaire composé après la mort du roi Alfred, entre 901 et 9/1O, on lit au 2 mai : Concipitur Maria virgo senis, c’est-à-dire

le six des nones. Enlin le calendrier d’Œngus, qu’on dit remonter au commencement du ix" siècle, présente cette indication à la date du 3 mai : Feil tnar Maire nage. La grande fête de la Vierge Marie ; indication soulignée dans un manuscrit par cette note marginale de seconde main : « Feil mar Maire uage, el reliqua, id est, liæc inceptio eius, ut alii putant (sed in februo mense vel inmartio fada est illa, quia post VII mensesnata est, ut innaratur) le/ quæliiet alla feria eius. » Il s’agirait donc ou de la fêle de la Conceplion, ce qui esl l’avis d’un certain nombre, ou de quelque autre fête de la Vierge. En objectant que, dans la première hypothèse, la date exacte serait, non pas le mois de mai, mais celui de février ou de mars, le glossateur anonymesuppose, d’une pari, que Marie esl née le 8 septembre, el de l’autre, qu’elle serait restée seulement six ou sept mois dans le sein de sa mère, conformément à une légende orientale que nous avons déjà rencontrée, col. 236.

Tels sont les documents. Prouvent-ils que la fêle dont ils font mention se célébrait réellement en Irlande dès cette époque, ou n’atlestent-ils que l’érudition des moines rédacteurs de ces calendriers ou ménologes ?Quelques-unsadmettent la secondehypo-Ihèse, comme Kellnkr, 0/^. (17., p. 192, ou se tiennent sur la réserve, comme Edm. Bishop, On tite Origins of tlie feast of tlie Conception of the Blessed Viigin Mary, réimpression de igo^, note préliminaire, où, parlant de la fête irlandaise de la Conceplion d’après les susdits documents, il insère cette remarque, p. 5 s. : « Si tant est que cette fête ait été effectivement célébrée : if, indeed, such a feast were ever actually observed ». II faut avouer que la façon indécise dont parle l’annotateur du calendrier d’Œngus et la disjonctive qu’il pose touchant la fête du 3 mai sont assez difficiles à comprendre dans rh3’pothèse d’une solennité réellement en usage. Par ailleurs, la date du 2 ou du 3 mai, assignée dans ces documents pour la fêle de la Conceplion, pose un problème obscur el inexpliqué ; car si les calendriers de l’Eglise copte, où le P. Thurston a cherché un point d’appui, mentionnent, au début du mois de Baschncs (iin avril et mai), )ine fête de la sainte Vierge, c’est une fête de la Nativité. Mai, Scriptorum veteruni nova collectio, t. IV, p. 94 ; F. Nau, Les Ménologes des Evangéliaires coptes-arahes, dans Patrologia orientalis, t. X, fasc. 2, p. 202 ; E. TissEHANT, Le calendrier d’Aboul-Barahal, Ibid., p. 270. Mais, comme au dixième jour du mois de Tout (7 septembre), on trouve aussi la Nativité de la Sainte Vierge, Ihid., p. 187 s., 270, il se peut que les moines irlandais aient été amenés à voir dans la fêle de mai la conception ou première naissance de Marie.

Une autre série de documents, publiés la plupart par Edm. Bishop en 1886, se présente dans de meillevires conditions que la précédente. Ils sont d’origine anglo-saxonne et antérieurs à l’invasion normande de 1066. Quelques-uns contiennent seulement, au 8 décembre, l’annonce de la Conception de la sainte Mère de Dieu ou de sainte Marie ; tels, deux calendriers provenant des abbayes bénédictines d’Old Minster et de Newminster, à Winchester, et rédigés, le premier sous le gouvernement de l’abbé .elfvin (io34-io57), le second vers io30 ; tel encore’un Martyrologe, composé vers io50 dans le monas- 1ère de Saint-Augustin à Cantorbéry. D’autres documents renferment une formule de bénédiction in die Conceptionis sanctæ Dei Genitricis ou / ; ( Conceptione sanctæ.Uariæ ; tels, deux Pontificaux dressés, l’un pour l’église priiuatiale de Cantorbéry après 1023, mais dans la première moitié du siècle, l’autre pour Léofric, évêque de Credilon (io46), puis d’Exeler (1050-1073). Le début des deux formules en indique le