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MARIE. — IMMACULIŒ CONCEPTION

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l’empereur Basile PoRpnYHOGÉNÈTE(g76-1025), P. G., CXVll, 195. Une note s’ajoute, pour mentionner et rejeter, dans les mêmes termes que saint André de Crète, les deux erreurs déjà signalées : « La sainte Vierge fut donc conçue, et elle naquit, non pas au bout de sept mois, comme certains le prétendent, mais après neuf mois révolus, et l’homme ayant sa part à la naissance de cette enfant de promesse. » Enlin, dans le Trpicon de l’abbé NicoN, dressé vers l’an loGo pour le i)atriarcat d’Antioclie, et par conséquent pour une très grande partie des églises d’Asie, on lit, toujours au g déceml)re : La Conception de sdintf Anne, quand elle conçut la bienheureuse Viei-fie Marie, Mère de Dieu. P^^semxsi, Kalendariiiin Ecclesiæ iiniversac, t. V, [). 431J, Rome, 1755.

Tel est le fait. La ditliculté commence, quand se pose la question ultérieure : Quel sens faut-il attribuer à l’institution de la fête de la Conception en Orient ? D’après les théologiens modernes de l’Eglise gréco-russe, cette fête se rapporte à la conception actiye, à la concci)tion de sainte Anne, en j’joignant les circonstances miraculeuses dont on la supposait entourée. Si la conception active a nécessairement pour terme corrélatif la conception ^xrss/ie de Marie, cette conception passive ne doit pas être envisagée comme conception immaculée, mais comme conception de l’Immaculée, c’est-à-dire de celle qui porte ce titre, en tant que Vierge Mère, exempte de toute faute personnelle et puriliée totalement du péché originel à une époque postérieure à sa conception : Lebedev, op. cit.. j) 198 s. ; Alex, von Maltzkw, Fasten- and Blamen-Triodiennebst den Sonntagslieden des Oktoichos der Orthodox-katholischen Kirclie des Morgenlands, p. cxxxix, Berlin 1899 ; V. Maksi-Movic, article résumé dans 5/<H’or » ni Utteræ iheologicae, Prague, 1906, t. I, p. 143, sous ce litre : An in orthodoxis libris liturgicis doctrina de immaculata Dei Genilricis conceptione expressa sit ? Ces auteurs invoquent d’abord le titre même de la fêle : ’H

puis ils font appel aux expressions qui se lisent dans l’oflice liturgique, celles-ci entre autres : « En ce jour nous célébrons, ô sainte Anne, votre conception, parce que, délivrée des liens de la stérilité, vous avez conçu celle qui a pu contenir l’Immense. En ce jour, l’univers fête la conception d’Anne, due à Dieu, /e-/ivr, ij.éjr, -j hr &SCÛ. Caiion de S. André, P. G., XCVH, 1306, 1312.

Parmi les théologiens catholiques, un certain nombre sont à peu près du même avis ; ils ne croient pas que la croj’ance à l’immaculée conception de Marie puisse se rattacher à la fête orientale de la Conception. L’Eglise grecque célébrait aussi la conception de saint Jean Baptiste ; il sullit de comparer les deux oflices pour se convaincre qu’il n’y a pas entre eux de différence essentielle ; même l’épithète de sainte, appliquée dans l’un à la conception d’Anne, est également appliquée dans l’autre à la conception d’Elisabeth : sifr, ijsrj op, vr, TKVT£ç t>, v n-’, hi v-rfiùï ixT, Tpirr, , à.-jitri nj’ijTr^lifi. Menées, Septembre, p. 13a, Venise, 1 896. La critique scientifique » va plus loin ; pour elle, tout se réduit à l’acceptation naïve, d’abord par la piété populaire et monacale, puis par les pasteurs, d’une pure légende, calquée sur ce que la sainte Ecriture nous raconte d’Isaac, de Samuel et de saint Jean-Baptiste. L’origine première est à chercher dans le Protéfangile de Jacques, d’où sont sortis plus tard, comme remaniements latins, VEvangile du Pseudo-Matthieu et l’Evangile de la Nativité de Marie.

Le dogme dêllni par Pie IX est, en soi, parfaitement indépendant du rapport qui peut exister, ou ne pas exister, entre la fête orientale de la Conception de

sainte Anne et la croyance à l’immaculée conception de Marie. D’ailleurs, sur ce point-là, les rédacteurs de la bulle /ne/fabilis se sont montrés fort réservés ; la fête de la Conception dont il est parlé, ^ Quani originaleni et suivants, c’est surtout la fête occidentale, tolérée d’abord, puis encouragée et enfin canoniquement instituée par l’Eglise romaine. Malgré cela, le problème soulevé garde son intérêt dans une étude sur le développement de la croyance au privilège mariai.

Que les instituteurs de la fête orientale aient voulu honorer la conception de sainte Anne pour les circonstances miraculeuses dont on la supposait entourée, les raisons données ci-dessus par les lliéoiogiens gréco-russes le prouvent sullisamment. Mais que ce soillà l’objet total, àl’exclusion delouteautre considération se rapportant, soit ex])licitenient, soit implicitement, à la conception de la Mère de Dieu, envisagée comme sainte, c’est une autre question. Le titre, même officiel, d’une fête n’en indique pas toujours l’objet précis, moins encore l’objet total ; parfois ce titre se rattache à une circonstance extérieure plus frappante, mais secondaire, par exemple dans la fête de l’Annonciation, dont l’objet principal est la conception du Verbe incarné, et non pas le message angélique ; de même dans la fête de la Purilîcation, dénommée par les Grecs la Jtencontre. ToscANi et CozzA, De immaculata Deiparæ conceptione hymnologia Græairum. Préface, n. j, p. xv s.

Pour déterminer sûrement l’objet total de la fête, à notre tour recourons à l’office liturgiquede la Conception, d’après les Menées, VAntholugion et autres documents du même genre, aux 8 et 9 décembre, vigile et jour de la fêle chez les Grecs. D’abord, ce qu’ils présentent à nos hommages, ce n’est pas seulement la conception active ou conception de sainte Anne ; c’est atissi la conception /lassire ou conception de Marie elle-même. Dans les Menées, aux Matines de la vigile, toutes les créatures sont invitées à louer

« la divine conception de la Mère parfaitement innocente

11. Si, dans son Canon largement utilisé dans les Menées, et dans VAnthologion, André de Crète commence par proposer à la vénération des fidèles celle qui conçoit miraculeusement, aussitôt après, sa pensée passe à la Vierge, pour nous montrer en cette innocente, future Mère du Verbe, le fruit diri-’nerænt accordé aux prières de ses parents, r.y-i T’Az’yti ôéôwxwç zKcriv, Trj 71 rsy.’jjzvy a’./v/, >. P. G, , XCVII, 1308. De même, s’il est dit dans les Menées, au 9 décembre :

« En ce jour l’univers célèbre la conception

d’Anne, faite en Dieu », il est dit aussi des deux époux. Ode 3 : « Ayant exaucé leurs prières. Dieu leur accorda la vraie porte de la vie, dont la sainte conception est proposée à nos hommages, >? ; tv ; v « /i’kv Ti/// ; ’(7t.i, <A : vCTJ///iitiv. « Venise, 1896, p. 61, col. 1 ; 62, col. 2.

Dans le dernier texte, l’épithète de sainte tombe directement sur la conception passive ou conception de Marie ; c’est celle-ci qui est dite sainte. On a d’autant moins le droit de diminuer la force de l’épithète, que souvent à la conception de sainte Anne répond, comme terme, dans la même phrase, Marie innocente, sans tache aucune, lillc de Dieu : n Le chœur des’prophètes a prédit jadis cette Vierge innocente, immaculée et tille de Dieu, 9- : 17TKiôa, que conçoit Anne longtemps stérile et inféconde ; en ce jour, nous qui lui devons le salut, célébrons-la dans la joie de notre cœur, comme seule exempte de toute tache, w ; fj’.-jrjv nv.M’j.’jifi.m. » Antkolug., 9 déc., Ode 3.

« Aujourd’hui, dans le sein d’.Vnne, Marie est

conçue, Marie la fille de Dieu, >, ôwr-y.ir, préparée pour servir de demeure au Souverain Roi et pour concourir à la réparation du genre humain. » Strophe de saint Germain, dans Toscani, op. cit., p. loi.