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1889

LIGUE CATHOLIQUE (LA SAINTE)

1890

confréries et tiers ordres, qui s’étaient développés et uiullipliés les dernières années, sous la direction de l’un et l’autre clergé, embrigadant toutes les classes de la société dans une vaste union de prières, d’exercices S|)irituels en commun, de bonnes œuvres, de secours mutuels, à laquelle se rattachait la promesse de défendre par tous les moyens la foi catholique contre l’erreur et ses tenants. La confrérie du Gonfalon s’était formée depuis iSyS, venant d’Italie, à Lyon et à Paris ; les capucins, à l’exemple d’autres religieux, avaient apporté un tiers ordre nouveau, et bien que le rôle de ces associations soit peu connu en général, leur but même et leur raison d’être, leurs attaches avec le centre de la catholicité, tout les prédisposait à entrer dans le mouvement catholique comme un facteur indispensable.

Il en était de même de la Sorbonne, ce tribunal suprême de théologie respecté par toute l’Eglise, qui avait toujours déi>loyé un grand zèle pour l’orthodoxie. Sa situation olUoielle, le respect de l’autorité royale erapècUaient beaucoup de ses docteurs, même du clergé régulier, qui éprouvaient des sympathies pour la Ligue, de les manifester, et ils ne se déclareront en nombre que quelques mois plus tard, après l’assassinat de Guise ; mais la grande majorité se prononça toujours contre le roi de Navarre. Quant aux suppôts, employés et étudiants, qui n’avaient pas les mêmes raisons de se tenir sur la réserve, ils suivirent de ])lein gré l’entraînement général, à part une minorité d’étrangers, et prirent les armes en masse à la journée des Barricades.

Cet événement marqua le triomphe de la Ligue avec la mainmise du duc de Guise sur la municipalité parisienne, restée lidèle au roi, et que le vainqueur remplaça par ses partisans avérés, y compris les olliciersde quartiers et autres. Les nouveaux magistrats durent se soumettre à l’investiture du roi, ils n’en avaient pas moins renouvelé le serment d’union et la confédération des villes.

En s’abstenant de revenir dans une cité qui lui avait fait un sanglant affront, Henri III laissait le parti lorrain s’y établir en maître, au détriment de ses amis et de sa propre autorité. Le traité de Rouen, juillet 1588, qui marqua sa capitulation et consacra sa mise en tutelle, légitima cette conquête avec toutes les autres des Guise, et Paris resta entre leurs mains.

Le programme du parti catholique devait être désormais, dans la pensée du tout-puissant duc, d’annihiler le roi et de l’obliger à choisir un héritier qui n’aurait jamais pactisé avec l’hérésie. La guerre contre les huguenots eut pour prélude une lutte suprême entre les deux adversaires, mais la supériorité de Guise, dont il abusa, lui attira finalement les l)ires malheurs. Il prit soin de faire nommer aux Etats généraux, chargés de préparer la guerre, une forte majorité catholique. Poussée par lui, elle ne manqua aucune occasion de faire sentir au souverain sa dépendance ; elle le contraignit à renouveler le serment d’Union, qu’il avait prêté après la signature du traité ; elle refusa de semondre une dernière fois Navarre, avant de le déclarer déchu de ses droits ; elle s’opposa à ce que le roi négociât encore sa conversion, projet que le pape fit d’ailleurs combattre par son légat Morosini ; elle rejeta l’acceptation du concile de Trente, même avec les réserves gallicanes ordinaires, prétendit imposer au roi un conseil de surveillance pour l’exécution du dernier traité, et le contraignit à révoquer tous les édits fiscaux portés depuis lô’jG.

Que restait-il, sinon de reléguer le pauvre monarque dans un couvent, comme un Mérovingien ? La logique des faits ne l’entraînait pas moins que

Tome II.

son adversaire à la ruine. Le 23 décembre 1588, Guise tombait assassiné à Blois. Henri III fit encore périr le cardinal de Guise, emprisonna celui de Bourbon et l’archevêque de Lyon : c’était une faute contre le droit public d’alors, un outrage à la dignité et au pouvoir du pape, duqiel dépendaient ces personnages. Henri III retardait indétinimenl toute satisfaction, Sixte-Quiut l’excommunia et il fut contraint de se tourner du côté des huguenots. Au lieu de relever leur prestige, le dernier crime d’Etat des Valois les précipitait dans l’abîme, en affranchissant les catholiques de la direction compromettante de Henri de Guise. Le règne de Nemrod le Lorrain, comme l’appelle Pierre de Lestoile, faisait i)lace, selon la pensée de M. Mariéjol lui-même, à celui de la nation catholique (Ibid, , p. agi).

III. La nation catholique contre le roi protestant. 1889-1394. — Ce n’est pas que le jioint de vue politique fût mis de côté : les ligueurs et les princes lorrains, qui avaient à venger les victimes de Blois, leurs chefs et parents, purent accuser le roi de félonie et de trahison, de violation des engagements pris dans les derniers traités, lui soustraire leur obédience en même temps que prendre les armes pour la religion ; une coalition s’établit tout naturellement entre les catholiques, les partisans de ces princes et le Saint-Siège, elle se renforça au moment où Henri 1Il joignit sa cause à celle de Navarre, et, après la mort du premier, les mobiles religieux reprirent toute leur importance.

Dès le 25 décembre 1588, à la nouvelle de l’attentat, les intransigeants, dirigés par le duc d’Aumale, cousin des victimes, se rendirent maîtres de lacapitale, firent déclarer par’jo docteurs de Sorbonne les Français déliés du serment de fidélité au roi, expulsèrent 60 conseillers du parlement ; la cour ainsi épurée décréta un nouveau serment pour Ventretènement de l’union et, à la requête de la duchesse de Guise, instruisit le procès des événements du ï3 décembre. En même temps les villes ligueuses, Orléans, Chartres, Amiens, Dijon, Toulouse, etc., se déclarèrent contre le roi ; d’autres se joignirent à elles, dans le Nord surtout. Reiras, Rouen, Poitiers, Nantes, Lyon. On chassa les gouverneurs et les garnisons royales, on jura l’Union et on se mit en rapport avec Paris : les députés des Etals généraux, en retournant chez eux, propagèrent le mouvement en dehors des provinces gouvernées par les Lorrains. En se révoltant contre le roi, on ne rejeta pas l’autorité royale, on prétendit rester attaché à la monarchie traditionnelle, réparer les défaillances de son représentant, qui trahissait la foi en faveur d’un hérétique et s’obstinait à ne pas publier la déclaration des Etats contre ce dernier. Les Lyonnais caractérisèrent parfaitement la portée du mouvement insurrectionnel dans une médaille dont l’inscription fut adoptée comme devise en plus d’un endroit : Un Dieu, un ror. une foy, une loy, Ifi.S’.l.

Le roi ayant perdu la confiance de ses sujets, le règlement du conflit et de la succession au trône revenait à des Etats généraux catholiques ; pour leur préparer les voies, un gouvernement provisoire fut constitué par le duc de Mayenne, chef de la maison de Guise, sous forme de conseil des notabilités, dans les principales villes. Le Conseil général de l’Ciiion’établi à Paris, com[>renait des représentants de la noblesse, (hi parlement, de la Cour des comptes, de la bourgeoisie et des curés de Paris, avec quatre cvêques. Il nomma le duc lieutenant générul à la conduite des armées et de l’Etat de France, lui confia la direction de la guerre et se chargea de la correspondance tant avec l’étranger qu’avec les autres

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